Les vraies raisons pour lesquelles les fronts anti-austérité se disloquent<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Vincent Placé a quitté Europe Écologie-Les Verts pour fonder l'Union des démocrates et écologistes (UDE).
Jean-Vincent Placé a quitté Europe Écologie-Les Verts pour fonder l'Union des démocrates et écologistes (UDE).
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L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Jean-Luc Mélenchon, Cécile Duflot et d’autres tournent en rond face aux marchés. La violence de la crise et la dureté des politiques d’ajustement budgétaire avaient provoqué en Europe une montée des mouvements réclamant un arrêt des politiques d’austérité. Mais aujourd’hui, ces fronts anti-austérité se disloquent.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le week-end a encore été très compliqué pour les différents partis de gauche, d’extrême gauche et même pour l’extrême droite. Aucun de ces mouvements ne parvient à définir des plateformes qui leur permettraient d’aborder les élections régionales et présidentielles unies de façon à faire entendre leur voix autrement que dans les médias ou dans la rue.

Le Front de Gauche de Jean-Luc Mélenchon s’entend de moins en moins, avec ce qui reste du Parti Communiste. La Fête de l'Huma a été de ce point de vue un fiasco. Les mouvements écologistes ont littéralement explosés sous le poids des ambitions  personnelles, et l’absence de réponses cohérentes aux défis de l’écologie. Ils iront donc, en ordre dispersé, aux élections... et pas seulement aux élections. Le comble, c’est qu'ils sont complètement désunis, inopérants et même absents dans la préparation de la conférence climat organisée cette année par la France.

 Sous le prétexte de ne pas donner l’impression de cautionner la politique de François Hollande qui préside à l’organisation de cette manifestation mondiale, ils se replient dans la critique, la dérision et l’indifférence vaguement arrogante.

A l’extrême droite, on assiste un peu au même phénomène autour du désaccord avec Jean-Marie le Pen. Cette brouille de famille traduit aussi un désaccord idéologique au sein de la droite entre ceux qui promettent la rupture avec le système actuel et ceux, qui comme Marine le Pen, envisagent très sérieusement de participer à la gestion.

Cette implosion générale existe également dans les pays voisins. La Grèce en est une caricature avec la scission de Syriza et les revirements d’Alexis Tsipras. Les élections en Grèce nous diront peut-être la semaine prochaine qu'il est possible, dans une démocratie, d’être élu avec un programme complètement contraire à celui qui avait permis d’accéder au pouvoir la première fois. Alexis Tsipras avait conquis le pouvoir avec un scenario de rupture quasi-révolutionnaire. Il va sans doute le conserver un an plus tard, avec une attitude de compromis socio-démocrate. Le même mouvement existe en Espagne et en Italie.

Cette évolution est partout impactée par la contrainte économique et européenne, mais partout en Europe, ces Fronts de Gauche se brisent contre les principes de réalité.

Il y a deux vraies raisons à la dislocation des fronts de gauche populistes et protectionnistes qui ont tous, comme point commun de rassembler des militants contre l’austérité. La lutte contre l’austérité passe évidemment par la lutte contre l’Europe, contre l’euro et contre les ajustements budgétaires et pour une politique monétaire ultra généreuse. Donc, il s’agit bien de rompre avec l’ordre établi mais personne ne sait par quoi remplacer cet ordre.

Deux vraies raisons :

La première, c’est que la notion d’austérité n’est pas objectivement définie. Elle est relative surtout en occident. Qu’est-ce que l’austérité dans un pays comme la France où il y a certes plusieurs millions de pauvres, mais où pratiquement, personne ne meurt de faim ou de froid . Qu’est-ce que l’austérité dans un pays comme la France où il existe des amortisseurs sociaux très épais. Les retraites sont payées, les fonctionnaires aussi, les chômeurs sont indemnisés et les prestations sociales sont multiples et assez faciles à obtenir. Qu’est-ce que l’austérité en France dans un pays où la santé et l’éducation sont théoriquement gratuits et accessibles à tous. Qu'est-ce que l’austérité dans un pays où le pouvoir d’achat n’a pas augmenté depuis 5 ans, comparée à l’austérité en Espagne où les prix et les revenus ont baissé jusqu’à 35 % depuis 5 ans. Idem au Portugal et en Grèce.

L’ampleur des transferts sociaux, la solidarité financière et monétaire autour de l’euro ont fait qu’un pays comme la France a traversé la crise sans souffrances excessives, si on compare à la situation des peuples émergents ou, pire encore, des migrants qui viennent vers nous parce qu’ils estiment que pour eux c’est l’eldorado. Et c’est l’eldorado.

L’austérité en France, c’est pour 4 millions de Français, la perte de l’emploi et encore. C’est surtout pour ceux qui sont en fin de droits condamnés au RSA. A noter d’ailleurs que les fronts de gauche et autres mouvements contestataires écologistes, ne manifestent pas beaucoup d'imagination pour essayer de redynamiser la machine économique, pas plus qu’ils n’ont pas manifesté beaucoup de solidarité à l’égard des migrants.

En bref, l’austérité en France est une réalité violente pour une infime minorité. Pour une grande majorité, l’austérité n’est qu'un mot et une menace, donc une inquiétude. Les fronts extrémistes utilisent ces peurs et ces menaces pour essayer de s’attacher des électeurs. Ça ne marche pas.

La deuxième raison pour laquelle les frontistes de gauche ou de droite, les grincheux de la gauche, les écolos, ne capitalisent pas sur leur position anti-austérité, c’est qu'ils n’ont pas de politique alternative à la politique d’ajustement budgétaire et de compétitivité.

La politique économique qu’ils attaquent et qui est mise en œuvre dans la plupart des pays de la zone euro vise à rétablir les grands équilibres financiers par un effort de compétitivité. Un renforcement de l’offre produits et services pour accroitre la production, donc l’activité et l’emploi.

Ca ne marche pas aussi vite qu’on le voudrait, les efforts demandés sont parfois difficiles à supporter, mais les anti-austérité n’ont jamais proposé de plan B ou d’alternative.

Les seules alternatives développées reviennent à rompre avec la logique de l’euro, pour conduire des politiques économiques adaptées aux Etats membres. Bref, la seule alternative possible passerait par un repliement sur soi, à l'intérieur de ses frontières. Pour la majorité des opinions publiques ce type d’alternative ne parait pas crédible. Les Grecs n’ont jamais souhaité la sortie de l’euro. Leur erreur, c'est d’avoir pensé que l'on pouvait s’affranchir des contraintes de l’euro sans perdre les avantages de la monnaie unique.

La crise a évidemment mis en lumière les disfonctionnements de la gouvernance européenne, mais pas au point de remettre en cause l’union européenne. Au contraire, la crise a sans doute renforcé le sentiment européen et le besoin d’une Europe plus unie et plus solidaire. Soit tout le contraire de ce que prônent les mouvements extrémistes. 

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