Comment éviter les pièges lors de l'achat d'une voiture d'occasion<!-- --> | Atlantico.fr
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Entre 5 et 10 % des véhicules d'occasion en vente actuellement ont un compteur kilométrique trafiqué.
Entre 5 et 10 % des véhicules d'occasion en vente actuellement ont un compteur kilométrique trafiqué.
©Reuters

Armes de négociation

Un réseau de malfaiteurs a mis au point une escroquerie qui a abouti à la remise en circulation de 5014 véhicules accidentés dont la sécurité n'était pas assurée. Pour éviter ce type d'arnaques, il existe des solutions simples et peu coûteuses.

Pierre Chasseray

Pierre Chasseray

Pierre Chasseray est délégué Général de l'association 40 Millions d'automobilistes.

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Atlantico. Comment éviter les pièges lorsque l'on achète un véhicule d'occasion ?

Pierre Chasseray. Il y a des moyens. Le premier est simple et pas très onéreux ; une fois que vous avez acheté votre véhicule d'occasion, vous pouvez faire un contrôle technique volontaire. Vous, acheteur, amenez votre voiture au contrôle technique. On vous donnera des pistes pour savoir si votre véhicule est en bon état.

Le deuxième point, le plus sécurisé. Vous pouvez faire appel à un expert automobile. En tant qu'acheteur, il va travailler pour vous, il est mandaté par vous. Il va aller voir le véhicule, l'expertiser et vous adresser dans les 24 heures un compte-rendu d'expertise intégral : estimation de kilométrage, accident subi, état du véhicule complet. Cela vous coûtera une centaine d'euros. Si, il n'existe qu'un cas sur un million, il y a un vice caché, un expert auto engage sa qualité d'expert, vous êtes donc couverts intégralement de tous les frais qui résulteraient d'une éventuelle expertise auto. C'est le seul moyen aujourd'hui qui existe de sécuriser à 100 % l'achat du véhicule d'occasion. Si tout le monde le fait, il n'y a plus de fraude en France.

Au final ce sont de moindres frais supplémentaires, mais indispensables. Quand vous achetez un véhicule d'occasion qui coûte 11 500 euros, si vous faites baisser le prix à 11 400, vous utilisez les 100 euros pour l'expertise. Si l'acheteur propose au vendeur de réaliser une expertise et que ce dernier ne semble pas enclin à accepter, cela cache quelque chose. Il vaut mieux arrêter la transaction. Cela permet de mettre la pression sur un vendeur malveillant.

Que faut-il vérifier pour être sûr de ne pas acheter un véhicule accidenté ?

Il n'y a pas d'autres moyens que ceux de confier son véhicule à un expert. On ne peut pas demander à un automobiliste lambda de soulever le capot pour aller voir les cellules de sécurité du véhicule. Il ne saura pas, ce n'est pas méchant, ce n'est pas son boulot. Moi non plus je ne sais pas, je ne suis ni mécanicien ni expert automobile. Le seul moyen c'est de s'adresser à quelqu'un dont c'est le métier. Lui va voir tout de suite le vice caché. C'est comme un dentiste : une dent cariée, on ne le voit pas, pour un dentiste c'est l'évidence.

Quels sont les risques de la remise sur le marché des ces 5000 véhicules accidentés ?

Les risques ? La mort, c'est aussi simple que cela. Je peux au moins vous dire qu'il y a déjà eu des accidents graves. Le risque est énorme : ces personnes prennent le volant d'un véhicule qui ne peut plus rouler normalement sur la route, des véhicules qui doivent passer au marbre, qui ne répondent plus en termes mécaniques. Les faits sont extrêmement graves. La semaine dernière nous avons fait une proposition de loi au Sénat avec le sénateur de la Vienne Alain Fouché pour sécuriser l'achat des voitures d'occasion et mettre en place une traçabilité des véhicules d'occasion. Cette proposition sera votée avant la fin d'année au Sénat. C'est dommage qu'il faille attendre un événement de ce type-là pour se rendre compte de l'ampleur du problème. 

