Voilà les pays d’Europe où déménager pour payer moins de loyer qu’en France <!-- --> | Atlantico.fr
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Le Royaume-Uni est le pays dans lequel les loyers sont les plus élevés.
Le Royaume-Uni est le pays dans lequel les loyers sont les plus élevés.
©Renzo Piano / Vitra Campus

Bail bail !

Les disparités entre les loyers dans l'Union européenne sont parfois importantes et ceux qui paient le plus cher ne sont pas toujours ceux qu'on imagine. Un Grec paye en moyenne son loyer presque aussi cher qu'un Français alors que les Espagnols dépensent plus pour leur loyer que les Allemands.

Atlantico : Quels sont les pays européens où les loyers sont les plus chers ? Pour quelles raisons ? Où se situe la France ?

Jean-Luc Buchalet : Le Royaume-Uni est le pays dans lequel les loyers sont les plus élevés (902 euros par mois en moyenne en 2013 selon Eurostat Data). Mais il est important de bien distinguer le Grand Londres du reste du pays. Cette première place au classement s’explique par une politique monétaire beaucoup plus laxiste que celle de la BCE depuis plusieurs années et un "quantitative easing" qui a été utilisé très tôt. Cette politique a entrainé une reprise très forte des prix qui a largement dépassé le précédent pic, atteint juste avant la crise des subprimes. Le second phénomène à prendre en compte est la place qu’occupe Londres à l’international. C’est la seconde place boursière, derrière New York, et beaucoup de milliardaires s’y sont installés. Il existe un vrai déficit d’offres car il n’y a pas eu beaucoup de constructions alors que, dans le même temps, les riches ont tiré le marché locatif vers le haut. Les loyers ont progressé plus rapidement que les revenus et des quartiers peu huppés font aujourd’hui l’objet de spéculations tant le marché est tendu.

Le marché allemand est très différent dans la mesure où les prix ne sont pas (encore) très élevés (600 euros par mois). De nombreux logements ont été construits lors de la réunification, ce qui a tiré les prix vers le bas. Les Allemands partent de beaucoup plus loin que le Royaume-Uni ou même la France. S’ils ont un taux de propriété de seulement 55 %, l’immigration importante va progressivement faire monter les prix, mais il y a encore une marge importante avant que le marché locatif n’entre dans une phase réellement tendue.

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, le marché espagnol est encore supérieur à celui de la France et de l’Allemagne. Il faut faire le lien entre le taux de propriété et le prix des loyers. Plus ce taux est élevé (80 % pour l’Espagne), plus le marché locatif se tend. Ce mécanisme est bien expliqué dans mon livre, écrit avec Christophe Prat : Immobilier, comment la bulle va se dégonfler.

Enfin, la Grèce suit un schéma proche de celui de l’Espagne. Avec un loyer moyen de 580 euros par mois, la Grèce est un pays cher malgré l’effondrement de la bulle. Le taux de propriété est également très fort (environ 80 %)  et les salaires réels ont beaucoup progressé ce qui a entrainé une hausse mécanique des loyers.

Aujourd’hui, la France est dans la fourchette haute avec 598 euros par mois. La situation française est encore différente puisque le marché de l’immobilier s’est retourné depuis août 2011. On a connu une baisse de 11 % et les grandes surfaces ont chuté encore plus. Les loyers, eux, commencent à baisser, ce qui est toujours un mauvais signe. Ce cycle baissier devrait rebondir quelque peu avec les diminutions des taux au second semestre, mais ces derniers vont remonter.

Les écarts entre les pays de l’Union européenne tendent-ils à se réduire ? Pourquoi ?

J’aurais tendance à dire que oui, même s’il ne faut pas faire fi des disparités régionales fortes. A l’intérieur d’une même zone comme l’Union européenne, et à plus forte raison la zone euro, les situations vont en s’harmonisant progressivement. Malheureusement, toute harmonisation se fait par le haut (sauf crise exceptionnelle du type de celle des subprimes). L’Espagne est un exemple intéressant. Son entrée dans l’Union européenne, puis dans la zone euro, a contribué à une augmentation sensible des loyers. Les pays qui connaissent des prix encore faibles vont rattraper progressivement ceux qui sont en haut. La plupart des pays qui ont des loyers moins chers sont ceux qui sont entrés en dernier au sein de l’Union et commencent leur travail de "rattrapage".

Les disparités régionales, et entre villes, sont extrêmement importantes. La moyenne de 598 euros par mois en France pour une location veut-elle vraiment dire quelque chose ?

Non, les fortes disparités entre les villes ne permettent pas d’obtenir des chiffres signifiants, surtout dans un pays comme la France.Il est indispensable de distinguer, Paris, l’Ile-de-France, et le reste du territoire. Paris et la région parisienne ont un effet entonnoir. Le prix du mètre carré à l’achat est de 7.900 euros à Paris contre "seulement" 3.200 euros pour la ville de Lyon. La moyenne allemande est, par exemple, plus signifiante dans la mesure où le pays est plus décentralisé, et la différence entre les loyers plus ramassée.

Les Français consacrent en moyenne 30 % de leurs revenus pour se loger. Est-ce un chiffre raisonnable et où se situe-t-il par rapport au reste des Européens ? 

Entendons-nous bien, 30 % c’est énorme surtout si on le considère dans une perspective historique. Il y a 20 ans, la part du revenu consacrée au loyer était de 19 %. L’argent des loyers est "perdu" pour l’économie car il va vers les rentiers, et n’est plus réintroduit via la consommation. Des prix trop hauts finissent par gripper l’ensemble de l’économie. Si la France est dans la fourchette haute, le Royaume-Uni (39 %), l’Espagne (39 %) ou encore la Suède (34 %) se classent devant encore. Cela s’explique par un logement social très présent, en France, issu de normes législatives. Mais cette volonté politique de limiter le prix des loyers pour les plus démunis a un effet pervers. Lorsqu’un immeuble est construit dans une zone tendue, une partie doit être réservée à des logements sociaux. Pour s’y retrouver, le promoteur gonfle les prix des autres logements et les classes moyennes sont exclues des centre-villes. L’effet est contreproductif.

Il existe de grandes tensions, quand on sait qu’en France les plus pauvres dépensent 40 % de leurs revenus pour payer leur loyer. C’est considérable. 

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