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Fawzia Zouari, tunisienne et musulmane : que la chanteuse Diam's choisisse de porter le voile est une régression impardonnable
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Bonnes feuilles

Tunisienne, musulmane, Fawzia Zouari s’adresse avec vigueur et respect à la chanteuse Diam’s, qui incarnait une certaine modernité avant de s’ exposer de nouveau au public, mais sous le voile. L’auteur s’engage avec passion en faveur d’un islam des Lumières, intégré dans le pays de la laïcité dont elle défend les valeurs. Extrait de "Je ne suis pas Diam's", publié chez Stock (2/2).

Fawzia  Zouari

Fawzia Zouari

Fawzia Zouari vit à Paris. Essayiste et romancière, elle est aujourd’hui journaliste à Jeune Afrique et pour France 2.

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C’est dire si ces siècles de tyrannie contre les femmes dont j’avais hérité et dont j’aurais pu être victime moi aussi ont fondé ma personnalité et façonné mon avenir. Quand on a été élevée comme moi par une mère dont nul n’a jamais pu apercevoir la nuque, la gorge, la courbure de la jambe, ni le moindre cheveu, quand on a eu des soeurs comme les miennes cloîtrées, au nom d’une loi interdisant leur corps, l’on peut comprendre ma réaction vis-à-vis du voile, dans sa pratique subie et imposée, encore plus dans son choix revendiqué.

>>>>>>>>>>> Islam à la carte : tout ce que la chanteuse Diam’s ne pourrait plus faire si elle voulait vraiment être musulmane

Je pardonne à ma mère qui n’a jamais été à l’école et à qui personne n’a expliqué l’injustice dans laquelle la confinait une tradition où elle voulait nous confiner nous aussi. Mais je ne peux excuser un tel comportement chez quiconque est instruit et éveillé aux problématiques du siècle. Je ne peux défendre un signe qui, dans nos sociétés, a toujours relégué les femmes derrière les murs. Je ne peux pas. Je ne peux admettre qu’on se voile volontairement en faisant comme si on n’était pas ainsi condamnée aux seconds rôles. Je ne peux admettre que l’on choisisse d’être sujette. De même que je reste circonspecte devant celles et ceux qui honorent Dieu de mesurer notre foi à la longueur de nos robes et au nombre de mèches échappées de nos fichus. Compteraient-elles davantage, ces robes et ces chevelures, que l’amour que nous Lui portons dans nos coeurs ! Le voile serait-il le seul moyen d’assurer notre salut à Ses yeux – sans quoi nous ne vaudrions rien ?

Toutes ces questions, je me les posais déjà quand j’étais enfant. Et voilà que je les repose à mon corps défendant un demi-siècle plus tard. Je les repose à une jeune femme qui croit faire bien alors qu’elle me fait mal. Qui vit dans un pays où mes soeurs auraient tant apprécié de vivre et bénéficier des mêmes droits, à commencer par l’école. Une jeune femme qui me force à me demander : pourquoi ai-je fait le voyage de France, si Diam’s a le pouvoir d’y ressusciter le spectre de mes peurs anciennes ?

Extrait de "Je ne suis pas Diam's", de Fawzia Zouari, publié chez Stock, 2015. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

>>>> Lire aussi l'entretien avec l'auteur : Nous pouvons en France montrer à l'islam sa capacité à répondre aux défis de la modernité, à marcher à l'heure du monde, à s'intégrer et à devenir universel

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