Après les attentats, coup de chaud éphémère dans les armureries : mais quelles sont les conditions pour détenir une arme ?<!-- --> | Atlantico.fr
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La demande en armes à feu a été très importante après les attentats de Paris.
La demande en armes à feu a été très importante après les attentats de Paris.
©Reuters

Plus vite que son ombre

Après les attentats du 13 novembre, les armuriers ont reçu un nombre extrêmement élevé de demandes. Mais tout le monde ne peut posséder une arme. En France, la législation est très stricte. Les demandes sont d'ailleurs retombées au bout de 48 heures.

Laurent-Franck Lienard

Laurent-Franck Lienard

Maître Laurent-Franck LIENARD est avocat au Barreau de Paris, spécialiste de la défense des forces de l'ordre, des victimes et du droit des armes. Il est membre de la commission de discipline d'appel de la Fédération Française de Tir, et officier de réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale.

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Atlantico : La demande en armes à feu a été très importante après les attentats de Paris bien qu'elle n'ait durée que 48H avant de retomber immédiatement selon le Syndicat National des Armuriers de France. Ces demandes interviennent rapidement après ce type d'événements mais retombent très vite en raison de la législation sur les armes en France : tout le monde ne peut s'en procurer. Donald Trump quant à lui a critiqué la législation beaucoup trop sévère sur les armes en France. Quelles sont les conditions pour obtenir une arme à feu ? Est-il facile de frauder et de s'en procurer une sans remplir ces conditions ?

Laurent-Franck Lienard : La réglementation des armes en France est extrêmement stricte. Pour acquérir des armes à feu classées, il faut être chasseur, c'est à dire titulaire d'un permis de chasser en cours de validité, ou tireur sportif. Les chasseurs ne peuvent acquérir que des armes de chasse, soit des fusils soit des carabines, aux caractéristiques bien définies qui les réservent à un usage bien précis. Les tireurs sportifs peuvent quant à eux acquérir une gamme plus large d'armes à feu, qui inclut des armes de poing (pistolets ou revolvers). Toutefois, ces armes ne peuvent être acquises qu'avec une autorisation préfectorale qui n'est accordée qu'après un délai assez long, sous réserve d'avoir un casier judiciaire vierge, de produire l'avis favorable de la Fédération Française de Tir, un certificat médical et après une enquête complète réalisée par les services de police ou de gendarmerie. Contourner ces dispositions est toujours possible comme le démontrent les nombreux faits délictueux commis avec des armes militaires sur notre territoire. Il existe un vaste marché parallèle qui semble très actif. De fait, l'ensemble des armes utilisées dans les attentats et les homicides en France sont détenues illégalement et souvent entrées frauduleusement dans notre pays. Depuis de nombreuses années les pouvoirs publics ont restreint la possibilité pour les citoyens d'acquérir et de détenir des armes, ce qui n'empêche manifestement pas les délinquants de s'armer de plus en plus lourdement.

L'état d'urgence a été déclaré depuis le 13 novembre. Quelle en est la conséquence pour les détenteurs d'armes à feu en France ?

Les préfectures pourraient demander à l'ensemble des détenteurs réguliers d'armes de les remettre aux services de l'Etat pendant la durée de l'état d'urgence. Cette mesure est prévue dans la loi, et les pouvoirs publics ont préparé son application à la situation actuelle. Néanmoins cette mesure se heurte à des difficultés pratiques importantes (lieux de stockage, conditions de conservation, sécurisation...) et serait certainement très mal comprise par les citoyens concernés, qui respectent le droit et se plient déjà à l'ensemble des contraintes administratives imposées par la réglementation. De plus, désarmer les citoyens au moment où ils sont la cible de terroristes sanguinaires serait assez mal venu...

Quelle incidence les attentats que Paris a connus peuvent-ils avoir sur la législation des armes  à feu ? Sera-t-il encore plus difficile de se procurer une arme en France ? Où en sommes-nous par rapport à nos pays voisins ?

Les pouvoirs publics pourraient imaginer de restreindre encore la réglementation des armes, mais cela n'aurait pas grand sens. Les terroristes n'achètent pas leurs kalachnikov chez l'armurier. En revanche il serait légitime de prévoir des sanctions pénales extrêmement sévères contre les trafiquants d'arme de guerre. De vraies sanctions. On sait que les armes issues du trafic tuent. Il est logique de frapper ceux qui font commerce de ces armes et vivent du sang des innocents. Les peines encourues aujourd'hui ne sont pas suffisamment dissuasives.

Enfin quel est le risque pour une personne détenant une arme à feu chez elle sans autorisation ? Le nombre d'arrestations est elle fréquente ?

Les peines prononcées en fait sont assez légères. Lorsqu'il s'agit de tireurs sportifs ou de collectionneurs qui n'ont pas respecté les règles mais s'avèrent par ailleurs des citoyens responsables, ils se voient souvent infliger une peine d'amende. Lorsqu'il s'agit d'armes détenues par des délinquants, des peines de prison sont prononcées, mais rarement appliquées. Le nombre d'arrestation dépend des situations. Souvent des détenteurs d'armes sont dénoncés dans un autre cadre (un divorce par exemple). Quand il s'agit de délinquants, c'est au hasard d'une perquisition qu'on découvre des armes. A cet égard l'état d'urgence actuel a été très efficace puisque ce sont des dizaines d'armes qui ont été découvertes et saisies à ce jour. On ne peut que s'en réjouir !

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