Mea culpa : Macron reconnaît le désastre économique qu'aurait pu provoquer la taxe à 75% (et ce qu'elle nous coûte encore)<!-- --> | Atlantico.fr
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Le ministre de l’Économie Emmanuel Macron a déclaré que "la taxe à 75 % était une grosse erreur".
Le ministre de l’Économie Emmanuel Macron a déclaré que "la taxe à 75 % était une grosse erreur".
©Reuters

Question d'attractivité

Interrogé récemment par la presse américaine, le ministre de l’Économie Emmanuel Macron a déclaré que "la taxe à 75 % était une grosse erreur", et il a bien raison.

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan est consultant en stratégie et président d’une association qui prépare les lycéens de ZEP aux concours des grandes écoles et à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

Avocat de formation, spécialisé en droit de la concurrence, il a été rapporteur de groupes de travail économiques et collabore à plusieurs think tanks. Il enseigne le droit et la macro-économie à Sciences Po (IEP Paris).

Il écrit sur www.toujourspluslibre.com

Twitter : @erwanlenoan

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Emmanuel Macron est un socialiste atypique : généralement plus pragmatique qu’idéologique, il vante les bienfaits du capitalisme (aujourd’hui encore dans le Wall Street Journal) et s’emploie à reconstruire ce que François Hollande a détruit au début de son mandat (la tâche est vaste !). En matière de fiscalité, l’analyse du ministre de l’Economie est aussi peu commune à gauche : interrogé récemment par la presse américaine, il a déclaré que "la taxe à 75 % était une grosse erreur". Il a évidemment raison !

La fiscalité, surtout lorsqu’elle devient confiscatoire, a des effets nuisibles et néfastes sur la croissance, donc la production de richesse, et in fine sur la redistribution qu’elle est sensée servir. Dans une économie internationale, elle est même un facteur clé pour attirer – ou repousser – les investisseurs et les talents. Savoir les faire venir est d’autant plus important que l’innovation est essentielle dans l’économie contemporaine : pour s’en rendre compte, il suffit de voir la Silicon Valley et d’y mesurer la proportion de créateurs étrangers qu’elle accueille.

La concurrence est réelle et intense entre les principales villes du monde pour attirer ces profils si spécifiques. Chacun se souvient que David Cameron, le Premier ministre britannique, avait promis de dérouler le tapis rouge aux entreprises françaises après l’élection de François Hollande. Le dynamique maire de Londres, Boris Johnson, avait dénoncé pour sa part la "tyrannie" fiscale socialiste et clamé : "je suis prêt à accueillir tous les Français talentueux à Londres". Les deux ont évidemment été entendus : les départs ont été nombreux. Londres serait la 6e ville de Français dans le monde.

Les travaux économiques illustrent cet effet de la fiscalité sur l’attractivité d’un pays pour les talents.

Une étude connue (réalisée par des co-auteurs de Thomas Piketty, le célèbre militant de la taxation tous azimuts) a porté sur le Danemark. En 1992, ce pays avait adopté un régime fiscal préférentiel pour les chercheurs et salariés étrangers à hauts salaires pour les attirer. Les effets ont été nets et significatifs : les publics ciblés sont venus en masse dans le petit pays du Nord (leur nombre a doublé) !

Une autre recherche s’est intéressée aux régimes fiscaux des footballeurs en Italie et en Espagne. Ce dernier pays a adopté en 2005 un régime fiscal très favorable, dit "loi Beckham" - du nom du joueur britannique. L’effet, là aussi a été immédiat et clair : le nombre de joueurs étrangers exerçant en Espagne a augmenté alors qu’il n’a cessé de décroître en Italie.

Un dernier travail vient d’être réalisé, précisément sur les effets de la fiscalité sur les innovateurs les plus talentueux (superstars inventors). Les conclusions sont claires : ils "sont significativement affectés par les taux de fiscalité quand ils décident de l’endroit où ils souhaitent vivre". Dit autrement : les innovateurs fuient les pays qui ont une fiscalité très lourde. Selon les auteurs, si la France baissait son taux marginal de 72 % à 62 %, elle pourrait garder 6 % de ses inventeurs et attirer 56 % d’inventeurs étrangers en plus ! Cela aurait évidemment un effet sur la croissance !

Emmanuel Macron a donc évidemment raison : la taxe à 75 % a été une grosse erreur. Elle pourrait même avoir été un désastre économique. Surtout, alors que la France ne passait déjà pas pour être le pays le plus "business-friendly" d'Europe, cette initiative catastrophique de François Hollande a renforcé une image négative de notre pays dans les milieux économiques et certainement auprès des innovateurs, des créateurs, des entrepreneurs, de ceux qui inventent la richesse et le monde de demain. Cet épisode de communication de campagne nous a coûté très cher.

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