Réforme du droit du travail : qui tirera le premier ?<!-- --> | Atlantico.fr
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"Pour organiser un véritable dialogue, il faudrait davantage de syndicats pour prendre la relève d’un Etat qui entend se dégager au profit des partenaires sociaux."
"Pour organiser un véritable dialogue, il faudrait davantage de syndicats pour prendre la relève d’un Etat qui entend se dégager au profit des partenaires sociaux."
©Reuters

Editorial

Robert Badinter a ouvert la voie il y a quelques mois. L’idée fondamentale qui devrait présider à la transformation du système consisterait à organiser ce qu’on appelle "l’inversion des normes". En clair, on s’orienterait vers une multiplication des accords au niveau des entreprises grâce au dialogue social, en dérogation à la loi trop générale, qui ne tient pas compte de la spécificité locale.

Michel Garibal

Michel Garibal

Michel Garibal , journaliste, a fait une grande partie de sa carrière à la radio, sur France Inter, et dans la presse écrite, aux Échos et au Figaro Magazine.

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L’un des plus célèbres tabous qui paralyse l’économie française sur la voie du progrès est en train de sauter. La remise en cause du droit du travail est engagée sur un large front qui dépasse les clivages politiques et l’opposition droite-gauche. Il y a quelques mois Robert Badinter a ouvert la voie, en créant une brèche dans laquelle se sont engouffrés tous ceux qui militaient en faveur du changement, sans oser l’exprimer publiquement dans la majorité actuelle où le dossier se trouvait solidement verrouillé. Mais le pouvoir a dû se rendre à l’évidence : la montée irrésistible du chômage, qui faisait peu à peu de la France une exception dans un monde européen où il était partout en recul, a modifié le comportement général de l’opinion, comme l’attestent les derniers sondages. Il y a désormais une demande massive en faveur de la réforme, toutes opinions  confondues, tandis que l’on note une certaine convergence entre les propositions faites par les organismes de réflexion proches du PS ou du patronat. La question n’est plus désormais de continuer à discuter sur l’opportunité d’opérer un changement, mais bien de commencer à l’organiser sans plus attendre. En clair, on va se préoccuper enfin des chômeurs parqués pour l’instant avec une allocation de Pôle emploi, en recréant un véritable marché du travail qui ne sera possible qu’en supprimant tous les obstacles en vigueur. Car, en quelques années, le monde a  changé. La révolution numérique impose souplesse et mobilité, face aux rigidités du système actuel avec son code du travail qui représente un record mondial avec ses deux mille cinq cent pages de réglementations paralysantes.

L’idée fondamentale qui devrait présider à la transformation du système consiste à organiser ce qu’on appelle "l’inversion des normes" : en clair, on s’orienterait vers une multiplication des accords au niveau des entreprises grâce au dialogue social, en dérogation à la loi trop  générale, qui ne tient pas compte de la spécificité locale. Une véritable fluidité du marché du travail pourrait ainsi se mettre en place, alors  que jusqu’ici, on se contente de promouvoir constamment de nouveaux droits, qui s’empilent les uns sur les autres, sans revenir sur ceux qui n’ont plus de raison d’être et en créant  une paralysie progressive, obstacle à la croissance.

Une fois énoncé, il reste à appliquer ce schéma général. Car il s’agit dans les faits d’opérer une véritable révolution. La transformation repose sur un dialogue social particulièrement difficile dans un pays habitué à la confrontation. S’il est plus facile d’arriver à des compromis dans les petites structures, dès qu’on atteint une certaine taille,  on  constate que les discussions s’organisent autour des grandes centrales où priment des considérations politiques. Par ailleurs, pour organiser un véritable dialogue, il faudrait davantage de syndicats pour prendre  la relève d’un Etat qui entend se dégager au profit des partenaires sociaux. Une situation qui ne peut se résoudre du jour au lendemain.

On mesure aussi les tensions qui vont se créer, car la réforme va mettre en question les corps intermédiaires qui profitent des blocages actuels pour refuser les changements dont ils vivent. Dans ce contexte, le gouvernement  sera sans cesse appelé à la rescousse et chacun a conscience que la réforme ne pourra se faire sans lui. A moins que dans le cynisme dont sait faire preuve François Hollande, il s’agisse seulement d’une manœuvre destinée à favoriser sa réélection en désarçonnant l’opposition par l’annonce de réformes qu’il n’est pas au fond  de lui-même prêt à réaliser. Avec le risque de décevoir une fois de plus les Français et d’encourir la sanction des urnes.

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