Veto européen de David Cameron : un Nick Clegg de perdu, mais une aura retrouvée<!-- --> | Atlantico.fr
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Le gouvernement de coalition dans son ensemble soutient David Cameron.
Le gouvernement de coalition dans son ensemble soutient David Cameron.
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Europe and The City

En rejetant les récentes réformes des traités européens, David Cameron s'est mis à dos son vice-Premier ministre. Mais en défendant ainsi la City, le leader des conservateurs anglais s'est assuré le soutien de la quasi-totalité des autres forces politiques britanniques.

Sophie Loussouarn

Sophie Loussouarn

Sophie Loussouarn est spécialiste de l’histoire politique et économique du Royaume-Uni et proche du monde politique anglo-saxon.

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Depuis vendredi dernier, le veto de David Cameron au nouveau traité européen défraye la chronique. Le Premier ministre britannique a suscité la colère des dirigeants de l’eurozone, et s’est isolé du reste de l’Europe en refusant un accord qui allait à l’encontre des intérêts de la City (place boursière londonienne). Il a également divisé les libéraux démocrates europhiles, et le Vice-Premier ministre Nick Clegg craint la marginalisation du Royaume-Uni.

Néanmoins, le Ministre du Commerce et de l’Industrie, le libéral démocrate Vince Cable, s’est indigné de la proposition inacceptable de Paris et de Berlin. Était-il possible pour Cameron d’accepter la mise sous tutelle de la City qui fait la fierté du Royaume-Uni, et l’introduction d’une taxe sur les transactions financières qui aurait eu pour effet de déplacer les échanges vers la place de Hong Kong ou de New York ? Il s’agit là d’un choix politique mûrement réfléchi, qui concilie les vœux de l’aile droite du parti conservateur, favorable à l’organisation d’un référendum sur l’Union européenne, et d’une stratégie de sauvegarde des intérêts de la City, hostile aux réglementations européennes.

La City de Londres, une place boursière incontournable

Depuis le XVIIIe siècle, Londres est une grande place financière qui n’a cessé de prospérer. La Banque d’Angleterre, née en 1694, est devenue la banque centrale en 1844. Le "Big Bang" du 27 octobre 1986, qui a déréglementé les services financiers britanniques, a attiré les banques étrangères, américaines, japonaises et chinoises, qui se sont installées à Londres.

Un quart de siècle plus tard, la City s’est développée dans le nouveau quartier réhabilité des Docks, Canary Wharf, et draine chaque jour environ 288 000 personnes qui viennent y travailler. Depuis la crise financière de 2008, les banques d’investissement ont fait des coupes sombres dans leur personnel, et 20% des banquiers ont été licenciés. Les services financiers continuent cependant d’apporter chaque année un excédent commercial au Royaume-Uni, qui s’élève à 2,6% du PIB pour les six premiers mois de l’année 2011. En 2010, les services financiers représentaient 6,5% du PIB, et ils ont aussi largement contribué à la vie de la nation, avec 53,4 milliards de livres d’impôts (soit 11,2% du total des recettes du Trésor britannique).

La City assure les deux cinquièmes des échanges de devises, ce qui dépasse le niveau de New York et Tokyo réunis, et domine le marché des produits dérivés. Le Royaume-Uni arrive juste derrière les États-Unis en matière de fonds d’investissement (hedge funds), bien que la tranche de 50% de l’impôt sur le revenu ait exilé quelques financiers britanniques en Suisse.

Nick Clegg, seul contestataire à David Cameron

En signe de protestation, le Vice Premier ministre Nick Clegg n’a pas assisté à la déclaration du Premier ministre à la Chambre des Communes lundi 12 décembre 2011, mais David Cameron a été applaudi par les députés conservateurs eurosceptiques, et il a même rallié deux députés travaillistes.

L’ancien Ministre des Affaires Étrangères de Gordon Brown, David Miliband, a accusé le Premier ministre de revenir cinquante ans en arrière, comparant sa position à celle d’Anthony Eden, qui avait refusé de rejoindre la Communauté Européenne en 1955. L’actuel chef de file des travaillistes, Ed Miliband, tente quant à lui de redéfinir l’identité du parti après les années Tony Blair, qui ont vu un rapprochement des travaillistes au monde de la finance et des affaires.

Le gouvernement de coalition soutient cependant dans son ensemble David Cameron, qui a assuré à la City son statut de grande place financière, loin des pesanteurs européennes. Malgré leurs divergences sur l’Union Européenne, conservateurs et libéraux démocrates sont déterminés à poursuivre leurs réformes économiques, sociales et politiques dans l’intérêt de la nation britannique.

La City, bastion européen face à la puissante place financière de Hong Kong

Dans son discours du 14 décembre 2011 au Bundestag, la Chancelière allemande Angela Merkel a certes regretté la décision de David Cameron, qui a refusé une union fiscale à 27 au nom des intérêts de la City, mais elle a réaffirmé le rôle central du Royaume-Uni dans la Communauté européenne.

Le veto de David Cameron est donc un gage de totale indépendance de la place financière de Londres, qui est essentielle à la prospérité britannique, face à la montée en puissance de la place financière de Hong Kong.

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