Pourquoi les nantis de notre République ne feront jamais les efforts d'austérité réclamés par Bruxelles<!-- --> | Atlantico.fr
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Un poste plus payé encore que celui du représentant à l’UNESCO (8K par mois+primes+chauffeur), c’est celui d’ambassadeur pour les pôles Arctiques et Antarctiques, occupé actuellement par Michel Rocard (ici en illustration).
Un poste plus payé encore que celui du représentant à l’UNESCO (8K par mois+primes+chauffeur), c’est celui d’ambassadeur pour les pôles Arctiques et Antarctiques, occupé actuellement par Michel Rocard (ici en illustration).
©Reuters

Les entrepreneurs parlent aux Français

Contrairement à l'Angleterre ou à l'Espagne, nos politiques ne feront jamais les efforts de remise à niveau nécessaires, car leurs privilèges exorbitants et connus de tous offriraient alors un contraste trop insupportable aux Français mis au régime de l'austérité.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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L’avantage d’une mauvaise météo, c’est le temps qu’elle aménage pour la lecture. Effrayé de la hauteur de la pile des magasines restés dans l’attente de mon attention, et craignant qu’elle ne finisse par devenir immeuble par destination, comme disent les juristes, j’ai tendu ma main vers ladite pile, coincé le coussin du voyageur aérien pour préserver mes vertèbres fragilisées par la pratique impudente, après 45 ans, de la boxe. J’y suis alors venu, j’ai lu et j’ai chu.

Je suis tombé, au sens propre et figuré du terme, sur plusieurs articles, de ceux qui émaillent et provoquent leur petite émotion sur le moment, sans rien changer sur le long cours. Ces articles qui scandalisent et révoltent, mais comme le soufflé, retombent vite si on ne les consomme pas immédiatement, si l’on ne se met pas en action aussitôt. Jusqu’au prochain. Qui provoquera la même émotion, le même frisson de révolte nécessaire chez notre Français prompt au démarrage, mais moins persévérant sur la durée. Pour réaliser, que malgré le signal, malgré la dénonciation, le petit scandale vit très bien sa vie scandaleuse, au grand jour et malgré les doigts pointés de la presse, sous le regard bienveillant de la République.

Certains en ont fait un fonds de commerce. François de Closet notamment. D’autre une obligation institutionnelle, comme la Cour des Comptes. D’autres encore, avec talent, en font un assemblage, qui démontre notre intolérable et indécrottable besoin de maintenir en France les privilèges, de préserver ainsi une culture qui explique que la dépense publique représente encore 57% de notre PIB (Agnès Verdier-Molinié par exemple).

Et malgré toutes ces piques tendues vers le palais royal, aucune tête ne se dirige, portée à leurs bouts, vers la Bastille. Et les privilèges s’éternisent.

J’égrenais donc ce matin, avec effarement, divers articles, qui se fendaient d’un inventaire à la Prévert (et des pas mûres, pour faire un jeu de mot à la "de Groot"), des avantages maintenus pour caser nos politiques et autres personnalités, et leur assurer une retraite paisible pour les remercier de leurs bons et loyaux services. Bien que ces services aient plus servi leurs intérêts que ceux des Français. Bref, c’est le cercle des pilleurs apparus… et maintenus. Les petits crimes entre amis sont toujours plus sympathiques.

L’un des articles reprenaient ces dizaines de comités Théodule, que l’on retrouve avec un intitulé différent et une fictivité identique, depuis des années dans les couloirs annexes de nos institutions.

Par exemple, nombres de personnalités, qualifiées bien entendu, des sportifs, des artistes, d’ancien anarchistes reconvertis aux bienfaits de l’ordre établi, y sont inscrits, pour un salaire minimum de 2800 euros par mois et une retraite confortable (bénéficieront-ils de la pénibilité ? Faire du copier-coller ou ne pas s’endormir en séance plénière représente un effort considérable qui perturbe le rythme physiologique, non ?) au CESE. Une instance bien utile certes, puisqu’elle a été consultée 4 fois en 6 années. Coût annuel : 23 millions d’euros. De quoi financer 46 start-up innovantes.

