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Le PS doit présenter lundi 27 juillet un rapport qui enterre le Pacte de responsabilité.
Le PS doit présenter lundi 27 juillet un rapport qui enterre le Pacte de responsabilité.
©Reuters

Rapport de Jean-Marc Germain

Le député socialiste Jean-Marc Germain doit présenter lundi 27 juillet un rapport destiné à influencer la loi de finances de 2016. Si certaines idées peuvent paraître pertinentes, la multiplicité des objectifs rend l'ensemble confus.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Atlantico : Le PS doit présenter lundi 27 juillet un rapport qui prévoit de ré-allouer les 15 milliards d'euros non-distribués du Pacte de responsabilité et de solidarité en faveur de l'investissement public et du pouvoir d'achat des ménages. Ce rapport pourrait-il sonner comme la reconnaissance, jusque dans les rangs du gouvernement, de la défaite que représente le Pacte de responsabilité ?

Jean-Yves Archer : Le Pacte de responsabilité est une défaite idéologique car quasiment personne ne vient soutenir, politiquement, cette priorité donnée aux allègements de charges. L'Exécutif y croit de manière dogmatique (plus que par conviction étayée) alors que les résultats du CICE et les premiers retours-terrain du Pacte sont fort mitigés. Quant aux élus nationaux ou locaux du PS, ils sont de plus en plus circonspects.

Dans la situation de détérioration des marges que connaissent les entreprises, et notamment les PME, elles ont davantage réduit des appuis de trésorerie (tel que l'affacturage) plutôt qu'améliorer leur compétitivité prix et hors-prix (qualité, délais de livraison, etc).

Selon les données dont on peut d'ores et déjà disposer, il ne serait pas absurde de réorienter le dispositif surtout lorsqu'on est dans l'obligation de constater que le CICE a permis de financer nombre d'IDE : investissements directs à l'étranger comme l'a montré un rapport du BIPE sur l'emploi dans la métallurgie en 2025.

Dans ses propositions révélées par le Journal du Dimanche, Jean-Marc Germain s'appuierait sur le contenu de la motion A approuvée récemment, et qui prévoit que "les 15 milliards du Pacte qui restent à utiliser devraient dorénavant l'être plus directement pour favoriser l'emploi, l'investissement privé productif, et les investissements publics". Qu'entend-on par investissement productif ? Est-il pertinent d'allouer des fonds publics à l'investissement privé dans le but de lutter contre le chômage ?

Le député Jean-Marc Germain a longtemps travaillé auprès de Martine Aubry et demeure sensible à l'aide publique à destination des moyens de production. Ceci peut sembler une sorte d'archéo-keynésiannisme mais à lire les études de l'INSEE sur le vieillissement du parc productif français, son approche mérite probablement davantage de considération.

L'Etat régulateur peut effectivement se contenter d'allouer une somme à l'entreprise (qui en dispose librement) mais la multiplicité des cas démontre que tout ne s'oriente pas alors vers la quête de compétitivité recherchée depuis 2012 et le fameux rapport Gallois.

Dans ces conditions, flécher une partie de la manne publique vers l'investissement privé productif (aide à la robotisation, à la modernisation des équipements, etc) peut faire sens. D'autant que ce sont des mécanismes que l'Etat connait bien : plans sectoriels de relance de l'investissement. (L. Fabius 1984).

En revanche, il serait illusoire d'attendre de cette réorientation (hypothétique ?) qu'elle ait une influence à court terme sur le niveau de l'emploi.

Celui-ci reste bien davantage corrélé aux plans de charges des entreprises, à la demande effective escomptée, donc à la visibilité des carnets de commande.

Les amis du député Germain souhaitent aussi recourir à un flux d'investissements publics pour soutenir l'activité ce qui est, là encore, de large inspiration keynésienne. Evidemment, cela peut aider à soutenir la reprise mais il me semble qu'il serait plus idoine de stimuler l'attractivité de notre pays et de mobiliser ainsi les liquidités internationales qui sont disponibles.

Pour être direct, il est plus judicieux d'activer le drainage des flux d'investissements internationaux (voir les actions de France Business) plutôt que de se lancer dans des projets purement publics aux coûts finaux souvent mal maîtrisés.

Plus généralement, quels sont les risques de ce plan de bataille qui semble un peu "multidirectionnel" ?

Ce quinquennat demeure une énigme en matière de calendrier. Au plus fort de la récession, il se lance dans le matraquage fiscal pro-cyclique avec Pierre Moscovici à la tête d'un contre-sens de portée historique. Puis, il se lance dans une pure politique de l'offre tout en gommant les réalités du terrain. Le CICE, crédit d'impôt disponible avec un décalage d'un an n'aura pas épaulé bien des firmes en quasi-crise de trésorerie.

Enfin, constatant discrètement que le Pacte ne fournit pas le rendement escompté, la loi de finances pour 2016 (la dernière utile en terme électoral...) va probablement opérer un panachage d'outils de pilotage économique en incluant même un soutien ciblé au pouvoir d'achat. Ce panachage sera-t-il harmonieux ? La question est pendante. Une chose est certaine, le FMI vient de revoir à la baisse ses prévisions de croissance pour 2015 et 2016 ce qui nous oblige d'autant plus à la vigilance en matière de choix de politique économique. Si le panachage est mal maîtrisé, il perturbera les agents économiques (perte de lisibilité) et ne soulagera pas la question centrale qu'est et demeure l'emploi.

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