Drones : faut-il craindre des embouteillages aériens ou des chutes intempestives ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les Américains commencent à s’inquiéter de la multiplication d’incidents avec des drones.
Les Américains commencent à s’inquiéter de la multiplication d’incidents avec des drones.
©Reuters

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Aux Etats-Unis, les incidents impliquant des drones se multiplient et soulèvent la question de la bonne gestion de ces engins. En France, si le phénomène n'est pas encore aussi développé, le risque reste pourtant bel et bien présent sans que les autorités ne s'en emparent suffisamment.

Pascal Barguirdjian

Pascal Barguirdjian

Pascal Barguirdjian est ingénieur et dirige Technisolar Seni, laboratoire de recherche ayant développé un radar détectant les drones.

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Atlantico : Les Américains commencent à s’inquiéter de la multiplication d’incidents avec des drones. D’incidents bénins, comme des chutes intempestives d’engins sur les passants, à des actes plus graves, comme la livraison de drogue à un détenu d’une prison de l’Ohio, les drones pullulent et inquiètent. La France fait-elle face au même type de problématique ?

Pascal Barguirdjian : J’ai participé l’année dernière aux commémorations d’Ouistreham, où nous avons détecté avec le radar que j’ai développé un drone d’une envergure d’un mètre. Le problème, c’est que l’on ne parvient pas à établir aujourd’hui des statistiques. Tout simplement parce que personne ne peut voir un drone dans la nuit noire au-dessus de sa tête. Surtout s’il est à 300-400m d’altitude. Le bruit, notamment en ville, fait que l’on peut même difficilement entendre ces appareils. Tout cela fait qu’il est impossible de savoir combien de drones survolent une ville comme Paris… ou l’arsenal de Brest.

La journée, il est plus facile de voir un drone, à quelques dizaines de mètres, puisque ça ne ressemble pas à un oiseau. Pour le savoir, soit on compte sur le hasard, lorsqu’on lève la tête. Ou alors, on place des militaires avec, par exemple, un radar comme le nôtre. C’est d’autant plus compliqué si vous êtes à Paris, avenue de l’Opéra, où les immeubles masquent tout.

De quel type de drones parle-t-on ?

Il y a trois types de drones. Il y a ceux que l’on peut appeler "drone jouet", de 30 euros à quelques centaines d’euros. Ils ne vont pas très loin et sont pilotés par un émetteur au sol. La portée est de 500m grand maximum, et plutôt 250m dans une zone polluée comme la ville, avec son béton et ses ondes électromagnétiques. J’estime que ces engins représentent 90% de ce qui vole dans le ciel français.

Ensuite, à hauteur de 7%, il y a les drones industriels. Leur portée grimpe à 2km, voir un petit peu plus. Les envergures sont plus importantes. Ils sont capables d’être pilotés de manière automatique, avec des "waypoints" que l’on peut programmer. Ensuite, même s’il perd le contact, il rentre tout seul.

Les 3% restant, ce sont des drones militaires, utilisés par des forces spéciales extérieures, qui viennent et qui regardent l’état des capacités de réaction de la France. Les drones militaires, souvent de petite envergure, sont par exemple capables se rendre au-dessus de l’Ile Longue et étudier les capacités de réaction.

Quels sont les risques et quels types d’incidents ont pu être observés en France ?

Sur les plus petits, il y a des risques à cause des batteries. L’électronique, souvent fabriquée en Chine, peut aussi chauffer. Si le contact est rompu, le drone tombe comme une pierre. Il est déjà arrivé que des appareils tombent sur des gens, mais ça n’a jamais été publié. Pour les autres drones, aucun risque comparable.  Ils ne peuvent pas tomber.

En ce qui concerne d’éventuels explosifs, un drone de petite envergure a entre 10 et 20 minutes d’autonomie. Si vous rajoutez du poids, vous réduisez encore l’autonomie. L’engin ne sera plus non plus capable de se déplacer correctement. Il reste possible de modifier un drone jouet pour augmenter ses performances, notamment afin de réduire son poids et donc d’augmenter son autonomie. Le drone industriel peut très facilement transporter 3-4kg et il n’est pas très compliqué de se le procurer. Pour une dizaine de milliers d’euros, on a un engin capable de voler pendant 45 minutes en étant chargé, avec des charges explosives très importantes par exemple.

Les volumes circulant en France peuvent-ils poser la question de risques d’embouteillages ? Trop de drones réduiraient-ils la liberté de manœuvre dans le ciel ?

Je ne pense pas. Il va en plus y avoir une surveillance aérienne toujours plus élevée, en particulier à proximité de sites sensibles.

La justice et la police sont-ils outillés pour gérer les risques liés aux drones ?

Si je suis une entreprise, il me faut un pilote de drone officiel, qui passe des examens et demande une autorisation officielle de faire voler des drones à la préfecture, soit pour prendre des photos, soit pour voir l’état des cultures… Par contre, si je suis un malfrat, je fais voler mon drone sous le manteau. La problématique est plutôt de cet ordre. Pour les drones jouets, il est normalement interdit de les faire voler sur la voie publique sans autorisations.

Selon moi, il faudrait légiférer afin que tout drone en France soit immatriculé avec une émission GSM/GPS. Chaque département pourrait ainsi savoir ce qui vole et ce qui ne vole pas. A l’heure actuelle, rien de ce type n’existe.

Pour que le gouvernement prenne tout cela au sérieux, il faudrait une catastrophe. Pour l’instant, rien ne bouge.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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