Et écoutez la poésie qui présida à la naissance de ces intitulés magnifiques : Conseil Economique de la Nation, Conseil d’Analyse Economique, Commissariat Général à la Stratégie et Prospective (depuis rebaptisé), Haut Conseil des Finances Publiques, Conseil d’Analyse Economique (non, non, ce n’est pas le même que le CEN), le Conseil d’Orientation pour l’Emploi, dont l’impact semble évident au vu des chiffres du chômage, etc etc etc… Un poste plus payé encore, plus que le représentant à l’UNESCO (8K par mois+primes+ chauffeur), c’est celui d’ambassadeur pour les pôles Arctiques et Antarctiques, occupé actuellement par Michel Rocard. Etant donné les températures enregistrées sous ces latitudes, le salaire "abracadabrantesque" attribué à ce poste "stratégique" a heureusement de quoi réchauffer son titulaire…

Ils font, ou plutôt, ils ont tous la même non-activité et la même non-production, pour une même non-utilité, mais, et c’est là que réside leur intérêt, ne portent pas le même nom. Et n’abritent pas les mêmes personnes. Ces cercles peuvent rapporter à leurs bénéficiaires jusqu’à 15K par mois. Hors frais bien sûr, car avec 15K par moi, comme le veut l’expression, "t’as plus rien" !

Un autre article faisait le point sur la promotion Voltaire. Celle de notre président de la République, ennemi de la Finance, celui qui, parmi la litanie de 45 minutes sur ce que le "Moi Président" allait faire, et on allait voir ce qu’on allait voir, nous assurait de la fin des privilèges et des nominations arbitraires. Pour le moment, les chiffres semblent démontrer qu’il a manqué de temps pour s’attaquer au problème et qu’il sera urgent de s’y coller lorsque que ses hommes auront été placés. Car Voltaire, qui ne détestait pas la protection des grands, y retrouve bien son compte. Tous les amis du président, dans une tradition dite "républicaine", au sens bananier du terme, sont largement récompensés d’avoir choisi cette date pour faire l’ENA. Cette école prouve qu’il n’y a pas que le loto pour devenir "riche". La liste des heureux bénéficiaires de la loterie Voltaire est affichée dans tous les bons articles de vos magasines préférés (Jouyet, Lemas, Colmou…).

Voilà de quoi meurt la France. Une France à deux vitesses. Non pas celle des riches et des pauvres. Non pas celle des patrons et des ouvriers. Celle des nantis du capitalisme que la gauche aime donner en pâture au peuple, qui n’y croit plus et vote au FN. Celle de la royauté d’Etat, qui insulte la Révolution de ses ancêtres et s’attribuent les restes du fromage, à la barbe du peuple.

Certainement la raison pour laquelle la France prononce le mot d’austérité avec hésitation et surtout, sans lui donner de matérialité. Nous n’avons et ne ferons jamais avec ces hommes-là, à droite comme à gauche, (les pratiques sont uniformément partagées), les efforts de remise à niveau que l’Allemagne et l’Angleterre, et plus récemment l’Espagne, ont faits. Jamais. Car leurs privilèges offriraient alors un contraste insupportable aux Français ainsi mis au régime. Et en terme de régime, nos politiques préfèrent l’ancien (comme pour leur appartement de fonction).

Alors ils réforment à la marge, afin que leurs petits secrets, leurs grands privilèges, leur soient maintenus, comme une prime à la lâcheté. Car la réforme dure est garante d’un avenir radieux, pour une France créative, ambitieuse, et capable de miracle, et qui meurt étouffée par la culture de l’acquis que cette classe politique essentiellement "pourrie" (malheureusement, chaque lecture des jours pluvieux nous le rappelle), qui n’a d’intérêt général que le sien. Son intérêt, en général !

Mon article de ce jour sera un reflet de plus de l’écœurement face à ces pratiques. Mais demain, après-demain, il sera oublié. Jusqu’au prochain. Devrons-nous devenir les "Femen" du scandale républicain et nous exhiber moitié nus, comme ces malades extrémistes, à l’Assemblée nationale, Sénat, CESE, Bercy ou à l'Institut du Monde Arabe (à la réflexion non, Lang risquerait d’aimer cela, c'est très "Gay pride" dans l’esprit) afin de provoquer un 1789 pour faire tomber les privilèges de nos petits roitelets ? Nous qui avons fait les pigeons, il serait temps, enfin, de leur voler dans les plumes. Chiche ?

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