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Et encore une baisse… La dernière mauvaise nouvelle en date sur le front de l’inflation signe-t-elle l’échec de la politique d’assouplissement quantitatif menée par la BCE ?
©Reuters

Copie à revoir ?

Alors que l’année 2014 avait été témoin d’une alerte à la déflation, le début de l’année 2015 semblait plus favorable à la hausse des prix, avant de retomber en territoire négatif en ce mois de septembre 2015. Ce qui met en doute l’efficacité de la politique menée par la Banque centrale européenne.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Ce 14 octobre, l’INSEE dévoilait les nouveaux chiffres de l’inflation concernant la France.  Pour ce mois de septembre 2015, l’indice des prix affiche une baisse de 0.1% (corrigé des variations saisonnières), tandis que sur la dernière année, les prix restent stables à 0%. Ainsi, après une légère progression dans le courant de l’année 2015, l’inflation se replie à nouveau en cette fin d’année, mettant ainsi en doute l’efficacité de la politique monétaire expansionniste de la Banque centrale européenne, dont l’objectif était pourtant bien de permettre un retour de l’évolution des prix vers un seuil proche, mais inférieur à 2% sur le moyen terme.

Mais une telle conclusion omet un fait important. Si la Banque centrale européenne surveille en priorité cet indice des prix (HICP), elle ne peut être tenue comptable de l’intégralité de sa composition. En effet, la mesure de l’inflation prend en compte, pour une part significative, l’évolution du prix de matières premières, qui dépendent avant tout du contexte mondial, et non du seul prisme européen. Ainsi, lorsque la sous-section "produits pétroliers" de l’indice des prix s’écroule de 14.3% sur la dernière année, principalement en raison d’un offre excessive des pays producteurs de pétrole, la BCE n’y peut tout simplement rien.

Voilà pourquoi l’indice des prix s’exprime également sous une autre version, appelée "Inflation sous-jacente" qui permet, selon l’INSEE, de mesurer plus sereinement les variations de prix "Il traduit l'évolution profonde des coûts de production et la confrontation de l'offre et de la demande". Étant donné que la politique monétaire de la BCE permet une expansion de cette même "demande", c’est donc l’observation de l’évolution de cet indice d’inflation sous-jacente qui permet de se faire une idée de l’efficacité de l’assouplissement quantitatif européen, lancé en janvier dernier.

Inflation sous-jacente. %. Annualisée. France. Données INSEE

Après un tassement sévère en fin d’année 2014, qui avait plongé la France dans une situation temporaire de déflation, l’indice d’inflation sous-jacente s’est redressé légèrement pour atteindre 0.6% en ce mois de septembre 2015. Soit une performance très, trop faible, mais tout de même en progression. Et qui permet tout de même d’affirmer que la pression du côté de la demande est réelle, et ce, en conséquence directe de la politique monétaire européenne.

Afin d’être plus juste, il reste utile de prendre en compte la situation de la zone euro dans son ensemble, puisque le terrain de jeu de la BCE ne se limite pas à la France. De la même façon, étant donné que la politique monétaire est avant tout une question de communication, il suffit de mesurer l’impact de l’assouplissement quantitatif, non pas lors de son annonce effective en janvier dernier, mais depuis le moment où il a été anticipé par les marchés financiers. Ce qui correspond à l’annonce de la "possibilité" de sa mise en place, dès le 3 avril 2014, au cours d’une conférence de presse du Président de la BCE ; Mario Draghi :

"Je pense que vous avez souligné à juste titre la phrase clé de cette déclaration : " Le Conseil des gouverneurs est unanime dans son engagement à utiliser également des instruments non conventionnels ..." - (…) donc, cette déclaration dit que tous les instruments qui relèvent du mandat, y compris l'assouplissement quantitatif, sont destinés à faire partie de cette déclaration. Au cours de la discussion que nous avons eu aujourd’hui, il y avait effectivement une discussion à propos du QE".

Or, depuis cette annonce du mois d’avril 2014, le PIB nominal de la zone euro n’a cessé de progresser. Or, le PIB nominal, c’est-à-dire la somme de la croissance et de l’inflation n’est rien d’autre que le synonyme de la "demande" au sens propre. Il s’agit de la variable qui est directement sous contrôle de l’autorité monétaire. Si cette hausse du PIB nominal n’est toujours suffisante pour délivrer un résultat satisfaisant, elle permet de retrouver un rythme plus décent, de 2.78% en termes annualisés, pour le second trimestre 2015. 

L’impact de la politique monétaire sur le taux de croissance européen n’est pas un sujet de doute. Afin de s’en convaincre, il peut être utile d’observer l’évolution annualisée de la croissance nominale de la zone euro, par trimestre, en y insérant les plus importantes décisions monétaires de ces dernières années. En avril 2011, Jean Claude Trichet relève les taux directeurs, ce qui provoquera un effondrement de la confiance des agents économiques ; ceux-ci sont déprimés par le manque de soutien évident de la part de l’autorité monétaire face à un contexte défavorable (au même moment, les États Unis prennent le chemin opposé en soutenant massivement leur niveau d’activité). En juillet 2012, peu de temps après son arrivée à la Présidence de l’institution, Mario Draghi indique qu’il fera tout "whatever it takes" pour sauver l’euro, ce qui provoque un regain de confiance et d’espoir dans l’institution. Puis, en avril 2014, un plan de soutien est évoqué par la BCE, qui permet de soutenir directement le niveau d’activité. 

Croissance du PIB nominal de la zone euro. 2010-2015. Source BCE

La croissance européenne est toujours insuffisante pour permettre une réelle sortie de crise.  Mais il ne s’agit pas là de la traduction d’une supposée inefficacité de la politique monétaire. Ce qui est en cause, c’est simplement une trop grande timidité des autorités dans l’utilisation de cet outil.

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