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Ferrari triomphe en bourse, pourquoi à New York et pourquoi si cher ?
©Flickr / elgringospain

L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Ferrari fait une arrivée spectaculaire à la bourse de New York. Pour les collectionneurs, c’est un exploit. Pour les économistes, c’est un mystère qui est lourd de sens.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Que la marque italienne vende aujourd’hui les voitures qui sont globalement les plus chères du monde, tout le monde le sait. Que l’entreprise, filiale de Fiat, soit très performante, on le sait également. Mais que les boursiers la portent au pinacle parait incompréhensible. Les excès de la bulle technologique auraient déteint sur le secteur du luxe ? C’est un peu comme si, on avait coté au Nasdaq, Jeff Koons ou Picasso au siècle dernier.

L’arrivée de Ferrari à la bourse pose deux questions très politiquement incorrectes mais importantes. Pourquoi si chère et pourquoi la bourse de New-York ?

Le constructeur italien a réussi à vendre plus de 15% de son capital, le premier jour de cotation à New-York au prix de 60 dollars l’action soit 8 dollars de plus que le haut de la fourchette du prix d’introduction qui avait été fixé par les banquiers et les avocats. Fiat avait envisagé de mettre sur le marché 9% du capital. Devant l’afflux des demandes, ils ont donc laissé le prix monter et ils ont quasiment doublé le volume des titres à la vente. Fiat et la famille Agnelli ont donc ramassé plus d’un milliard de dollars en quelques heures.

Pour l’instant, l’introduction en bourse de Ferrari est un énorme succès. C’est d’ailleurs la première fois qu'un produit de luxe atteint ainsi les prix d’une œuvre d’art. Pour les collectionneurs de la marque rouge, Ferrari est certes une œuvre d’art, mais c’est aussi la marque d’un produit industriel  devenu mythique. 

Pour mesurer le caractère surréaliste du prix, il faut simplement savoir que Ferrari produit et vend 5000 véhicules par an dans le monde. La société est ainsi valorisée 12 milliards de dollars, soit le même prix environ que le français PSA Peugeot- Citroën et DS. Ce dernier écoule 3.000.000 de véhicules par an. Le différentiel est hallucinant.

Ferrari pèse plus lourd dans le PIB italien que PSA Peugeot-Citroën dans le PIB français. Ferrari atteint ainsi les même capitalisations boursières que les vedettes de l’internet avec cette différence, c’est que Ferrari délivre des résultats tangibles et réels : pratiquement 20% de marge.

En bref, c’est le modèle du produit industriel qui propose autre chose qu’une voiture automobile. Ferrari vend du rêve, du standing, mais aussi de la technologie et de la recherche. Économiquement, il fonctionne comme une œuvre d’art.

De ce point de vue-là , c’est plus important et plus solide qu'une marque de luxe qui vend au prix du caviar des accessoires de mode an toile cirée mais griffée aux initiales de son fondateur. Le succès de Ferrari raconte la recette de la production de valeur comme aucun autre produit au monde.

Un marché de niche, certes, mais mondial. Un produit utile mais qui porte du rêve et de l’ambition, de l’esthétique et du statut social, de la technologie hyper sophistiquée vendable ailleurs.

La grande leçon de tout cela, c’est que la marque est devenue tellement forte et dense qu’elle peut porter d’autres produits pourvu qu’ils répondent à un cahier des charges cohérent avec le produit principal : des accessoires de modes, des produits à haute technologie, des vêtements... Les vrais clients de Ferrari ne font pas que rouler en Ferrari, ils vivent dans un environnement Ferrari.

Il y a très peu de marques qui ont réussi cet exploit. Apple, peut-être ? Mais surtout beaucoup de marques françaises et italiennes spécialisées dans le vrai luxe. Les Allemands avaient réussi à créer beaucoup de valeur en équilibrant une équation de grande qualité sur leurs voitures, mais par péché d’orgueil ou excès d’arrogance, quelques dirigeants allemands ont hypothéqué la valeur de leur marque. C’est dire la fragilité du modèle.  Toujours est-il que Ferrari délivre quelque part, un des secrets de la croissance que toutes les économies recherchent. 

Maintenant, pourquoi la marque Ferrari est-elle cotée à New-York alors que l’Amérique n’est pas son premier marché commercial ? Deux raisons. Tout d’abord, Ferrari est allé à New-york parce que c’est une marque mondiale et que New-York  abrite le plus gros marché de l’investissement mondial. L’Europe, malheureusement est désormais marginalisée. Il n’y a pas beaucoup de marques européennes mondialement connues et cotées à New-York.  Ferrari ne reviendra pas à Milan. La prochaine place financière qui lui déroulera le tapis rouge se sera Londres ou Francfort. Curieusement, ce déficit d’Europe n’inquiète personne.

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