Mesures pour l'embauche dans les PME-TPE : les bonnes idées et les vraies lacunes<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Premier ministre Manuel Valls néglige certaines mesures qui permettraient d'augmenter les embauches.
Le Premier ministre Manuel Valls néglige certaines mesures qui permettraient d'augmenter les embauches.
©Reuters

Effet d'annonce

Le Premier ministre Manuel Valls a annoncé une série de nouvelles mesures pour encourager l’embauche dans les TPE et PME ce mardi 9 juin au matin. Les CDD ainsi que les contrats d'intérim seront ainsi renouvelables deux fois au lieu d'une et l'effet des franchissements des seuils jusqu'à 50 salariés va être gelé pendant trois ans.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Nul n'a besoin d'être économiste pour savoir que depuis plus d'une décennie, la création nette d'emplois se situe dans les PME et dans les TPE, par opposition aux plans sociaux massifs des grands groupes. SANOFI hier. La banque HSBC aujourd'hui.

Dès lors que le chômage de masse est "le fléau des fléaux " selon François Hollande - dont le sort électoral futur est essentiellement lié à l'évolution de cette variable-clef -, il est d'évidence que le gouvernement doit se préoccuper de soutenir les PME et les TPE. Encore et encore.

Comprendre les réticences à l'embauche

Là encore, nul besoin d'être économiste pour comprendre que les entrepreneurs sont réticents à l'embauche à l'aune du caractère friable de leurs carnets de commande. Faute de visibilité du chiffre d'affaires de demain, le patron rechigne à embaucher ce jour pour devoir licencier après-demain.

>>>>> A lire également : Les chefs d'entreprise de plus en plus tétanisés par la politique du gouvernement

Bien des économistes, dont Jean-Hervé Lorenzi ou Mathilde Lemoine, se penchent sur la question du contrat de travail unique et posent qu'une simplification de notre droit doit être clairement et frontalement envisagée. Pour ma part, je relève que notre Code du travail ne comporte pas 3000 pages si l'on prend le soin d'ôter des centaines de jurisprudences d'application rare. Quand vous prenez le Code civil, il fait – en apparence – 3000 pages mais il est rare d'ouvrir une succession le même jour qu'une renonciation à l'autorité parentale couplée à un divorce et à des troubles de voisinage provenant d'une servitude de passage. En conscience, j'invite respectueusement certains esprits à savoir raison garder et à conserver le sens de la mesure plutôt que de verser dans des démonstrations fondées sur des postulats erronés. Le terme de fondation ne garantit nullement le fondement de la réflexion. La preuve peut être établie par un bon lycéen.

Pour l'heure, le gouvernement n'a pas de majorité pour adopter une refonte de notre Code du travail et nous ne pouvons que le déplorer. Le Premier ministre a ce jour décidé d'annoncer que les indemnités obtenues en justice prud'homale pour licenciements "dénués de cause réelle et sérieuse" subiraient une limite calculée en fonction de la taille de l'entreprise et selon l'ancienneté du salarié.

Plutôt que de comprendre les réticences à l'embauche, le Premier ministre veut "réduire l'incertitude liée aux contentieux sur les licenciements". Ce n'est pas embrasser la globalité de la question, c'est même prendre le risque de tenir les jumelles à l'envers. Tant les keynésiens que les libéraux pur sucre savent que les freins à l'embauche viennent, de manière prépondérante, des aléas affectant le demande effective anticipée. Les conditions de rupture sont une variable de second rang sauf, évidemment, dans les firmes au sein desquelles on fait peu de cas du droit.

C'est d'ailleurs pour cette raison indirecte que le plafond précité supra ne visera pas les cas où le litige vise des "atteintes graves au droit du travail" comme les discriminations ou le harcèlement.

Tout opérationnel doté d'une once de formation juridique peut pressentir la future inflation de ce type de contentieux ce qui bride la portée de l'opportune mesure apparente du gouvernement.

Le hoquet positif du CDD et la question des seuils

Les CDD ainsi que les contrats d'intérim seront renouvelables deux fois au lieu d'une dans l'état actuel du droit social. Toutes les firmes seront concernées. Loin d'être un hochet sans portée, ce hoquet du CDD pourrait s'avérer très positif et permettre d'attendre que la reprise se traduise enfin dans les courbes des différents chômage ( âge, secteurs, régions, etc ).

Selon l'annonce du Premier ministre ( qui restera à traduire en actes ), l'effet des franchissements des seuils jusqu'à 50 salariés va être gelé pendant trois ans afin de soulager les entreprises de certains prélèvements et obligations sociales et fiscales. Comme il est regrettable que ceci n'est pas fait l'objet d'une forte incise dans le projet de loi Macron dont on a déjà souligné la lenteur d'élaboration, de discussion et de future mise en œuvre ( temps de rédaction des décrets d'application ).

Autres mesures ponctuelles

Manuel Valls a aussi tenu à ajouter quelques mesures d'ordre technique qui lui poseront moins de difficultés avec sa majorité :

- Il en est ainsi de la lutte contre les fraudes qui concernent les travailleurs détachés avec une co-solidarité du donneur d'ordre en cas de mise en cause de son sous-traitant.

- Nouvelle aide pour les premières embauches : 4000 euros pour le recrutement d'un premier salarié en CDI ou en CDD de plus d'un an. Durée de validité de cette aide : jusqu'au 15 Juin 2016.

- Une mesure pertinente mérite d'être soulignée : elle concerne les apprentis dont la période d'essai prendra fin désormais au bout de deux mois de présence dans l'entreprise ( et non plus de deux mois de contrat ).

Cet ensemble de décisions dont, répétons-le, toutes ne relèvent pas du pouvoir règlementaire de l'Exécutif, semble favorable mais bridée par une écoute parcellaire des TPE et des PME.

De l'artisan menuisier aux jeunes qui dirigent une start-up sous le régime de la gérance majoritaire, tous savent qu'il est urgent de réformer vraiment le RSI ( Régime social des indépendants et assimilés ).

Le rapport des députés Bulteau Verdier remis hier, lundi 8 Juin, vise à réduire les dysfonctionnements du RSI. Voilà quelque chose de plus concret et plus urgent que d'énoncer une réformette en matière de seuils sociaux.

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