Report de la réforme de la dotation globale aux collectivités : le recul du gouvernement qui maintient le véritable problème français du nombre de fonctionnaires locaux<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Le Premier ministre a annoncé le report de la réforme de la dotation globale de fonctionnement.
Le Premier ministre a annoncé le report de la réforme de la dotation globale de fonctionnement.
©

Clientélisme local

En annonçant le report de la réforme de la dotation globale de fonctionnement, source essentielle de revenus des collectivités locales, le gouvernement maintient le statu quo sur une situation pourtant largement décriée, propice au clientélisme.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

Voir la bio »

Alors que la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) devait entrer en vigueur au 1er janvier 2016, le Premier Ministre Manuel Valls vient d’en annoncer le report, sous la pression d’associations d’élus locaux. Désormais, la mise en application n’est attendue que pour l’année 2017. Avec un montant de 36.6 milliards d’euros pour l’année 2015, la DGF constitue la plus importante contribution de l’Etat aux collectivités locales, et représente à elle seule plus de 15% de leur budget. (Alors que la fiscalité locale en est la principale ressource, avec 125.6 milliards d’euros collectés en 2013, soit 55% du total). 

L’objectif de la réforme était clair ; passer d’un régime d’attribution considéré comme opaque, à une rationalisation de celui-ci, en fonction notamment de critères objectifs comme le nombre d’habitants ou la surface des communes concernées. En creux, il s’agit surtout d’éviter les abus et d’établir une distribution plus égalitaire des fonds alloués dans le cadre d’une réduction de l’enveloppe globale, puisque la DGF est attendue à 32.93 milliards en 2016, soit une baisse de  10% par rapport à l’année 2015.

Car en effet, les collectivités territoriales ont pu être pointées du doigt à de nombreuses reprises, notamment par la Cour des Comptes, en ce qui concerne leur poste de dépenses principal ; les fonctionnaires territoriaux. Ainsi, avec un total de 56.6 milliards d’euros, les frais de rémunération des personnels représentent plus de 24% du total des dépenses des collectivités territoriales. Et contrairement à la fonction publique d’Etat, la hausse des effectifs est une constante depuis plusieurs décennies.

En effet, alors que les effectifs de la  fonction publique d’Etat stagnent depuis le milieu des années 80, les personnels affectés à la fonction publique territoriale ont explosé de près de 70% depuis 1986. (De la même façon, la fonction publique hospitalière progresse de 50%.)

Progression des effectifs de la fonction publique depuis 1986. En %. France

La justification de ce phénomène découle de la décentralisation progressive des missions de l’Etat vers un échelon local. Ceci faisant suite aux lois de décentralisation initiées par François Mitterrand au cours des années 80, et poursuivies au cours des décennies suivantes.

Pourtant, cette thèse souffre de deux difficultés. D’une part, les effectifs de la fonction publique d’Etat n’ont pas diminué dans les mêmes proportions que la progression de la fonction publique territoriale, ce qui révèle une incapacité de la réduction des effectifs au prorata des missions. Et d’autre part, les effectifs de la fonction publique territoriale n’ont pas réellement progressé au rythme de l’attribution de leurs nouvelles compétences. Ainsi, comme peut l’indiquer un rapport publié en 2009 par la Cour des Comptes relatif à la fonction publique "Les effectifs de l’Etat 1980-2008" :

"Au total, il est paradoxal de constater que les plus fortes augmentations d’effectifs se sont produites dans les catégories de collectivités - communes et leurs groupements - qui n’ont guère été concernées par des transferts significatifs de compétences.". Si la hausse des effectifs territoriaux est donc majoritairement "naturelle", une partie résiduelle semble bien être abusive.

Une situation abusive qui est à rapprocher de l’alerte lancée en 2014 par le service central de prévention de la corruption, au titre de l’année 2011 :

"Près des deux tiers des 36 497 recrutements externes effectués en 2011 par les collectivités locales et les EPCI (établissements publics de coopération intercommunale) ont été effectués sans concours (agents contractuels et agents de catégorie C). Le recrutement des agents de catégorie C est discrétionnaire, avec un risque élevé de clientélisme. Le recrutement des contractuels, quant à lui, s’effectue souvent dans des conditions de transparence sous-optimales (publicité des vacances de poste éludée ou réduite au strict minimum, motivation du recrutement faiblement développée). Dans un contexte de crise sur le marché de l’emploi, ces recrutements sont susceptibles de donner lieu à contrepartie matérielle (services) ou morale (engagement politique)."

Ainsi, en repoussant une telle réforme de la DGF, le gouvernement semble aussi vouloir préserver certaines susceptibilités locales.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !