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Libération, la voix de l'aveuglement par les bons sentiments
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Polémique Claude Guéant

Libération consacrait ce mardi sa Une à Claude Guéant, faisant de lui "la voix de Le Pen". Pour le quotidien, en voulant réduire l'immigration légale, le ministre de l'Intérieur marche sur les plates-bandes de Marine Le Pen. Mais qu'en est-il de la réalité des problèmes d'intégration en France ?

Dominique Jamet

Dominique Jamet

Dominique Jamet est journaliste et écrivain français.

Il a présidé la Bibliothèque de France et a publié plus d'une vingtaine de romans et d'essais.

Parmi eux : Un traître (Flammarion, 2008), Le Roi est mort, vive la République (Balland, 2009) et Jean-Jaurès, le rêve et l'action (Bayard, 2009)

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"Guéant : la voix de Le Pen"…Tel était le gros (très gros) titre de « Une » de Libération hier matin. Qu’avait donc dit le ministre de l’Intérieur qui justifiât la manchette à peine provocatrice et pas du tout excessive, du quotidien de M. de Rothschild ? Que le flux de l’immigration légale en France (incluant le regroupement familial, les réfugiés politiques, les étudiants étrangers et l’immigration de nature économique) s’était élevé l’an dernier à un peu plus de 200 000  personnes (très précisément  203 000) que ce nombre (auquel il faudrait, pour être exhaustif, ajouter celui des immigrés clandestins – environ 100 000) dépassait nos possibilités actuelles d’accueil, et que son intention était de le réduire dans l’avenir.

Certes, nul ne saurait ignorer que nous sommes, et depuis quelques mois déjà, entrés dans une campagne présidentielle qui, pour prématurée qu’elle soit, (conséquence prévisible de la stupide invention du quinquennat) n’en est pas moins active. Dans le cadre de cette campagne, M. Guéant, au premier chef, a pour mission de multiplier les signes destinés à maintenir ou à ramener dans le giron de la majorité actuelle les électeurs gagnés ou tentés par la droite populiste. L’animal politique, surtout en période électorale, est volontiers omnivore, pour ne pas dire cannibale. Nicolas Sarkozy rêve d’avaler le Front national, François Hollande –quel appétit ! - lorgne sur l’électorat de François Bayrou comme sur ceux de Jean-Luc Mélenchon et d’Eva Joly. Marine Le Pen qui, en passant, a ironiquement félicité Claude Guéant d’être sur la bonne voie, cherche à engranger les suffrages populaires autrefois acquis à la gauche.

Tout cela est de plus ou moins bonne guerre. Mais serait-ce trop demander aux têtes pensantes de Libération, plutôt que de tirer sur la vieille ficelle de la diabolisation et d’agiter l’archaïque épouvantail du fascisme-qui-ne-passera-pas, d’aller un peu plus au fond du problème. Leur condamnation du guéanto-lepénisme signifie-t-elle, comme elle le donnerait à croire, que l’évolution démographique de la France ne pose aucun problème d’aucune sorte, en termes d’intégration, de mélange des cultures,  des religions et des civilisations, de sécurité publique, d’équilibre de la société ? La France, dans l’état où elle est, dans la conjoncture mondiale, la France des trois millions de chômeurs, des huit millions de pauvres, des quatre millions de mal-logés, est-elle en mesure d’assurer l’accueil, l’emploi, le logement, l’éducation, l’assimilation de trois cent mille nouveaux arrivants chaque année ? Combien d’entre eux, si l’on n’y veille, seraient-ils condamnés à venir grossir les rangs de l’immense armée des marginaux et des révoltés ?

On voudrait ne pas douter de la pureté d’âme et de cœur, et moins encore de la générosité des belles âmes qui, à longueur de tribunes et de meetings, condamnent les idées naturellement « nauséabondes » de ceux qui se refusent à la démagogie. Mais on aimerait connaître leurs propres idées sur la question. Sont-ils si persuadés de la justesse de leur ouverture d’esprit, qu’ils préconisent l’ouverture totale des frontières, l’arrêt de tout contrôle et la non-exécution des lois ?

L’un des grands charmes de l’opposition, dont elle a tendance à abuser, c’est que l’on peut y dire n’importe quoi, sans que cela tire à conséquence. A qui gouverne le principe de réalité s’impose tôt ou tard. Si la gauche, en mai prochain, accédait au pouvoir, il serait assez farce de la voir reprendre la politique de M. Guéant avec les mots de M. Montebourg et les voix de M. Mélenchon.

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