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Le cauchemar : le documentaire qui raconte l’horreur de la paralysie du sommeil lorsqu’on se réveille incapable de bouger, en train d’étouffer et terrifié
©Capture film

Baille au nez

Un documentaire réalisé par Rodney Ascher et intitulé "The nightmare", décrit précisément les effets de la paralysie du sommeil sur ceux qui la subissent. Et si ceux-ci son particulièrement désagréables, ils ne sont pas dangereux pour autant.

Joëlle Adrien

Joëlle Adrien

Joëlle Adrien est neurobiologiste et directrice de recherche à l'INSERM et à la SFRMS (Société française de recherche et médecine du sommeil). Elle est aussi présidente de l'Institut National du Sommeil et de la vigilance, etauteur de Mieux dormir et vaincre l'insomnie, paru chez Larousse en juin 2014.

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Atlantico : Pouvez-vous nous décrire en quoi cette paralysie consiste ? La description faite par Rodney Ascher vous semble-t-elle crédible ?

Joëlle Adrien : Oui cela est crédible. La paralysie du sommeil consiste à se réveiller d'un sommeil et ne plus pouvoir bouger, d'avoir la sensation d'être paralysé. On continue à respirer, il y a donc des mouvements du corps, mais les mouvements volontaires sont impossibles. C'est donc très angoissant et parfois associé à des hallucinations, on croit être agressé ou qu'il y a quelqu'un dans la pièce. Cela augmente l'angoisse de ces épisodes : d'une part celle de rester paralysé toute sa vie, d'autre part celle des hallucinations.

Le réalisateur du film décrit notamment une présence malveillante tout près de ceux qui souffrent de cette paralysie, une présence qui les regarde. Comment expliquer ce schéma hallucinatoire qui est selon lui récurrent ?

Au moment de la paralysie, on est en train de se réveiller du sommeil paradoxal, dans ce sommeil il y a des hallucinations car il y a des rêves par exemple, des phénomènes de respiration irrégulière ou haletante tout à fait normaux dans cette phase. Au moment de cet éveil incomplet persistent toute la partie hallucinatoire faisant partie du rêve, mais aussi ces respirations parfois oppressée. Quand le cerveau s'éveille on perçoit toujours cela car le corps est dans un état de rêve, cela suscite l'angoisse, on se demande ce qui se passe, si ça va s'arrêter. Tout cela augmente l'angoisse. Si l'on comprend que cela n'est pas grave, que l'on comprend que c'est une paralysie du sommeil, tout devient beaucoup moins angoissant.

D'où vient cette sensation d'étouffement ?

Cela vient de phénomènes naturels. Pendant le sommeil paradoxal il y a l'activation de ce qu'on appelle le système neurovégétatif qui régule la respiration, le rythme cardiaque, la sudation, et tout un tas de phénomènes végétatifs, c'est-à-dire sur lesquels on n'a pas de contrôle volontaire. Or, pendant cette phase, ce système est extrêmement bousculé, on s'en rend pas compte dans les rêves, mais quand on le vit de façon éveillée, on en prend conscience.

Au moment où survient cette paralysie du sommeil, le dormeur est-il éveillé ou encore endormi ? Ou peut-être un peu des deux ?

Le cerveau est éveillé mais le corps est encore endormi, il se trouve toujours dans la phase appelée "sommeil paradoxal" dans laquelle il n'ya plus du tout de tonus musculaire. C'est un éveil incomplet, cette paralysie arrive très fréquemment au moment du réveil, beaucoup moins lors de l'endormissement. Il y a une espèce de dissociation entre le cerveau et le corps.

Le sommeil et le réveil font jouer un très grand nombre de mécanismes qui doivent être coordonnés. Parfois cette coordination ne fonctionne pas bien, cela peut être du à un stress, à un manque de sommeil, des horaires irréguliers, à beaucoup de facteurs comportementaux. Dans des rares cas cela est du à une vraie maladie : la narcolepsie, mais elle est extrêmement rare, touchant peut-être trois personnes sur mille. Dans l'immense majorité des cas ce n'est pas grave, mais du à une mauvaise hygiène de vie, au stress, qui fait que le cerveau se réveille avant le corps.

Ce phénomène naturel de paralysie du sommeil a beaucoup influencé les histoires de fantômes selon le réalisateur, de démons qui nous visiteraient la nuit par exemple. Parmi celles-ci, le mythe des succubes, des diables qui profiteraient de la nuit pour avoir des rapports érotiques avec les dormeurs. Dans cette veine-là, avez-vous déjà entendu parler de paralysie liée à une sensation agréable ?

Moi, je n'en ai jamais vraiment entendu parler. Peut-être dans les relations mystiques, où l'idée de "passion", de rapport avec l'autre, peut être transformée en "amour mystique". Là ça pourrait être agréable, mais en règle générale c'est plutôt violent, donc désagréable. Tout cela a donné lieu à tellement d'interprétations ancestrales, philosophiques ou mystiques, que le côté mystique, donc agréable, peut être présent, mais cela a également donné lieu à des histoires de "diables" ou autres.

Y a-t-il un facteur culturel qui puisse influencer le développement de ce phénomène ?

Non, je ne pense pas qu'il y ait un facteur culturel, mais je pense que toute expérience est reprise par différentes cultures. C'est une expérience extra-ordinaire, donc qui sort de l'ordinaire, c'est donc normal qu'on y mette ensuite des connotations elles aussi extra-ordinaires. Dans l'Antiquité, les rêves ont toujours porté une signification surnaturelle, d'oracle par exemple, de prévision … Ils ont toujours eu beaucoup plus de significations que dans la culture scientifique actuelle. Je pense que pour les paralysies du sommeil et les hallucinations qui surviennent à ce moment là, on a attribué les mêmes vertus selon les cultures. Cependant, on ne fait pas plus d'hallucinations lorsqu'on fait partie d'une culture ou d'une autre.

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