Quand les Chinois répliquent des monuments célèbres pour mieux affirmer leur puissance (ou leur manque d’idées ?)<!-- --> | Atlantico.fr
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Une imitation de Paris grandeur nature
Une imitation de Paris grandeur nature
©Reuters

It's a Small World

La mode des reproductions de villes et de monuments ne cesse de croître en Chine. Mais ce n'est pas forcément un hommage aux Occidentaux.

Une tour Eiffel, un Colysée, des fontaines de Versailles et même une réplique de Manhattan. Les Chinois débordent de cartes postales lorsqu'il s'agit d'aménager leurs villes. Dans tous le pays, des clins d'œil monumentaux aux grandes villes européennes ou américaines sortent de terre, parfois en plusieurs exemplaires. Des Tour Eiffel d'une centaine de mètres existent ainsi à Shenzhen, ville de 10 millions d'habitants ainsi qu'à Hangzhou, située à quelques encablures de Shangani. Mais au pays de la conte-façon, c'est la Maison Blanche qui s'exporte le mieux avec plusieurs répliques de différentes échelles, disséminées sur tout le territoire.

Et les Chinois ne s'arrêtent pas là. Certaines villes sont même des copies quasi-conformes d'entités existantes. En témoigne ce quartier de Shanghai qui reprend tous les codes des rues bourgeoises de Londres où même les policiers sont habillés comme les gardes de Buckingham. Ou encore, ce petit village alpin aux faux-airs de Suisse ou d'Autriche. A quelques centaines de kilomètres au sud de Pékin, c'est une réplique de Manhattan qui sort de terre pour un nouveau quartier d'affaire. Tianjin se permet même d'être plus vaste que son modèle



L'architecte Bianca Bosker est partie à travers la Chine pour comprendre ce phénomène. Car au delà de la fascination que peuvent avoir les Chinois pour Venise ou Paris, un tel amoncellement de copies cache un sentiment plus nationaliste. "Beaucoup de Chinois ont mis les économies de toute une vie pour s'offrir une réplique maison" assure-t-elle à The Atlantic. "Ils en sont très fiers." Quand bien même l'imitation apparaît grossière voire kitsch, la fascination est sans limite et rétablit de facto des "classes aristocratiques" que le communisme a tenté d'effacer. "Les riches voulaient un moyen de mettre en valeur leur patrimoine. Chose qu'ils ont le droit de faire dans la Chine moderne, mais qui aurait été impossible sous Mao," expliquent au Pacific Standard, Sebastian Acker et Phil Thompson, deux architectes très actifs en Chine. Jean-François Doulet, maître de conférences à l'institut d'urbanisme de Paris et spécialiste de la Chine renchérit. "Les promoteurs n'hésitent pas à différencier leurs produits en créant des styles pastiches accrocheurs sensés flatter un certain penchant pour "ce qui brille” ; c'est une question de statut." Plus qu'un hommage, il s'agit donc avant tout de se montrer."Tout le monde est d'accord pour dire que Paris est magnifique" affirme Bianca Bosker. "Mais ces répliques, c'est une surtout une façon de dire : Nous pouvons le faire nous-mêmes".



Mais au-delà de la fierté de certains habitants, les villes ou quartiers peinent souvent à remplir des appartements et les maisons. Ni vraiment occidentaux, ni vraiment chinoises, ces répliques accumulent les mauvais choix comme à Anting, une ville pseudo-allemande où les constructions ne respectent même pas les principes d'orientation du Feng Shui, chers aux Chinois. L'imitation de Paris avec ses immeubles haussmanniens n'a convaincu que 30 familles sur les 10 000 places prévues. Tant pis, le plus important est que la Chine soit capable de faire autant que ses voisins, même éloignés. "Ce sont des monuments à la Chine" insiste Bianca Bosker. "Une Chine devenue si riche qu'elle peut se permettre d'avoir sa propre 'Ville des lumières'". Quitte à ne pas la remplir. "Reproduire des monuments ou des styles marquants en provenance des pays occidentaux, c'est affirmer aussi que la Chine est aujourd'hui ouverte aux influences du monde entier," souligne Jea-François Doulet.

Une démonstration qui se heurte à un principe mal-aimé en Chine : la propriété intellectuelle. La réplique du Sphinx égyptien, installée près de la frontière mongole, sera ainsi détruite après une plainte des autorités égyptienne. La tour Eiffel restera mais pas son éclairage, lui aussi déposé. Mais selon Bianca Bosker, les répliques ne sont qu'une étape. "Si les architectes chinois font des répliques actuellement, cela va aussi leur permettre de développer plus rapidement leur créativité, après les années d'atrophie architecturale sous Mao." Les Chinois, de simples imitateurs ? Un jour, ce seront peut-être les occidentaux qui viendront visiter les villes du futur en Chine. 









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