Binge drinking : l'inquiétude monte<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Binge drinking : l'inquiétude monte
©

Un verre ça va. 50 bonjour les dégâts

Selon un sondage Opinion Way, huit parents sur dix s'inquiètent de la consommation de plus en plus précoce et excessive de leurs adolescents. Le binge drinking, ou l'alcoolisation rapide à outrance, est devenu un phénomène en vogue dans les fêtes d'adolescents.

Georges Picherot

Georges Picherot

Georges Picherot est pédiatre et chef de service de Pédiatrie (Unité de Médecine de l’Adolescent) retraité.

Voir la bio »

Le "binge drinking" s’est développé chez les adolescents à partir des années 2000. Les pays nord européens et anglo-saxons étaient plus habitués à ce mode de consommation avant la France. La traduction de ce "nouveau danger" n’est pas simple. "Biture express" semble le terme le plus approprié.

L’analyse épidémiologique n’est pas précise, nous estimons actuellement qu’entre 2000 et 2010, le nombre d’adolescents hospitalisés pour une ivresse aiguë a été multiplié par trois, avec des disparités régionales, les régions de l’ouest et du nord de la France semble plus concernées. 

La consommation globale d’alcool par les adolescents n’a pas augmenté, en revanche le nombre d’ivresses avec un comportement de binge drinking s'est nettement accru. Nous restons en France, incontestablement au-dessous des autres pays européens avec le 20e rang pour les ivresses dans le mois précédent pour les adolescents de 16 ans (Source ESPAD 2007).

Ceci n’est pas complètement rassurant. Trois observations sont inquiétantes :

  • Le rajeunissement des âges du binge drinking (de nombreux jeunes de moins de 15 ans)
  • La progression de ce comportement chez les filles.
  • Enfin, les taux d’alcoolémie constatés sont très élevés.

Les modalités de consommation des adolescents ont profondément changé. Le binge drinking des adolescents est obtenu par des consommations d’alcools forts : vodka , whisky purs ou mélangés à des boissons sucrées. Ils sont souvent consommés à la bouteille le plus rapidement possible. Les bières sont moins consommées par les adolescents jeunes, le vin presque jamais.

Ces "événements" ne se déroulent  pas en famille. Les ivresses aiguës des jeunes adolescents se font en petit groupes de pairs dans la journée, en dehors des lieux de consommation habituelle. Les plus grands adolescents s’alcoolisent en groupe plus important parfois au cours de fêtes organisées, mal préparées ou conseillées. On remarque également beaucoup de surconsommations par des jeunes adolescents mélangés sans prévention avec des "plus âgés".

Lorsque nous interrogeons les adolescents, on s'aperçoit que l’initiation à l’alcool se fait en revanche en famille. Le premier contact ou la première approche est familiale et relativement précoce, souvent avant l'âge de 12 ans. C’est la première drogue psycho-active rencontrée par les adolescents, avant le tabac et le cannabis. Les comportements de binge drinking sont dangereux chez l’adolescent (comme chez l’adulte !).

On connaît le rôle de l’alcool dans les accidents de tous types. Les adolescents ne sont pas épargnés même s’ils ne sont pas conducteurs. Ils peuvent éventuellement être passagers ou eux-mêmes piloter un vélo, vélomoteur ou prendre des risques importants de chute. Le coma entraîné par cette alcoolo-défonce peut avoir des conséquences dramatiques.

Les faits moins connus mais extrêmement préoccupants sont les agressions sexuelles et les violences subies et  réalisées au moment de ces "intoxications". Les agressions sexuelles subies par les filles alcoolisées sont nombreuses. L’alcoolisation entraîne des conduites de violence incontrôlée chez le garçon. Ceci est peu connu mais de plus en plus observé. Les conséquences à long terme de ces hyper-alcoolisations précoces sont aussi de plus en plus connues.

Le risque de dépendance alcoolique est lié à la précocité de l’usage de l’alcool. Le risque est multiplié par 8 pour les consommations de ce type avant 15 ans par rapport au même comportement débutant après 20 ans.

Des conséquences neurophysiologiques graves ont été aussi montrées lors de répétitions de binge drinking chez l’adolescent avec  des effets négatifs sur la mémoire et les apprentissages.

La prévention de ces comportements à risque est importante. Plusieurs axes sont mis en avant. Il faut savoir ce qu’ils cherchent dans ces ivresses expresses. La culpabilisation des adolescents est inutile et contre-productive. (L’adolescent reste  beaucoup moins consommateur d’alcool que les adultes !). En aucun cas la prévention ne peut reposer sur les alcooliers. Aucun adolescent victime d’ivresse ne met en avant la recherche d’un goût agréable de l’alcool…. !

Deux axes de prévention sont privilégiés : utiliser les adolescents comme les principaux acteurs de prévention et associer les familles en les sensibilisant aux risques. La prévention secondaire après une première ivresse est avant tout de ne pas banaliser cet événement souvent associé à un passage familial, scolaire ou personnel difficile chez l’adolescent

La prévention des alcoolisations des adolescents reste un sujet délicat. L’alcool est présent partout. L’interdiction de la vente aux adolescents est un progrès. La diminution globale de la consommation d’alcool chez les adultes pourrait avoir des effets positifs sur le comportement des adolescents.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !