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Primaires en vue : sans aggiornamento, les Républicains condamnés au même sort que le PS en 2002 ?
©Reuters

Devoirs de vacances

Portée par sa victoire aux Départementales et par des Régionales qui s'annoncent sous les meilleurs auspices, la droite risque ne pas procéder à l’aggiornamento dont elle a besoin.

Eddy  Fougier

Eddy Fougier

Eddy Fougier est politologue, consultant et conférencier. Il est le fondateur de L'Observatoire du Positif.  Il est chargé d’enseignement à Sciences Po Aix-en-Provence, à Audencia Business School (Nantes) et à l’Institut supérieur de formation au journalisme (ISFJ, Paris).

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Atlantico : A un an des primaires Nicolas Sarkozy apparaît comme le favori des militants et a clairement annoncé sa stratégie : reconquérir les électeurs déçus partis vers le Front national.  Comment les autres candidats aux primaires peuvent-ils s’y prendre pour attaquer la « citadelle Sarkozy » ?

Eddy Fougier : Dans l’état actuel des choses, il est difficile d’anticiper les résultats des primaires car on ne sait jamais jusqu’où vont aller les sympathisants et même les militants. Il est établi que Nicolas Sarkozy est le chouchou des militants et on l’a notamment vu au Bourget au mois de mai lorsque François Fillon et Alain Juppé ont été chahutés.

Mais les militants sont aussi des stratèges et ils vont évaluer qui est le mieux placé pour passer le deuxième tour de l’élection présidentielle. Et s’ils ne sont pas trop arcboutés sur leurs positions, ils désigneront celui qui est le mieux placépour gagner la présidentielle. 

Par exemple, lors des primaires qui ont désigné les candidats du Parti socialiste (PS) en 2007, Ségolène Royal n’avait pas la même assise que Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn mais elle était la mieux placée pour battre Nicolas Sarkozy.

Mais face à la popularité de Nicolas Sarkozy, on voit bien que les autres candidats suivent leur propre route. Alain Juppé prépare son programme, François Fillon travaille sur le fond, Xavier Bertrand se prépare pour les Régionales et Bruno Le Maire attend pour se dévoiler et joue la carte du renouveau.

Que ce soit Fillon, Bertrand ou Le Maire, chacun a sa carte à jouer mais ils savent qu’ils ont peu de chance de l’emporter. Les deux principaux candidats restent bien évidemment Alain Juppé et Nicolas Sarkozy.

Alain Juppé va tenter de jouer sur une primaire la plus large possible et va être le candidat du centre et de la droite. Il va se différencier de l’extrême droite et être le candidat non clivant : la force du consensus et de la sagesse liée à son expérience et à son âge.

Nicolas Sarkozy, semble être tenté de refaire l’histoire, de reprendre le parti et de refaire la campagne de 2007, siphonner les voies du FN et "reconquérir Madeleine". Refaire le coup, si on veut.

François Bayrou a estimé que si Alain Juppé ne sortait pas vainqueur de cette primaire, il serait candidat en 2017. Dans quelle mesure la position de François Bayrou peut-elle être un handicap pour Alain Juppé ?

Ce soutien est un avantage parce qu’il permet à Alain Juppé de bien se différencier de Nicolas Sarkozy en donnant une tonalité plus centriste à sa candidature. Et si Juppé gagne, Bayrou ne se présentera pas ce qui est avantage stratégique pour le parti tout entier qui devrait bénéficier d’un report de voix.  

Mais François Bayrou est un mouton noir pour Nicolas Sarkozy et pour les militants. C’est le traitre par excellence. C’est l’homme qui a appelé à voter François Hollande en 2012. Idéologiquement et symboliquement c’est un boulet. Mais si Bayrou se présente en 2017 face à un candidat des Républicains, ce sera un énorme désavantage pour le parti qui se retrouvera en concurrence directe avec Marine Le Pen parce que les électeurs centristes pencheront pour Bayrou et la candidature LR sera poussée à se droitiser. Bayrou est un des hommes clés de cette primaire.

Quel est l’impact du programme et des idées dans une élection primaire ? Sont-ils des éléments cruciaux ?

Bien évidemment, les militants diront que ce sont les programmes. Mais très souvent la réalité moins profonde et les gens vont voter pour quelqu’un qui a un bagou. J’ai le sentiment que le programme ne comptera pas beaucoup. François Fillon ou Alain Juppé ont intérêt à orienter le débat sur le programme ou les idées parce que justement le programme de Nicolas Sarkozy n’a pas beaucoup changé. Mais les militants veulent un plébiscite pour le chef à la manière des partis gaullistes ou néogaullistes. Nicolas Sarkozy n’était d’ailleurs pas très emballé à l’idée d’organiser des primaires.

Notons que les idées de Nicolas Sarkozy ne sont en rien des idées neuves. Après la présidence de Nicolas Sarkozy, il n’y a pas eu de remise en cause, ni des programmes, ni des idées de 2012. Alors que cela aurait été un mal nécessaire.  

Une victoire aux Régionales pour LR pourrait-elle bénéficier à son président, Nicolas Sarkozy ?

Une victoire électorale, ça compte. Au départ, on considérait que le retour de Nicolas Sarkozy n’avait pas provoqué le frémissement attendu. Puis, les victoires aux départementales ont changé la donne.

C’est un avantage car les challengers n’auront à leur actif que la publication de livres, de rapport, etc. De là à dire qu’une victoire serait décisive, je n’en suis pas sûr. Ce n’est pas parce que l’on gagne les matches amicaux que l’on devient champion du monde.

Aujourd’hui, LR  est au milieu du guet, il y a une dynamique en sa faveur mais rien n’est tranché. Le leadership est tranché, mais pas le candidat et la question de la stratégie face au FN, tout comme celle du programme ne sont pas tranchées non plus. Le parti a résolu la question du leadership du parti mais rien n’a été tranché sur le fond.

Le risque est que le succès électoral aidant, on oublie cet aspect-là. C’est ce qui est arrivé à gauche, en 2002. Le PS en décrépitude a connu des succès électoraux mais n’a pas fait d’aggiornamento. A droite on en est au même point.  Personne n’a réellement analysé les raisons de l’échec de Sarkozy. On oublie de voir qu’il est toujours aussi clivant, aussi impopulaire, une grande partie des Français ne veut pas qu’il soit président. Ce travail n'a pas été fait et risque de ne pas être fait dans l’euphorie des régionales, puis des primaires.

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