Les fermes souterraines, avenir de l’agriculture ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les premiers produits frais extraits des entrailles de la terre sont déjà dans les assiettes des londoniens
Les premiers produits frais extraits des entrailles de la terre sont déjà dans les assiettes des londoniens
©Reuters

Underground food

Les premiers produits frais extraits des entrailles de la terre sont déjà dans les assiettes des londoniens: de jeunes entrepreneurs anglais ont décidé d'investir les espaces laissés vacants à l'extinction de l'industrie du charbon pour y faire pousser fruits et légumes: absence d'insectes dévoreurs, fraîcheur des produits, limite des coûts de transport et mise en valeur d'espaces à l'abandon, le projet semble séduisant et promis à un bel avenir.

Marcel Kuntz

Marcel Kuntz

Marcel Kuntz est biologiste, directeur de recherche au CNRS dans le laboratoire de Physiologie Cellulaire Végétale. Il est Médaille d'Or 2017 de l'Académie d'Agriculture de France

Il est également enseignant à l’Université Joseph Fourier, Grenoble.

Il tient quotidiennement le blog OGM : environnement, santé et politique et il est l'auteur de Les OGM, l'environnement et la santé (Ellipses Marketing, 2006). Il a publié en février 2014 OGM, la question politique (PUG).

Marcel Kuntz n'a pas de revenu lié à la commercialisation d'un quelconque produit. Il parle en son nom, ses propos n'engageant pas son employeur.

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Atlantico: Dans la banlieue de Londres, une nouvelle forme d'exploitation agricole a fait son apparition : les fermes souterraines. Le principe est simple, il s'agit de réutiliser des espaces anciennement aménagés (comme des mines) pour y développer des exploitations agricoles. Comment ces fermes fonctionnent-elles? 

Marcel Kuntz : Ces fermes souterraines sont localisées dans des espaces exploités auparavant pour extraire du charbon, et laissés à l'abandon depuis. Des entrepreneurs londoniens ont voulu faire l'expérience d'utiliser ces espaces très peu chers et non exposé à la pollution urbaine à des fins agricole. L'expérience est encore très limitée à la banlieue londonienne et pour le moment, la nourriture produite n'est récupérée que par des restaurants très haut de gamme, vu le prix de la production.

Concrètement, ce sont des locaux remplis d'étagères où sont cultivées quelques espèces, comme le basilic, le coriandre, de la roquette et d'autres permettant de constituer des salades ! L'éclairage, dans ces espaces souterrains, est par définition artificiel. Les cultures sont hors-sol : ce que l'on appelle l'hydroponie.

Quels sont les avantages apportés par ce type d'exploitation ?

Les promoteurs du projet évoque la fraicheur et le moindre coût de transport, car les produits sont en ville.  Cependant, le bilan énergétique réel n'est pas connu. Est-il réellement si bon que cela par rapport à des productions maraichères péri-urbaines ?

On nous dit aussi qu'il n'y a pas besoin de pesticides, qu'une porte protège des bactéries. Mais à voir les photos de personnes en tenue de ville toucher les cultures, on peut se demander si cela va durer très longtemps. On ne sait rien de l'humidité. Va-t-elle favoriser rapidement la propagation de maladies dans un tel milieu confiné ?

Pour moi l'avantage principal, est de concilier business et air du temps opposé aux pesticides et en faveur de productions locales. Pourquoi pas si cela fait plaisir à certains et gagner de l'argent à d'autres !

Est ce qu'elles représentent une piste de développement durable pour l'agriculture ?

On ne sait rien des coûts de fonctionnements, notamment énergétiques, dont la lumière, peut-être le chauffage. Il est dit que l'énergie est renouvelable, mais Il faut de l'électricité. D'où vient l'électricité renouvelable ? A  t on installé des éoliennes ? Des panneaux solaires ? Cela occupe une certaine superficie. Si les cultures étaient en serre, on utiliserait l'energie solaire directement. On ne sait donc rien du bilan énergétique de ce système en comparaison avec d'autres. C'est plus un marché de niche pour citadins à la recherche d'originalité qu'une méthode pour nourrir la planète.

Existent-ils d'autres pistes qui permettent également de limiter l'usage de pesticide, avec une bonne empreinte écologique et économiquement viable à grande échelle?

L'approche étatique française du Plan EcoPhyto a échoué. Mais est-ce surprenant si on prétend planifier de manière là aussi "hors sol", c'est à dire coupée du terrain.

En revanche, on s'appuyant sur tous les outils disponibles (l'amélioration génétique, dont les biotechnologies, les technologies de l'information, celles de l'agriculture de précision, des nouvelles pratiques culturales dont l'agro-écologie, etc.), en lien avec les agriculteurs, on peut évoluer vers des pratiques soutenables. Il y aura toujours besoin de produits de protection des cultures, mais dans des itinéraires techniques où on les utilisera de manière moins systématique, peut-être uniquement en dernier recours. 

On parle d'un problème de surface d'exploitation des sols afin de nourrir une population mondiale en perpétuelle croissance : comment peut-on résoudre cette équation des sols disponibles et des hommes à nourrir ?

Par les meilleurs outils évoqués ci-dessus. En ne se laissant pas bercer par des discours qui ignorent la nécessité d'augmenter les rendements. On peut bien sûr aussi éviter les gaspillages et les pertes de récoltes, mieux répartir la nourriture. La question est donc aussi politique. Rien n'est donc gagné !

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