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Politique fiction (partie 2) : le jour où Sarkozy comprend qu'il a perdu la présidentielle 2012 face à DSK
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Bonnes feuilles

New York – 14 mai 2011. Alors qu’elle vient d’entrer dans la suite 2806 du Sofitel pour y faire le ménage, Nafissatou Diallo peste contre elle-même. Elle a oublié de charger son lecteur MP3 qui vient de s’éteindre brusquement. Elle retire ses écouteurs et perçoit le bruit d’une douche. Elle comprend alors que la chambre est encore occupée et rebrousse chemin. Dominique Strauss- Kahn, qui n’a rien entendu, sort de la salle de bains et se prépare à déjeuner avec sa fille avant de prendre l’avion l’après-midi même pour Paris. Dans quelques semaines, il va annoncer sa candidature à l’élection présidentielle. Extrait du roman "Le bruit de la douche", par David Desgouilles, publié chez Michalon (2/2).

David Desgouilles

David Desgouilles

David Desgouilles est chroniqueur pour Causeur.fr, au Figaro Vox et auteur de l'ouvrage Le Bruit de la douche aux éditions Michalon (2015).

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DSK commençait, lui aussi, à s’amuser dans cette campagne.

Il sentait qu’il tenait le bon bout. Dans un discours à Laon, il se moqua des incantations de Nicolas Sarkozy sur le “modèle allemand”. Il ironisa. « Pensent-ils organiser Oktoberfest à Paris ? », « Warum, de Camillo, va-t-elle se substituer à la Marseillaise ? » DSK improvisait, il faisait un sketch. Il faisait du Sarkozy. Mais du Sarkozy à son meilleur. Pas du Sarkozy de mars 2012. Laurent Fabius s’inquiétait : « Il ne faudrait pas non plus qu’il imite François Hollande. Ce n’est pas de son niveau. » “Monsieur petites blagues”, c’était le surnom qu’il avait donné à l’ex-compagnon de Ségolène Royal, très amateur lui aussi de ce genre de sketches à la tribune.

Les sondages étaient excellents. Nicolas Sarkozy n’avait pas profité de son grand meeting au Bourget. Encore moins de celui avec Angela Merkel à Strasbourg. Certains de ses proches lui conseillaient de profiter de l’affaire du Carlton. Il avait hésité. Il n’hésitait plus. Il ne le ferait pas.

DSK avait sans doute quelques dossiers sur lui. Certes, le président n’avait jamais eu recours au sexe tarifé, lui. Mais il avait aussi ses petites histoires. Les petites histoires que Cécilia lui avait reprochées naguère, sans doute. Et d’autres, peut-être. DSK l’avait prévenu. Il ne resterait pas inerte si on l’attaquait sur ce terrain. L’élection présidentielle française pouvait-elle tomber à un tel niveau ? Pouvait-il prendre cette responsabilité ? Non. Dans sa vie politique, il avait déjà fait preuve de cynisme, à de nombreuses reprises.

Mais l’image de la fonction présidentielle, il y tenait un minimum, quoi qu’en disaient ses détracteurs.

Après un débat dans la boue, le futur président sortirait maculé, la France avec. Il se souvenait d’une réponse du général de Gaulle à ceux de son entourage qui, en décembre 1965, souhaitaient rappeler certaines casseroles de François Mitterrand. Celui qui avait été le chef de la France libre leur avait expliqué que cet homme, un jour, serait peut-être président de la République. Et que prendre la responsabilité de le salir aujourd’hui, c’était peut-être salir la France, plus tard.

Nicolas Sarkozy ne se considérait lui-même pas comme un gaulliste. Il s’était toujours moqué de ceux qui croyaient détenir un morceau de la vraie croix de Lorraine. Il avait toujours ironisé sur ceux qui voulaient revenir aux sources du gaullisme, alors qu’il ne voyait, lui, que le grand large. Mais il se souvenait de cette réponse de son lointain prédécesseur, substantifique moelle du sens de l’État. Il aurait aussi pu penser au vieux partenaire du général, Winston Churchill, et à sa célèbre citation sur le choix du déshonneur sur la défaite, qui entraînait forcément les deux. Mais il n’en eut pas besoin. Il n’irait pas dans la boue.

Ce matin-là, une note lui avait appris que la DCRI avait permis qu’un jeune Français de la banlieue de Toulouse, Mohammed Merah, soit arrêté alors qu’il préparait l’assassinat d’un militaire français, dont la famille était originaire, comme la sienne, du Maghreb. Fallait-il que la France soit à ce point malade pour que de tels projets soient possibles ? Cette France-là avait besoin d’un président fort. Elle avait besoin d’un président qui sache rassembler, et qui soit en position de le faire. Nicolas Sarkozy savait qu’il allait sans doute perdre. Il perdrait dignement.

Extrait du roman "Le bruit de la douche", par David Desgouilles, publié chez Michalon. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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