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FIAC : à quoi pensent les artistes 
et autres collectionneurs 
d'art contemporain ?
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The artists

Attendue par certains, méprisée par d'autres, la Foire internationale de l'art contemporain ouvre ses portes ce mercredi à Paris. Visite guidée d'un milieu méconnu pour tenter de mieux le comprendre...

René Gimpel

René Gimpel

René Gimpel est marchand de tableaux.

Petit-fils de l'un des plus grands marchands de tableaux et collectionneurs d'art de l'Entre-deux-guerres, il exerce à Londres et est le fondateur d'une galerie à Paris.

Il a par ailleurs dirigé la publication de Journal d'un collectionneur. Marchand de tableaux (Hermann, 2011)

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La tenue de deux puissants salons - Frieze à Londres la semaine dernière, la FIAC ces jours-ci à Paris - donne à s'interroger sur les artistes contemporains.

A travers les crises économique et financière qui secouent le monde, le marché des beaux-arts continue son petit train-train semblant léviter avec sérénité au-dessus des remous d'en bas, telle la montagne russe des bourses. Mais derrière ce marché de tableaux, il y a d'abord les artistes.

La création forge un artiste

Depuis plusieurs générations, à la fois dans la théorie et dans leur pratique, les artistes se méfient des règles de leur vocation quand ils ne les rejettent pas tout court. Ainsi, les mille et une règles des académies prescrivaient le travail de l’artiste, au millimètre près. Ceux qui ne s’y pliaient pas étaient barrés des salons, et donc de l’appui des mécènes et de l’Etat. Cependant, un peu après 1850, survinrent les impressionnistes, suivis entre autres par les cubistes et les surréalistes, pour ne citer que les grands mouvements d'avant-guerre ; depuis 1945, l’art s’épanouit en de multiples tendances, dont les peintres abstraits de tous genres, l'art conceptuel, etc…  Un moment, le modernisme a imposé une issue à cette mêlée, y voyant une direction, si latente qu'elle soit, une chronologie de mouvements artistiques toujours en progrès et atteignant un sommet, la fin de l'histoire de l'art, dans le courant des années 1960. Puis survint le découragement, voire même l'effondrement de cette certitude, avec le glas sonné par les tenants du postmodernisme.

Aujourd'hui, tout le monde peut devenir artiste. Toute pratique créative qui se réclame artistique, l'est. Je peins / sculpte / filme / photographie donc je suis artiste. Mais ne nous méprenons pas : c'est un leurre.  Car hormis quelques cas exceptionnels, comme l'autodidacte Francis Bacon, la liberté offerte à quiconque de devenir artiste, ne concerne en réalité que ceux qui sont passés par les écoles de beaux-arts. Et pour cause. Les heures de recherches, d'études, de bricolages surveillés, dans les ateliers de nos écoles de beaux-arts, ne sont pas gaspillées. 

A première vue, l’œuvre de l’artiste peut apparaître banale, voir frauduleuse, pour un public qui mesure la valeur artistique à partir d’une idée de compétence qu’il puise chez les maîtres classiques de la peinture. Ce public oublie que les jeunes artistes qui ont suivi des années d’études dans les écoles de beaux-arts ont, eux-aussi, absorbé les leçons de ces maitres. Ils intègrent parfaitement l’inspiration des chefs-d’œuvre des siècles d’antan, seulement ils ont compris que le rôle de l’artiste, ainsi que son travail, ont un but tout autre. 

De fait, les jeunes artistes sont maitres absolus de la production d’images, utilisant pour cela une vaste gamme de moyens. Par-dessus tout, leur production artistique échappe à tout contrôle, surtout celui des médias. Attention à celui qui pense pouvoir récupérer à ses fins la production artistique de quiconque. L’artiste est anarchiste malgré lui. Il vous échappera.

Le collectionneur et l'artiste, si proches... mais si différents

Si n'importe qui peut devenir artiste - à condition d'avoir étudié dans ces écoles qui, tout en les formant et les diplômant, savent que leur élèves échapperont à leur "joug" dans une oscillation en mouvement perpétuel - qu’en est-il des collectionneurs ?  Tout le monde peut collectionner, mais rares sont les propriétaires d’une collection qui en méritent le titre. Là aussi, le travail s'impose. Une certaine tendance, un certain mouvement artistique, voire une époque contemporaine vous attirent, mais si vous ne faites pas vos devoirs, vous vous retrouverez avec des pièces médiocres, qu'importe le prix. Les devoirs, c’est un travail qui s’approfondit au fur et à mesure que le collectionneur prend connaissance des valeurs attribuées aux artistes ou aux mouvements qui l’intéressent. 

Prenons l’exemple, au hasard, de l’art optique. Pour ne citer que le nom de Vasarely, le collectionneur qui souhaite en former une collection, doit étudier la carrière de l’artiste, apprendre pourquoi une époque en vaut plus qu’une autre ; se demander si une huile sur toile d’année X est meilleure qu’un collage d’année Y ; se demander à quel point une œuvre endommagée réduit sa valeur tant artistique que monétaire, mais aussi si une restauration éventuelle ne nuirait pas à l'une de ces valeurs. Puis s'interroger : où se situe Vasarely dans la courbe des artistes de cette tendance, à quelle époque est-il considéré en avant-garde des autres praticiens de ce genre et, au contraire, dans quelles années piétine-t-il ?

Le collectionneur qui commence par se dire « je place mes fonds dans les grands noms, les valeurs sures de la production artistique », finit par aimer la poursuite des œuvres insaisissables, les chassés croisés auprès d'un tableau dont on a ouï dire qu'il sort d'une collection et serait à vendre. De plus, pour ces hommes et femmes qui vivent et travaillent dans une atmosphère éloignée du chaos, de la passion, de l'anarchie et de la vie bohème des artistes, il y a le frisson de partager, ne serait-ce que par contumace, ce milieu qui fascine.

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