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La France catholique d'aujourd'hui : des pratiquants plus citadins qu'autrefois
©Reuters

Bonnes feuilles

La France compte environ 47 millions de baptisés catholiques, dont 10 millions de pratiquants occasionnels et 3 millions de pratiquants réguliers. Avec des chiffres pareils, il est impossible de faire croire que les catholiques sont invisibles en France. Tel est donc l’objet de ce livre : donner un visage au catholicisme français du XXIe siècle. Extrait de "La France catholique", de Jean Sévillia, publié aux éditions Michel Lafon (1/2).

Jean  Sévillia

Jean Sévillia

Jean Sévillia est rédacteur en chef adjoint au Figaro Magazine et membre du conseil scientifique du Figaro Histoire. Essayiste et historien, il a publié de nombreux succès de librairie, notamment Zita impératrice courage (Perrin, 1997), Le terrorisme intellectuel (Perrin, 2000), Historiquement correct (Perrin, 2003), Le Dernier empereur, Charles d’Autriche (Perrin, 2009).

 

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Du point de vue de la pyramide des âges, le déséquilibre est frappant : les moins de 25 ans, qui constituent 30 % de la population française, ne représentent que 16 % des catholiques, tandis que les personnes de 50 ans et plus, qui forment 42 % de la population, représentent 65 % des catholiques. Le déséquilibre existe aussi du point de vue des sexes : alors que les femmes forment un peu plus de la moitié de la population, elles représentent 61 % des catholiques pratiquants 13.

Du point de vue de la géographie, les catholiques déclarés sont nombreux dans l’Ouest intérieur et en Bretagne, au Pays basque et au Béarn, dans le sud du Massif central (Aveyron, Lozère, Ardèche, Haute-Loire, Cantal), dans les zones rurales du Nord-Pas-de-Calais et dans le bloc de l’Est qui s’étend de la Haute-Marne à l’Alsace et de la Meuse au Jura. Ailleurs, dans le grand espace central de la France et le long des grands axes de communication qui relient la capitale à Lille, Bordeaux, Toulouse ou Marseille, le mouvement de déchristianisation amorcé dans les années 1960 s’est accentué. Proportionnellement, ce sont plutôt les campagnes qui se déchristianisent, tandis que les grandes villes maintiennent un tissu social actif : la majorité des pratiquants, aujourd’hui, est formée de citadins 14.

>>>>>>>>>>>>> A lire également : "Twittomélies" : comment la France catholique d'aujourd'hui s'adapte au Web et aux réseaux sociaux

Quant à l’origine sociale de ceux qui franchissent régulièrement la porte des églises, le contraste est net, et l’exemple de la capitale est à cet égard parlant. À Paris, le taux de pratiquants est d’autant plus fort que l’arrondissement est bourgeois (XVIe et VIIIe en tête), et à l’inverse d’autant plus faible que l’arrondissement est populaire ou bobo (IVe, Xe, XIe, XIXe et XXe). Dans la petite ou la grande couronne, les catholiques pratiquants s’avèrent nombreux dans l’Ouest parisien, entre Neuilly, Saint-Cloud et Versailles, et dans les villes résidentielles comme Sceaux, Fontainebleau ou Chantilly. « D’une répartition provinciale, la géographie du catholicisme a donc évolué vers une répartition sociale 15 », observent Jérôme Fourquet et Hervé Le Bras. Le catholicisme populaire d’autrefois n’a pas disparu, surtout dans la ceinture parisienne ou en province, mais il devient minoritaire. Le phénomène ne laisse pas l’église indifférente : depuis 2010, les évêques des huit diocèses d’Île-de-France organisent régulièrement des enquêtes et des colloques sur « l’évangélisation en milieu populaire ».

Du point de vue politique, les décennies récentes ont marqué une franche évolution à droite de l’électorat catholique, surtout chez les pratiquants. Au premier tour de l’élection présidentielle de 2012, ceux-ci ont voté à 47 % pour Nicolas Sarkozy, à 17 % pour François Bayrou, à 15 % pour Marine Le Pen et à 14 % pour François Hollande. Au second tour de 2012, les sondages attribuaient entre 66 % et 79 % des suffrages des pratiquants réguliers à Nicolas Sarkozy 16.

Ces chiffres et ces courbes ayant été enregistrés, il reste une donnée brute. La France compte 44 millions de baptisés, soit deux personnes sur trois : qu’on le veuille ou non, cette proportion représente une grosse majorité de la population. En 2045, selon les projections, le pays comptera entre 37 millions de baptisés (hypothèse haute) et 33 millions (hypothèse basse) 17. Moins de la moitié de la population sera baptisée, mais le nombre de catholiques, y compris dans l’hypothèse pessimiste, représentera encore une masse considérable. Même aujourd’hui, en additionnant le nombre de pratiquants réguliers (environ trois millions de personnes) et celui des pratiquants épisodiques (une dizaine de millions), on arrive à 13 millions de catholiques qui savent pourquoi ils entrent dans une église : ce chiffre n’est pas de ceux que l’on tient pour quantité négligeable. Minoritaires, les catholiques français du xxie siècle ? Oui. Mais l’objet de cet ouvrage n’est pas d’analyser pourquoi le catholicisme, en France, est passé du statut majoritaire au statut minoritaire, mais de comprendre, par le texte et par l’image, quelle place occupe cette minorité dans la société française. Et partant, de s’interroger pour savoir si ce noyau catholique possède non seulement la capacité de se maintenir, mais de recommencer à grandir.

1)Yann Raison du Cleuziou, Qui sont les cathos d’aujourd’hui ? Sociologie d’un monde divisé, Desclée de Brouwer, 2014.

2) Jérôme Fourquet et Hervé Le Bras, op.cit.

  1. 3)Jérôme Fourquet et Hervé Le Bras, op.cit.
  2. 4)Yann Raison du Cleuziou, op. cit.
  3. 5)Sondage Paradox’Opinion/La Vie, 2 avril 2015.
  4. Extrait de "La France catholique", de Jean Sévillia, publié aux éditions Michel Lafon, 2015. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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