Grèce : un coup d'Etat militaire est-il possible ? <!-- --> | Atlantico.fr
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L'annonce de l'armée grecque qui avait indiqué qu'elle n’accepterait pas d'être instrumentalisée par le gouvernement a sans doute effrayé les responsables politiques
L'annonce de l'armée grecque qui avait indiqué qu'elle n’accepterait pas d'être instrumentalisée par le gouvernement a sans doute effrayé les responsables politiques
©Flickr / benjamin_mercadier

Chaos

Vote de confiance ce vendredi au Parlement grec. Le gouvernement de Georges Papandréou menacé. L'Etat-major de l’armée grecque limogé il y a plusieurs jours. La situation dans le pays peut-elle encore se dégrader ?

Georges Prévélakis

Georges Prévélakis

Georges Prévélakis est professeur de géopolitique à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. 
Il est spécialiste franco-grec de géopolitique. Il a signé Géopolitique de la Grèce (Complexe, 2005)

 

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Atlantico : Vote de confiance ce vendredi au Parlement grec. Le gouvernement de Georges Papandréou est menacé. La situation particulièrement floue. Par ailleurs, l’ensemble de l’Etat-major de l’armée grecque a été limogé il y a quelques jours. Existe-t-il un risque sérieux de coup d’Etat militaire en Grèce ?

Georges Prévélakis : Il y a une semaine, j’aurais répondu sans hésiter qu’il n’existe aucun risque de coup d’Etat militaire. Aujourd’hui, ma position est plus nuancée. Mais à première vue, je dirais que le risque demeure faible.

Si cette modification de l'Etat-major suscite des interrogations, il est néanmoins très difficile d’imaginer un coup d’Etat. L'annonce de l'armée grecque qui avait indiqué qu'elle n’accepterait pas d'être instrumentalisée par le gouvernement a sans doute effrayé les responsables politiques au pouvoir. Il s’agirait donc moins d’un coup d’Etat, que d’une mainmise sur l’armée.

Le changement d’Etat-major de l'armée peut être interprété de deux façons :

  • Le gouvernement grec doute du soutien de l'armée et veut assurer la stabilité de son pays. En effet, l'armée grecque a annoncé qu’elle n’interviendrait pas en cas d'émeutes ou de troubles.
  •  Il peut également s'agir d'une mainmise du clan politique sur l’armée pour se protéger lui-même et pour imposer sa volonté politique par la force.


Observez les événements qui ont eu lieu lors du printemps arabe, l’armée est restée neutre. L'Etat grec ne voudrait pas se trouver dans une situation similaire, avec une armée qui refuse d'intervenir.

Je crois que ce changement d’Etat-major a été un peu surestimé par les médias français, parce que le souvenir de la dictature des colonels est encore très prégnant en France. Cependant, je ne suis pas définitif, car nous sommes dans une situation tellement imprévisible, avec un Premier ministre qui se bat pour une survie politique, mobilisant tous les moyens dont il dispose.

Les choses évoluent très rapidement, nous avons le sentiment que nous sommes au milieu d’une crise grave où rien n’est prédéterminé et où tout devient possible.

Le leader de l’opposition, Antonis Samaras - chef du parti de droite La Nouvelle Démocratie - a fait un certain nombre de propositions : des élections immédiates, un gouvernement de transition et a souligné la nécessité de voter tout de suite le plan de sauvetage. Ainsi, les Grecs éviteraient de détériorer leurs rapports avec l’UE. Problème : Georges Papandréou accepte le vote pour le plan de sauvetage, mais rejette le gouvernement de transition. Les relations avec Papandréou deviennent donc difficiles.

Ce vendredi aura lieu le vote de confiance. L’idée de référendum est abandonnée puisque Papandréou ne dispose ni du soutien de l'opposition ni de celui de l'essentiel de son propre parti. Papandréou joue donc désormais sur deux tableaux : soit la confiance est votée et il est prolongé pendant un temps relativement court, soit la confiance n’est pas votée et il pourra se débarrasser de ses adversaires à l’intérieur du Parti. Il perdrait alors le pouvoir, mais garderait la direction du Parti socialiste grec.

Comment jugez-vous la demande de référendum du Premier ministre grec George Papandréou ? Il semble aujourd'hui prêt à y renoncer. A-t-il agi dans la précipitation ?

Je crois qu’il a agi sous la pression parce qu’il vit l’effondrement de sa vie politique, de son parti, et même de sa fortune familiale. La famille Papandréou est une véritable dynastie. Pour le Premier ministre il est délicat d’assumer qu’avec lui, c’est le règne de toute sa dynastie familiale qui prend fin. Il a même évoqué une possible guerre civile !


Historiquement, peut-on dire qu’il existe en Grèce une tradition de coups d’Etat militaires ?

Au contraire, la dictature des colonels (1967-1974) a vacciné les Grecs contre les régimes autoritaires. Il existait une tradition du coup d'Etat jusqu'à cette période. Cette coutume politique a été brisée par la manière sévère dont le Premier ministre Karamanlis a puni les anciens dictateurs.

L’armée a tiré les leçons de la dictature des colonels. Ces derniers ont été emprisonnés. L’objectif du Premier ministre Karamanlis était de démontrer qu’on ne pouvait monter un coup d’Etat sans en payer les conséquences. Je crois qu'ila réussi son action. 

Aujourd'hui, l’armée n’est pas capable de mener un coup d’Etat et Papandréou ne peut en donner l’ordre. Du côté de la population, la situation pourrait devenir explosive, mais pas dans l’immédiat.

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