Non, tous les intégrismes ne se valent pas<!-- --> | Atlantico.fr
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"En France, pays de liberté, il est tout à fait possible d’écrire que le Christ est un grand nigaud qui, passé trente ans, croyait encore que sa mère était vierge."
"En France, pays de liberté, il est tout à fait possible d’écrire que le Christ est un grand nigaud qui, passé trente ans, croyait encore que sa mère était vierge."
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Ultra-religieux

Les ultra-catholiques ont protesté une dernière fois dimanche à Toulouse contre la pièce de théâtre Golgota Picnic. S'il condamne les intégristes catholiques, Benoît Rayski ne les met pas dans le même panier que les islamistes radicaux.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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En France, pays de liberté, il est tout à fait possible d’écrire que le Christ est un grand nigaud qui, passé trente ans, croyait encore que sa mère était vierge. Il est aussi parfaitement licite de crier que le pape est un vieux con. Tout comme on n’encourt aucune condamnation à affirmer que Joseph était cocu. C’est ainsi. Et il est bien que ce soit ainsi.

Au Moyen-Âge des dizaines de milliers d’hommes et de femmes ont péri sur les bûchers de l’Inquisition pour bien moins que ça. D’autres, encore plus nombreux, ont été abominablement torturés par les soins de ce très pointilleux organisme. Et les deux derniers martyrs de cette triste période portent les noms de Calas et du chevalier de La Barre dont, au XVIIIe siècle, le sort révolta Voltaire.

Depuis, d’incessants combats, qui sont à l’honneur de la civilisation occidentale, ont ramené l’Église à ses origines bienveillantes, charitables et pacifiques. C’est pourquoi on peut aujourd’hui insulter le Christ dans Golgota picnic. Que certains s’en indignent, même s’ils sont réputés intégristes ou fondamentalistes, est parfaitement normal : la liberté de manifester existe en France. Que d’autres, qualifiés de « défenseurs de la liberté d’expression », s’indignent de cette indignation est tout autant légitime : la liberté de contre-manifester existe aussi en France.

On notera toutefois – je suis amateur d’images – que la foule des manifestants catholiques était à genoux et priait. Et que les contre-manifestants étaient debout et les invectivaient (récit puisé dans Libération). Leurs slogans : « Néron revient, il y a encore des chrétiens ! » et : « Deux planches, trois clous, voilà la solution ! »… Dans ce parallèle, d’aucuns verront à coup sûr une préférence partisane. Qu’ils se détrompent, je n’ai que rejet concernant les catholiques intégristes. Mais j’ai un insondable mépris à l’égard de ceux qui ont trouvé ces slogans, signe évident d’un abaissement abyssal de la pensée humaine.

Pour tout dire je trouve qu’il y a une lâcheté confortable à hurler aujourd’hui contre le catholicisme. Une rhétorique qui n’obéit à rien d’autre qu’à un conformisme petit-bourgeois, pépère et peinard. Les églises se vident : elles ne sont plus, depuis longtemps, dangereuses. Les mosquées, elles, se remplissent… Mais quand on est bête à manger du foin, on trouve du plaisir à traiter le Christ de tous les noms. Comme on dit, ça ne mange pas de pain. C’est sans aucun risque. Et sans aucune conséquence. Et c’est ainsi qu’on est adoubé « défenseur de la liberté d’expression ». Chacun ses batailles, chacun ses gloires… Jouer aux soldats de plomb en croyant qu’on participe à la victoire d’Austerlitz ou de Stalingrad constitue certainement le comble de l’imposture.

Mais il est vrai que les contre-manifestants, et un grand nombre de moutons dont ils ne sont que l’avant-garde active, se disent opposés à « tous les intégrismes ». Donc aux intégrismes islamique, chrétien et juif. Toutes les religions même combat ! À bas toutes les religions ! Là on n’est même plus dans l’hypocrisie qui témoigne quand même d’une forme d’intelligence, fût-elle cynique. On est dans la bêtise dont seul le néant peut approcher de la notion de l’infini. On lapide, on tue, on fouette, on égorge au nom d’Abraham et de Jésus ? Mais pour les pauvres d’esprit, réduits à répéter des mots sans contenu et sans sens, tout se vaut, tout est pareil. Je livre à leur méditation cette formule de Lévi-Strauss : « Si toutes les valeurs se valent, alors le cannibalisme est juste une question de goût. »

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