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Les hommes qui valaient un milliard : au coeur du réseau que la CIA avait implanté à Moscou pendant la guerre froide
©Capture écran

Dans la peau d'un agent infiltré

David E. Hoffman raconte grâce aux archives de la CIA, l'incroyable double vie des espions infiltrés au cœur du KBG pendant la guerre froide. Entre espionnage et conspirations, l'auteur fait revivre le quotidien tumultueux et risqué de ces agents volontaires qui ont récolté des milliers de données militaires secrètes appartenant à l'URSS.

Dans son ouvrage intitulé The Billion Dollar Spy, David E. Hoffman, lauréat du prix Pulitzer, fait le récit de l'étonnante histoire d'Adolf Tolkatcher, un espion soviétique de la CIA basé à Moscou pendant la guerre froide. Un ingénieur animé par le désir de vengeance après que des membres de sa famille aient péri dans des camps de travailleurs sous l'Union Soviétique et prêt à tout pour renverser le régime communiste. Le récit d’Hoffman est basé sur près de 1000 pages de dossiers déclassifiés appartenant à la CIA, lesquels regroupent entre autre, des entretiens personnels, des photos et des notes scrupuleusement précises. A ce titre, l’auteur livre les secrets d’espionnage qui ont perduré au cœur du KGB durant la guerre froide, au travers de la plume et de la voix de Tolkachev directement. Dans cet ouvrage que l’on pourrait comparer à un thriller, mais qui se veut à la fois incroyablement touchant, l’auteur nous embarque dans un univers à double sens, parsemé de danger et de secrets géopolitiques.

Quand la haine du soviétisme pousse à l'espionnage

Dans les années 70, Adolf Tolkatcher, originaire du Kazakhstan et ingénieur militaire soviétique, ne supporte plus de vivre sous le régime communiste, il s'en dit déçu, révolté. En 1977, il décide de contacter Robert Fulton, le chef du service de CIA basé à Moscou. Il devra insister plus d'une année pour que l’organisation le rappelle finalement et accepte de faire de lui un espion. Au fil des pages, on découvre qu’Adolf Tolkatcher est prêt à divulguer les plans militaires et logistiques de l'URSS au péril de sa vie. A l'époque âgé d'une cinquantaine d'années, il ne rechigne pas à voler des documents classés top secret et à les cacher sous sa veste pendant l'heure de déjeuner. Muni d'un mini appareil photo de 35 mm qu'il cache dans le pied d'une chaise de chez lui, Tolkatcher photographie des rapports, des statistiques, des plans et des données militaires. Au total, il est parvenu à remettre plus de 179 rouleaux de film de 35 mm couvrant 6 400 pages de documents secrets à la CIA. Il a également réussi à faire sortir clandestinement des plans et des cartes de circuits imprimés.

Adolf Tolkatcher, sur une peinture de Kathy Krantz Fieramosca

Sa première réunion clandestine se déroula le soir du jour de l’an 1979. Vingt autres réunions suivirent en six ans, toutes non loin des quartiers du KGB. La plupart du temps à la gare de Moscou. Hoffman décrit la pression liée à ces entretiens, la paranoïa de certains agents de la CIA, le danger encouru, les codes secrets pour se retrouver, les plans élaborés, les déguisements parfois nécessaires. Mais surtout, la technique et l’habilité de Tolkatcher en situation dangereuse. L’ingénieur soviétique n’a peur ni d’être attrapé, ni de mourir. Il œuvre corps et âme pour la dissolution du régime communiste instauré par Lénine 50 ans plus tôt.

Hoffman décrit avec tout le réalisme que lui offre ces archives, les dix années pendant lesquelles Tolkatcher a utilisé sa couverture d'ingénieur soviétique et ses codes d'accès pour extirper, copier et photographier des dizaines de documents appartenant au KGB. Ses révélations auront permis aux Etats-Unis de remodeler leur système de sécurité, ainsi que de développer leur armement militaire et vaincre les radars soviétiques aériens. Grâce à Tolkatcher, les Etats-Unis sont parvenus à avoir une parfaite visibilité du ciel européen pendant la guerre froide, sans que le KGB ne s’en doute. Il était, de toute évidence, l'agent le plus important de la station de Moscou. De quoi recenser son héroïsme dans un livre. 

L’espionnage, cet art de l’illusion

Dans The Billion Dollar Spy, Hoffman raconte également l’étonnante mission de Bill Plunkert, un autre espion de la CIA. Un soir, Plunkert s’aperçu que des agents du KGB l’avait pris en filature. Il savait qu’il risquait sa vie et qu’il devait suivre les plans élaborés par la CIA. Afin d’en réchapper, il décida de sauter de sa voiture en marche et s’écrasa sur le trottoir. En quelques secondes, Plunkert retira sa première couche de vêtements et enfila le masque soigneusement fabriqué par ses alliés. A mesure que la voiture du KGB se rapprocha de lui, Plunkert ne fut plus qu’un innocent grand-père tomber à terre. Lorsqu’Hoffman fait état de ces missions à hauts risques, de ces entretiens millimétrés et du stress ressenti par les espions, il détaille avec précision à quel point l’illusion est la manœuvre courante de l’espionnage. Et à quel point le sang froid est la clé de survie d’un espion infiltré.

Des soldats du KGB

Tolkatcher fait économiser 2 milliards de dollars aux Etats-Unis

Adolf Tolkatcher fut l'un des espions les plus précieux des Etats-Unis lors des cinq décennies durant lesquelles dura la guerre froide. Sa contribution, au péril de sa vie, permit aux Etats-Unis d'économiser 2 milliards de dollars en recherches et développement d'armement.  Mais en 1985, au terme d'une enquête de plusieurs années, le KGB qui avait découvert des fuites, démasqua Adolf Tolkatcher et le condamna à mort. De ces dix années d'espionnage, il reste ces milliers d’archives stockées dans les murs de la CIA, qu’Hoffman a étudié, décrypté et livré au grand jour dans The Billion Dollar Spy. Un rendez-vous historique et riche en rebondissements.

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