Le cas "Hatred" : créer la polémique pour mieux vendre<!-- --> | Atlantico.fr
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"Etre subversif, ce n'est pas donné à tout le monde."
"Etre subversif, ce n'est pas donné à tout le monde."
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Atlantico Games

Quand un développeur peu scrupuleux tente de créer le scandale pour vendre, cela donne un titre comme Hatred – une débauche de violence gratuite, constituant l'unique point de vente d'un "jeu" indigne de votre temps et de votre argent.

Greg Jacomet

Greg Jacomet

Greg Jacomet, 24 ans, est éditeur du magazine Parisian Gentleman, éditorialiste pour le magazine "The Rake" et un expert aujourd’hui très réputé en matière de parfumerie, notamment masculine. 
 
Il est également un grand spécialiste du monde des jeux vidéo et l’animateur de la rubrique "Atlantico Games" consacrée à l’actualité internationale du secteur.
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Certains jeux vidéo utilisent à dessein des thèmes et des visuels extrêmement violents dans leur matériel promotionnel pour créer la controverse. La technique n'est ni nouvelle, ni exclusive au seul secteur du jeu vidéo, car elle permet à certains développeurs peu scrupuleux d’attirer les meilleurs attachés de presse du marché sans avoir un débourser un sou.

Quel meilleur moyen, en effet, de faire parler de son produit, que de le jeter en pâture à une horde de journalistes et de politiques toujours prêts à s'indigner pour quoi que ce soit, du moment que cela leur permet de se taper dans le dos en rigolant très fort, heureux de leur engagement pour une cause qui "compte"?


"Hatred", sorti il y a quelques jours, est le dernier jeu en date a avoir tenté de faire scandale, avec un succès jusque là très modéré. La cause ? Le contenu du jeu, tout simplement : "Hatred" est un "simulateur" de massacre, dans lequel l'on dirige un misanthrope aux cheveux longs et gras, vêtu d'un trench en cuir noir et armé jusqu'aux dents, qui rêve de mourir violemment en tuant un maximum d'innocents dans son sillage.

Une violence extrême est au coeur même du gameplay.

Le seul moyen de récupérer des points de vie dans Hatred est d'exécuter un civil ou un policier agonisant… D'ailleurs, l'unique but du jeu est de massacrer un nombre donné de personnes sans mourir, tout en écoutant le protagoniste anonyme déblatérer des lignes de dialogues pathétiques – du genre qui ne jureraient pas dans le carnet de poésie d'un ado étudiant en lettres modernes au teint pâle et aux cheveux gominés, qui va se scarifier dans les toilettes entre deux cours d'espagnol.

Seulement voilà, être subversif, ce n'est pas donné à tout le monde. Tout comme l'ironie et le sarcasme, la subversion demande réflexion et intelligence.

Or, Hatred n'est pas un jeu intelligent. C'est, au contraire, un titre qui se fonde sur un concept abruti et éculé, convenu au possible, cliché jusqu'à la nausée et dénué de toute pointe de dérision qui aurait pu faire, éventuellement, du soft un titre au moins digne d'être considéré comme une débauche de violence stylisée et outrancière, à la manière des films de John Woo ou de Quentin Tarantino.

Mais au delà de toute autre considération, Hatred n'est tout simplement pas un bon jeu : c'est une belle bouse, truffée de bugs et sortie à la va vite pour tenter de capitaliser sur une mini-controverse risible de naïveté.


Une belle arnaque en d'autres termes, pour se faire des thunes sur le dos de types impressionnables et incapables de faire la différence entre violence gratuite et oeuvre subversive.

Pour ne rien gâcher, le soft se manoeuvre comme un camion sur une patinoire : la vue de 3/4 du dessus fait que l'on se mange les murs en permanence à cause de la misérable inertie des contrôles, la perspective est constamment dans les choux, et l'univers du jeu est à la fois redondant et entièrement dénué de style et de personnalité.

Si la patte graphique aurait pu être intéressante – avec ce côté film noir / slasher pas forcément désagréable à l'oeil, l'on reste quand même face à une déferlante de nuances de noir et de gris qui se prend trop au sérieux pour n'être autre chose qu'un simple choix arbitraire, parce que le noir c'est super subversif.

Il ne faut pas être dupe : la violence dans le jeux vidéo est bien réelle, souvent gratuite, et parfois utilisée comme argument de vente.

Mais quand la violence devient l'unique argument de vente d'un produit culturel, quel qu'il soit, il convient de se poser quelques questions – sous peine d'être pris pour des vaches à lait par des producteurs peu scrupuleux qui insultent l'intelligence des consommateurs en faisant dans la surenchère permanente, dénuée d'efforts réels.

Hatred fait définitivement partie de ce genre de jeu contre lesquels il faut voter avec son portefeuille. Et l'abstention est, pour une fois, une voie valable.

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