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FMI, Hollande et Moscovici : un feu d’artifice de contradictions.
FMI, Hollande et Moscovici : un feu d’artifice de contradictions.
©Reuters

L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Le rapport du FMI, l’audition de Pierre Moscovici au Sénat et le discours d’autosatisfaction de Hollande à Carcassonne : on vient de battre un record de contradictions, d’erreurs et de mensonges. Un spectacle surréaliste et indécent.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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En 24 heures, nous avons eu droit aux prévisions savonneuses du FMI, à la déposition de Pierre Moscovici en total porte-à-faux devant des Sénateurs médusés et aux propos trop rassurants d’un président de la République désormais en campagne. Si après ces tonnes d’affirmations sur le thème "tout va mieux comme prévu", les Français comprennent quelque chose à l’économie...

Mieux, si les Français retrouvent confiance en leurs politiques pour gérer les affaires de l’Etat, ça tiendra du miracle. Les élites françaises avaient rarement sorti autant d’hypocrisie et de mensonges en matière économique.

Tout d'abord, Le FMI a, encore une fois, trempé dans les contradictions et l’arrogance. Le FMI a achevé hier sa mission d’évaluation annuelle à Paris. Ses conclusions sont simples : "ça va mieux mais ça peut ne pas durer".

Ca va certainement mieux pour les milieux financiers, mais ce n’était pas le sujet. Et puis, ça pourrait ne pas durer, à moins que le gouvernement fasse un petit effort de réforme sur le marché de l’emploi. Les vents extérieurs peuvent ne pas porter au-delà de l’année prochaine, dans ce cas, la reprise sera sans emplois. 

Le point essentiel du rapport, c'est que le FMI maintient une prévision de croissance à 1,5% pour 2015. C’est évidemment le chiffre que les dirigeants socialistes vont brandir au congrès pour prouver que tout va bien et que la politique conduite par le président de la République est la bonne. On y reviendra.

Le FMI est écouté et relayé comme la Pythie qui dans l’antiquité grecque jouait l’oracle. C’est-à-dire que le FMI parait crédible quand ses conclusions peuvent servir une ambition politique et c’est évidemment le cas.

C’est assez incroyable, parce que le FMI n’a pas cessé de se tromper. En 2007, il félicitait les pilotes de l’économie américaine pour l'intelligence de leur politique des subprimes. On connait la suite... L’année suivante, les économistes, pilotés par le meilleur d’entre eux, Olivier Blanchard, donnait en exemple le dynamisme de la  politique immobilière espagnole. On connait l’état de la situation aujourd'hui.

Le FMI a été le premier à recommander des politiques d’austérité budgétaires puis des politiques structurelles et, deux ans plus tard, à s'étonner que les banques centrales ne soient pas plus généreuses. Sur la Grèce, n’en parlons pas, le FMI est intervenu. Il reproche maintenant à l’Europe d’appliquer les mesures qu'il avait lui-même préconisées.

u passage, le rôle du FMI en Europe est la preuve de la fragilité de l’Union Européenne. Est-ce que le FMI est intervenu aux Etats-Unis pour voler au secours de la Californie quand elle est tombée en faillite ? Non ! Depuis dix ans, le FMI campe dans toutes les capitales européennes. Ça fait longtemps que les pays de la zone euro auraient dû renvoyer le FMI à ses fondamentaux.

Aujourd'hui, le FMI nous promet un retour de la croissance grâce principalement à la BCE et contre une politique d’austérité qu’il avait lui-même prescrite. A croire que l’équipe FMI chargée de l’évaluation de la situation française prend ses infos à Bercy et oublie d’harmoniser ses diagnostics avec les autres évaluations qui sont faites à Washington.

Si les Français du congrès socialiste veulent croire leurs élus quand ils s’appuient sur le FMI, libre à eux. Mais qu’ils ne viennent pas se plaindre si l'on n’a pas les moyens de délivrer des promesses extravagantes. 

Ensuite, le faux-aplomb de Pierre Moscovici a laissé pantois tous les observateurs. Auditionné hier devant le Sénat pendant toute la matinée, Pierre Moscovici sans l’ombre d'un doute a resservi le discours européen. A savoir que la France doit réaliser des efforts importants pour retrouver le chemin de la croissance, réduire ses dépenses budgétaires et engager des réformes de structures sur l’emploi et la fiscalité.

Il a même reconnu qu’il avait un problème dans les engagements budgétaires de la France. Le téléphone a certainement sonné entre Bercy et Bruxelles dans l’après-midi. Les socialistes purs et durs faisaient la tête et les socio-libéraux se marraient.

Pierre Moscovici dit vrai, mais ce qui le met en porte-à-faux, c’est que les conseils qu'il donne aujourd'hui publiquement sont exactement ceux qu'il refusait d’appliquer quand il était à Bercy. Beaucoup se demandaient au bout de combien de temps le nouveau Commissaire ferait son mea culpa. Et bien c’est fait, il a changé de discours mais pas une once de regrets sur la politique passée dont il était responsable.

Enfin, le bouquet final nous a été envoyé de Carcassonne par François Hollande qui s’est livré à un festival d’autosatisfaction devant des militants socialistes. En gros, "j'essuie beaucoup de critiques, mais j’ai le cuir épais et la conscience tranquille. J’ai fait ce que j’avais dit que je ferai lors du discours du Bourget et tout s’est passé normalement". Entre les lignes, on va donc pouvoir donner un peu d’air au contribuable dans le budget 2016, celui qui sera appliqué en 2017, l'année de la présidentielle.

Ce discours est extraordinaire et les hommes d’affaires qui l’ont reçu n’en reviennent pas. François Hollande n’a pas réalisé les objectifs d’emplois qu’il avait promis, tout le monde le sait. Le frémissement de la croissance est venue non pas de sa politique mais des vents extérieurs. Mais le Président ne va pas s’arrêter à ce genre de détails, les vents soufflent dans le bons sens et la France sait hisser les voiles.

Passons sur toutes les réformes sociétales, il les a faites parce qu’il les avait promis. Il a même terrassé l’ennemi "la finance internationale". Qui peut croire un tel discours ?

François Hollande sait citer le FMI quand ce dernier écrit la partition dont il connait le refrain, il rappelle que l’Europe a changé sous la pression de la diplomatie française et que la BCE est enfin devenue responsable.

François Hollande oublie simplement de dire que la politique monétaire a gonflé les actifs financiers, les riches sont donc devenus plus riches, en espérant qu'ils investissent, ce qui n’est pas encore le cas. Il oublie de dire que la petite croissance ne génère pas d’emplois, que le chômage n’a pas cessé de croitre.

En Europe, il oublie tout simplement de dire que les deux pays les plus puissants, la Grande-Bretagne et l’Allemagne ont quasiment le plein emploi avec des politiques de réformes courageuses et douloureuses. Il oublie que ces deux pays ont réélu leurs dirigeants. Angela Merkel et David Cameron. L’Europe qui marche a voté pour l’austérité, les réformes libérales et l’adaptation au monde qui évolue. Et l’Europe qui marche, a aussi voté pour l’emploi.  

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