L'achat du véhicule d'occasion doit être encadré. La proposition de loi consiste à instaurer un contrat gratuit de vente obligatoire entre l'acheteur et le vendeur. Il y aurait des éléments de traçabilité du véhicule. On va intégrer une case pour générer une plus-value au moment de la vente d'un véhicule expertisé, avec compte-rendu du résultat d'expertise. On laisserait la possibilité aux gens de le faire ou pas. Il serait préférable que tout le monde le fasse. Mais, on ne peut pas l'imposer car pour certains 100 euros, cela représente énormément d'argent.

Quid des garanties ?

Les garanties mécaniques mises en place sur les véhicules d'occasion "pièces et main d'oeuvre", au final lorsqu'il y a un problème, elles ne couvrent rien. Soit le véhicule a plus de dix ans, il a décoté de 75 % et puis on rembourse peu. Ce sont aujourd'hui des arguments de vente ces fameuses garanties. En définitive c'est de la poudre aux yeux ! Il faut mieux une expertise à 100 euros qu'une garantie à 300 euros qui ne garantit rien. 

Quelles sont les pratiques les répandues chez les escrocs ? Est-ce que cette arnaque est étonnante ? 

Entre 5 et 10 % des véhicules d'occasion en vente actuellement ont un compteur kilométrique trafiqué. Une sur dix ! En quelques mois maximum, l'alternateur lâchera car le véhicule a été trafiqué. Le plus simple pour revendre un véhicule plus cher reste le trafic de compteur kilométrique. Il suffit de le passer sous les 100 000 kilomètres : c'est une barrière psychologique en France. Ca marche à tous les coups. Un véhicule à 180 000 kilomètres, s'il est rabaissé à moins de 100 000 kilomètres, il peut être revendu à 3,4 ou 5000 euros plus cher. Le vice caché ça peut être tout et n'importe quoi : un véhicule accidenté qui est maquillé par exemple. Et c'est ce qui se passe aujourd'hui. Vous vous rendez compte ? 5000 voitures, ce n'est plus de la fraude, c'est une entreprise. 

Le fait que cette arnaque soit d'une telle ampleur est extrêmement étonnant. Il s'agit tout de même de plus de 5000 véhicules. Il existe de petites fraudes, mais cette fois c'est choquant. Il s'agit d'un véritable réseau organisé de truands. Ces personnes déshonorent leur profession. Ok c'est la crise, oui les fins de mois sont difficiles, mais les autres Français se débrouillent en respectant les règles. Arnaquer les autres, je ne suis pas sûr que ce soit la solution pour s'en sortir. 

Comment ces personnes s'y sont prises pour agir sans que personne ne se rende compte de rien ?

Ils ont réussi à corrompre d'anciens experts en automobiles qui ont oublié que leur profession était extrêmement réglementée. Dans un contexte de crise économique, on essaie de donner un billet contre de faux avis d'expertise de remise en circulation des véhicules. Ainsi, le véhicule revient sur la place publique. C'est dramatique car être expert public est un métier très réglementé et c'est une profession fiable. Ce sont des gens qui font correctement leur boulot. Il y a un tissu d'escrocs qui font un mal fou à cette profession et au marché de l'occasion en général. C'est pathétique.

Quelles sont les conséquences pour les automobilistes qui ont acheté ces véhicules ?

Ces personnes lorsqu'elles vont être contactées vont voir leur véhicule immobilisé. Mais, le crédit qu'ils paient pour leur auto va continuer à courir. Et les gens n'ont plus de voiture. Il faut bien être conscient que ces automobilistes ne savaient rien de l'arnaque. Les véhicules étaient remis en circulation de manière légale puisqu'ils avaient obtenu un certificat de remise en circulation fait par un expert véreux. Le véhicule roulait donc légalement. Cette voiture peut être n'importe quelle voiture achetée en occasion. Il y aura des révélations terribles sur des accidents graves qui ont eu lieu.

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