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S’il vous plaît, Monsieur le Président, pour la France, prenez tous les risques sans penser
à votre réélection !
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Supplique

Dire la vérité, restaurer la compétitivité française, remodeler l'Europe politique : pour respecter les engagements pris à Toulon, Nicolas Sarkozy doit prendre le risque de l'impopularité.

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon est présidente du Mouvement ETHIC (Entreprises de taille Humaine Indépendantes et de Croissance) et chef d’entreprise (SDME).

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La difficulté aujourd'hui pour un président sortant est de proposer des solutions nouvelles ou en tous cas des solutions qu'il n'a pas déjà mises en œuvre. La critique est facile : il faut retrouver une compétitivité, se réformer, ne plus vivre à guichet ouvert, etc. Trop facile de dire "mais alors, pourquoi ne l'a-t-il pas fait avant ?"

Personne pourtant ne peut sous-estimer la crise mondiale qui nous assomme et qui change la donne. Nicolas Sarkozy à Toulon s'est bien sorti d'une équation impossible : prouver qu'il maîtrise la situation tout en reconnaissant qu'il n'a pas le pouvoir de ses incantations, pas le pouvoir de réformer la finance mondiale, de changer le système bancaire, de créer des emplois en pleine récession... et pourtant garder l'énergie et le courage de ses convictions.

Et finalement ces seules incantations sont déjà une façon de faire avancer le monde, de dire la vérité face aux opinions publiques, de faire prendre conscience de la nécessité d'une Europe autre, puissante, consensuelle. Car il doit convaincre les Français certes, mais ce qui est nouveau c'est que ce discours doit dépasser nos frontières puisqu'il faut donner des signes de rigueur et de bonnes intentions à ceux qui conditionnent notre triple A, à l' Allemagne qui fait un légitime chantage à la mise en circulation de liquidités nouvelles, à nos partenaires, etc... 

Du courage, il en faut tellement pour donner des coups de pieds dans les fourmilières françaises résistantes au changement, imbriquées les unes dans les autres, puissantes et menaçantes, les niches de béton dans lesquelles sont tapis des chiens aux aguets. La France est un mikado qui s'écroule à chaque fois que l'on tente de soulever un stick.

Alors le courage c'était bien d'avouer qu'il faut faire plus et mieux et tout de suite. Le magistère de la parole est plus que jamais le nécessaire préalable au changement et à l'action. Lui reprocher de trop promettre ? Mais où sont les promesses? Contrairement à ce que l'on voudrait faire croire, ce ne sont pas des promesses de campagne électorale, ce sont les seules promesses que l'on puisse souhaiter, celle de s'en sortir ! Fini le temps béni du guépard qui expliquait qu'il fallait que "tout change pour que rien ne change"; cette fois il faut que tout change jusqu'aux rêves les plus moelleux d'une infinie protection sociale et sociétale qui structurent les paradigmes fondamentaux français.

La bonne nouvelle c'est que le président veut restaurer la compétitivité française en faisant appel cette fois, aux chefs d'entreprises et à leurs partenaires, il n'y a plus de doute possible : ce sont eux et eux seuls qui créent richesse et emplois. Il l'avoue -enfin a-t-on envie de dire !-. Un autre paradoxe c'est que le retour annoncé d'un État stratège et créateur de l'environnement économique du possible, consultera (enfin) ceux que cela concerne dès janvier.

D'aucuns reprocheront au chef de l’État de revenir sur les mêmes valeurs que celles de ses discours précédents : travailler plus, plus longtemps, la responsabilité de chacun etc... Mais encore heureux qu'il ne change pas de discours ! Et encore moins de valeurs, celles qui l'ont fait élire et dont chacun sait au fond de lui même qu'elles sont incontournables.

Courageux, car il a pris des risques dans un pays encore gaullien et frileux de ses prérogatives, il n'a pas hésité à aborder la nécessité que tout le monde reconnaît sans l'avouer, de l'urgence d'une Europe politique qui nous ôterait certainement des lambris de pouvoir et d'autonomie.

Un discours en tous les cas d'une grande lucidité sans céder à la démagogie. Le moment est grave, le président le croit et le dit "en toute transparence", et on peut toujours aussi lui reprocher d'en jouer en se vendant comme le meilleur chef de guerre. Peu importe, il faut un chef de guerre et pour l'instant c'est lui... Qu'on nous en propose un autre et qu'il se montre?

Alors il lui reste 6 mois et on a envie de lui dire de tracer, d'aller au bout de ses convictions, de virer ceux qui pensent à leur carrière politique au lieu d'aller au feu, tolérance zéro pour les mauvais, ceux qui freinent en pensant gagner grâce au statu quo, ceux qui racolent à coup d'annonces et de reculades. Qu'il prenne tous les risques, qu'il oublie les stratégies électoralistes, qu'il enchaîne les réformes inéluctables aussi impopulaires soient elles; qu'il oublie les élections en se disant qu'il vaut mieux rester dans l'histoire comme l'homme qui a fait ce qu'il fallait faire, au mépris de sa ré-élection, plutôt que comme celui qui a perdu même s'il a temporisé et tergiversé en enfonçant encore un peu plus la France. La défaite si elle devait avoir lieu aurait un parfum de gloire.

Son discours m'a convaincue, il lui faut maintenant ressembler à ce discours. Et paradoxalement, c'est peut-être le courage de l'impopularité qui le fera gagner en 2012?

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