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Invasion des frelons asiatiques :
les pouvoirs publics
inconscients du danger
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Vespa velutina

Le frelon asiatique a envahi la France depuis 2004 causant la mort de huit apiculteurs et un ravage chez les abeilles. Pourtant le pouvoir politique tarde à agir. Selon le représentant des apiculteurs, "un jour ou l’autre l'Etat français sera condamné par la Cour européenne de justice".

Olivier  Belval

Olivier Belval

Olivier Belval, Apiculteur professionnel, Président du Syndicat "l’abeille de la Drôme et de l’Ardèche" a été élu Président de l'UNAF.( Union Nationale de l'Apiculture Française).

 

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Atlantico :  L'Union nationale de l'apiculture française (UNAF) que vous présidez a tiré la sonnette d'alarme sur les ravages causés sur votre profession par le Vespa velutina, plus communément appelé "frelon asiatique". De quoi s'agit-il précisément ?

Olivier Belval : Le frelon asiatique est un insecte, arrivé en 2004 dans des poteries de la région de Bordeaux. Depuis, il s’est étendu sur la moitié du territoire français. C’est un insecte nuisible qui n’est pourtant pas encore actuellement classé dans cette catégorie.

Pourquoi lutter contre cet insecte invasif nuisible ? Car il n’est pas adapté à notre biotope : il réalise des colonies qui sont énormes et qui mangent de façon considérable de nombreuses espèces d’insectes. Les frelons sont des prédateurs, la moitié de leur alimentation sont des insectes. Les ruches constituent pour lui de véritable hyper-marchés avec abondance de nourriture. Prêt de la moitié des insectes qu’ils mangent sont des abeilles mais pas seulement. Ils se concentrent sur les abeilles une fois qu’ils ont détruit la quasi-totalité de la biodiversité autour d’eux.

Pour les apiculteurs le problème n'est pas qu'économique. Le frelon asiatique est en effet jugé responsable de la mort de huit personnes en France depuis l'automne 2010...

Oui, il existe un réel danger pour la population. Habituellement, ces frelons se nichent très haut dans les arbres, mais désormais ils se localisent à hauteur d’hommes.

Ces morts auraient pu être évitées si l'insecte avait été maitrisé plus tôt : cela fait plusieurs années que les apiculteurs alertent les pouvoirs publics sur le sujet. Les bonnes décisions auraient pu être prises. D’ici quelques années, le frelon va se répandre sur l’ensemble du territoire français et européen. Croyez-moi, un jour ou l’autre l'Etat français sera condamné par la Cour européenne de justice pour son incurie.

Pour quelles raisons ?

En raison de l’absence de prise de décision face à un insecte qui est nuisible, invasif et qui va se répandre sur l’ensemble du territoire européen créant un déséquilibre écologique.

Qu'en est-il des politiques menées par des pays comme l’Espagne, le Portugal ou l’Italie touchés eux-aussi par ce même frelon asiatique ?

Je n’ai pas encore de retour sur les décisions de ces pays-là qui se trouvent être déjà sinistrés au niveau politique et économique. Mais je pense qu’il est important pour la France de faire tout ce qu’elle peut sur les zones touchées et limiter ainsi la progression, voire la faire régresser. Faire disparaître le frelon asiatique tient aujourd'hui de l'utopie tant nous l'avons laissé proliférer. La seule solution est de défendre les zones où les colonies d’abeilles sont attaquées par les frelons, ainsi que les zones urbaines où ces insectes se développent beaucoup plus vite que dans le reste de la campagne.

Plus de 44 départements sont touchés, soit la grande moitié Sud-Ouest de la France. Le frelon a également été identifié en Bourgogne : un nid est apparu suite au transport d’un frelon par l’intermédiaire d’un camion. Même chose en région parisienne. Sur Paris, depuis la destruction du nid il n’y a plus eu d‘alerte, preuve que lorsque quelque chose est effectué de façon efficace et concertée, l'efficacité est au rendez-vous.

Il est indispensable de ne pas le laisser s’installer comme cela a été le cas en Gironde ou en Aquitaine, où la situation est tellement catastrophique que certain syndicats ont déjà perdu plus du tiers de leur adhérents qui ont complétement laissé tomber l’apiculture.

Qu’est-ce que vous reprochez précisément aux hommes politiques ?

Leur inaction. Le fait que depuis 2009 les pouvoirs publics promettent un grand plan d’action contre le frelon asiatique. Nous sommes en 2011 et rien n’a été fait. Le ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire en est encore à se poser la question si oui ou non il faut le classer comme nuisible ! Invité ce mercredi matin sur France Inter, il a déclaré qu'il y songeait enfin. Cela aurait dû être fait il y a des années ! Lorsque ce sera fait, nous pourrons lutter contre lui de façon plus efficace.

Il est indispensable de mettre en place dans les zones de infestées et dans les zones de progressions un piégeage préventif de printemps, une aide aux apiculteurs pour localiser les nids pendant la saison d’été avec une prise en charge financière par les services publics et par les pompiers de la destruction des nids.

Comment expliquez-vous la lenteur politique sur ce sujet ?

Je crois qu’il faudra attendre qu’une catastrophe se produise dans une ville, avec un buzz médiatique autour d’une invasion incontrôlable pour que finalement, les responsables parisiens se mettent à agir. Mais il aurait fallu agir depuis 5 ou 6 ans.

Il existe une grosse différence entre les hommes politiques qui ne voient ce problème que de loin et ceux qui sont directement concernés, dont les collectivités territoriales sont en contact avec le frelon. C'est la même chose pour les apiculteurs : ceux se trouvent hors zone et n’ont pas encore vue leurs colonies d’abeilles décimées ne peuvent pas prendre conscience de la gravité du problème.

Lors de la manifestation à Agen dernièrement, les apiculteurs étaient suivis par les frelons c’est quelque chose d’assez impressionnant.  Tant qu’on n’a pas aperçu le phénomène on ne peut pas prendre en mesure la gravité du problème.

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