"Hollande et la renégociation d'un traité européen après 2012 ? Une posture de campagne contre-productive"<!-- --> | Atlantico.fr
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"Hollande et la renégociation 
d'un traité européen après 2012 ? 
Une posture de campagne 
contre-productive"
©

François Cameron

François Hollande a déclaré ce lundi sur RTL vouloir « renégocier le traité de la zone euro » s’il était élu en 2012. Un discours de campagne qui pourrait mal passer au près du secteur financier et se retourner au final contre son auteur.

Dominique Reynié

Dominique Reynié

Dominique Reynié est professeur des Universités en science politique à l’Institut d’études politiques de Paris et directeur général de la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol).

Il est l'auteur de nombreux ouvrages dont Populismes : la pente fatale (Plon, 2011).

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Atlantico : François Hollande a déclaré ce lundi sur RTL vouloir « renégocier le traité de la zone euro » s’il était élu en 2012. Cela vous parait-il possible ?

Dominique Reynié : Non ce n’est pas possible. Je crois que c’est une posture de campagne qui ne le sert pas. Ce ne sera pas possible car ce sont des négociations compliquées sur des sujets dont la fragilité est extrême. Il s’agit de faire signe aux Européens dans leur ensemble, d’obtenir l’accord des gouvernements concernés et en même temps de rassurer tous les acteurs du système, qu’il s’agisse de la Banque centrale européenne, de la Commission ou des marchés financiers. Arriver à un tel compromis, c’est comparable aux travaux d’Hercule.

Le traité repose sur un pré-accord de 26 Etats sur 27 lLe Royaume-Uni ne participera pas au nouveau pacte budgétaire). En disant cela, François Hollande se retrouve en quelques sortes dans la position de David Cameron.

Un François Hollande nouvellement élu, avec une plus grande légitimité qu’une Angela Merkel en fin de course, pourrait-il inverser la tendance à la table des négociations ?

Je pense que c’est tout à fait marginal. Il s’agit encore une fois de 26 Etats qui se sont mis d’accord au cours de longues discussions, qui n’ont d’ailleurs pas démarrées hier. Je crois que l’on peut avoir une certaine énergie quand on arrive au pouvoir mais aucune majorité n’aura assez de force pour inverser ce que 26 pays ont voulu faire ensemble. Renégocier le traité serait un contre-pied total, François Hollande se briserait le front sur un mur.

François Hollande ne projette pas l’image d’un homme qui sait négocier avec autorité. Les Français ont retenu la négociation avec les écologistes. C’était une négociation franco-française avec un parti minuscule, rien à voir avec les échanges qui pourraient l’attendre avec 26 autres Etats souverains.

Ce serait donc uniquement une posture électorale ?

Oui je le pense. C’est d’autant plus curieux que je crois que cela complique son chemin vers l’Elysée. Les observateurs qui s’interrogent sur ce que pourra être la France en 2012 vont regarder François Hollande comme quelqu’un qui émet des signaux contradictoires.

Ce n’est pas encourageant pour les marchés financiers et les agences de notation. Il avait jusqu’à lors un discours raisonnable, il est maintenant en train de desservir sa propre candidature. Le discours sur le nucléaire, le discours sur la dépense publique (augmentation des postes de fonctionnaires), les emplois jeunes, et maintenant le discours sur l’Europe. Voilà quatre thèmes dont on peut dire avec assurance qu’ils ne donneront lieu à aucune action dans le sens que souhaite François Hollande, ou alors ce serait de l’atrophie. Tout cela rend sa candidature moins crédible. Il ne pourra simplement pas faire tout ce qu’il dit.

Soit on pense qu’il est capable de tenter cela, mais qu’il échouera, et c’est anxiogène. Soit on pense qu’il n’est pas question pour lui de tenter quoi que ce soit, et l’on va se demander au fond ce que valent ses engagements.

L’UMP qualifie l’intention de François Hollande de « folle et aventureuse ». Qu’en pensez-vous ?

Je dirais plutôt périlleuse. François Hollande n’est pas vraiment connu par les observateurs, il n’a pas de passé gouvernemental. Personne n’imagine qu’il pourra tendre dans un autre sens un accord européen. Dans un univers très fragile qui n’a plus rien à voir avec les élections précédentes, il peut couter très cher de vouloir, ne serait-ce que dans un moment ostentatoire, tenter quelque chose de la sorte. Cela pourrait déstabiliser nos relations avec  les marchés, nos partenaires européens et les grandes institutions comme la Banque centrale et le FMI.

Je ne comprends pas pourquoi François Hollande se complique la vie. Il avait jusque-là la réputation d’être quelqu’un de particulièrement européen. Il abime cette image et prend des risques avec les électeurs du centre, qui sont très européens. Il se replace à gauche en quelques sortes. Il favorise le « Montebourg-isme » au centrisme, ou environ 3% contre 20%, c’est une vraie erreur de calcul.


Propos recueillis par Jean-Benoît Raynaud

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