Jean-Marie Le Pen je vais vous regretter !<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Jean-Marie Le Pen a été exclu par le bureau exécutif du Front national.
Jean-Marie Le Pen a été exclu par le bureau exécutif du Front national.
©Reuters

Adieu

La voix du fondateur du FN, exclu de son parti, risque désormais d'être inaudible. Pour certaines raisons, c'est dommage…

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

Voir la bio »

Un être nous manque et tout est dépeuplé. Vous allez donc me manquer, Monsieur le président (ce titre vous est acquis pour toujours). Vous étiez le dernier à pouvoir nous rappeler ce que fut l'Histoire contemporaine de la France. Vous avez connu et détesté la IVème République. Et vous avez rêvé de l'Etat français du maréchal Pétain, dont votre maître à penser, l'avocat Tixier-Vignancour, vous parlait avec émotion et tendresse.

Avec vous, avec le silence qui sera désormais votre lot, ce sont nos deux guerres perdues qui s’enfouissent dans le cercueil de l’obscurité. Vous avez fait, tout jeune, la guerre d’Indochine. Puis, à peine plus âgé, vous avez enchaîné sur la guerre d’Algérie. Pour la première vous avez haï la IVème République et surtout le président du Conseil de l’époque qui signa notre défaite, le Juif (c’est vous qui parliez ainsi) Pierre Mendès France. Pour la seconde, également perdue, c’est au général de Gaulle que vous en vouliez car il avait, selon vous, trahi l’Algérie française.

Du haut de la pyramide que vous êtes, soixante ans d’Histoire nous contemplent. Mitterrand que vous avez croisé à maintes reprises et avec qui vous aviez tant de choses en commun : Pétain, Chardonne, Maurras… Chirac  – une plus petite pointure quand même  – qui en 1988 a quémandé auprès de vous les quelques voix qui lui manquaient pour gagner et qu’il n’eut pas. Vous avez été de presque toutes les élections présidentielles. Inébranlable, fidèle à vos convictions d’origine. Même si vous aviez compris que dénoncer l’immigration arabe était, en terme électoraux, une valeur d’avenir, vous n’avez jamais renoncé à votre petite musique antijuive. Une phrase par-ci, un Dieudonné par là…C’était votre façon à vous, et dans votre Eglise que vous aviez bâti, de dire la messe en latin ce qui se fait très rare de nos jours…

Ce qu’il y avait de bien avec vous c’est que vous étiez une boussole infaillible. Rien qu’en vous regardant et en vous écoutant on savait de quel côté, et avec qui, il ne fallait pas être. Je ne vous aimais guère, Monsieur le président, mais vous m’étiez utile. Maintenant dieu sait à quelles errances je vais être condamné…

Et tout ce gâchis pourquoi ? Par la faute de quelques petits marquis, de parvenus aux dents longues. Avides de pouvoir, de postes de députés, de mairies et de régions à gouverner. Des incultes qui ne connaissent rien à l’Histoire, à ses grandeurs et à ses décadences. Ils vous ont congédié comme on se débarrasse d’un meuble usé et encombrant.

Vous étiez trop vieux, Monsieur le président, pour un monde trop jeune. Comme je sais que vous avez des lettres, je vous entends dire après Corneille : "Rome n’est plus dans Rome, elle est toute où je suis". Mais qui vous prêtera oreille ? Qui, dans quelques années, saura que vous êtes le dépositaire exclusif et universel de la marque Front National ? Qui pourra vous entendre puisque les Philippot et autres Collard  feront suffisamment de bruit pour que les médias qui vous courtisaient naguère cessent de tendre un micro au pestiféré que vous allez devenir ? Un pauvre, misérable, et pathétique Père Goriot dépossédé par ses filles.

Oui, Monsieur le président vous allez me manquer. Oui, je vous regretterai. Pour une autre raison aussi que celles évoquées plus haut. Vous étiez le seul homme politique à savoir et vouloir utiliser l’imparfait du subjonctif ! Dans un pays dont le président "parle comme un enfant"  (Finkielkraut à propos d’Hollande) c’était précieux. C’est pourquoi il aurait mieux valu que votre fille ne vous assassinât point. J’espère que je n’ai pas fait de fautes, Monsieur le président ? 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !