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Crash de l'A320 : l'explication des psychiatres qui permet de comprendre le suicide d'Andreas Lubitz.
Crash de l'A320 : l'explication des psychiatres qui permet de comprendre le suicide d'Andreas Lubitz.
©Capture d'écran

Hypothèses

Pour certains, le copilote a commis un "suicide altruiste", entrainant les passagers du vol sans sa chute en pensant les libérer tandis que pour d'autres, il n'était qu'un égoïste, dépourvu de toute considération pour l'existence de son prochain.

David Gourion

David Gourion

David Gourion est médecin psychiatre à Paris. Il est l'auteur avec le Pr Henri Loo de Guérir de la dépression : Les nuits de l'âme (Odile Jacob) et de Le meilleur de soi-même: empathie, attachement et personnalité (Odile Jacob).

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Alors que la thèse du suicide du copilote de l'A320 qui s'est écrasé dans les Alpes mardi 24 mars est de plus en plus probable, les experts s'interrogent sur ce qui aurait pu pousser Anderas Lubitz, jeune homme de 28 ans, à entraîner dans sa chute les 150 passagers de son avion.

Interrogé sur BFMTV,  le psychiatre Patrick Légeron, spécialiste du stress professionnel à l'hôpital Sainte-Anne Paris a évoqué ce jeudi 26 mars la théorie du "suicide altruiste", "c'est à dire un suicide dans lequel on met fin à sa propre vie mais où on entraine la vie des autres en pensant qu'on les libère. On a vu ça dans des cas de faits divers où par exemple un parent se donne la mort après avoir entrainé ses enfants ou son conjoint. Cela intervient dans des cas de dépressions très graves, très mélancoliques comme nous les appelons mais aussi dans des dépressions assez délirantes dans lesquelles on le sentiment que le suicide va représenter un geste de sacrifice. De sacrifice presque mystique et rituel", a-t-il expliqué.

"La croyance que vous avez quand vous êtes extrêmement déprimé. Plutôt que de vous suicider seul, vous décidez d'embarquer vos proches avec vous. En général il s'agit de parents, qui décident de tuer leurs enfants pour ne pas les laisser seuls dans ce monde atroce", nous a dit le psychiatre David Gourion. "Dans la plupart des cas, ce sont des mères qui viennent d'accoucher et qui souffrent d'une dépression post-partum très intense, elles ont une vision chaotique du monde et ne veulent pas laisser leur bébé derrière elle. Parfois, ce sont des pères, qui entraînent dans leur psychose le reste de leur famille" nous explique-t-il.

Toutefois, concernant le cas précis du crash de l'A320, David Courion estime la théorie du "suicide altruiste" "hautement improbable". En effet, le pilote ne connaissait pas ceux qu'il a tués. "Il s'agit d'un égoïste qui avait un mépris total de tous les autres êtres humains et se fichait de les entrainer dans sa chute. On peut comparer ce cas à celui des automobilistes qui foncent sur d'autres voitures pour se tuer, se fichant complètement de tuer d'autres personnes au passage", analyse donc David Gourion. En effet, les faits divers concernant des personnes dépressives faisant contresens sur l'autoroute pour mettre fin à leurs jours sans se soucier des autres sont malheureusement  courants. En  juillet 2014, par exemple, un automobiliste déprimé à cause d'une histoire de cœur s'est mis à rouler en contresens sur l’A31 à hauteur de Custines (Meurthe-et-Moselle).  Il a perdu la vie, blessant sur son passage dix personnes, dont trois grièvement. En septembre 2013, un chauffard s'est engagé sur l'A71 à contresens, percutant une voiture occupée par deux personnes âgées qui sont mortes sur le coup.

"Ou alors, ce pilote était sujet à des troubles psychotiques et il a pu entendre des voix. On a souvent ce genre de cas en consultations, de patients qui nous racontent qu'ils ont entendu la voix de Jésus les ordonnant de tuer", ajoute David Gourion qui invite également à ne pas abandonner la thèse du kamikaze, les suicides liés au terrorisme étant malheureusement de plus en plus courants. 

Pour le professeur Antoine Pelissolo, président de l'Association française des troubles anxieux et de dépression interrogé par Metronews,  plusieurs possibilités peuvent expliquer ce suicide : le "suicide altruiste", "l'indifférence aux autres pour causes de désespoir personnel profond" et "le désir de vengeance : on ressent un sentiment d'injustice et on punit les autres ". Mais pour le psychiatre ce suicide est incroyable. En effet, "le copilote était suivi de près, aucun élément d'alerte n'est apparu. Alors qu'une maladie mentale grave et chronique n'éclate pas tout d'un coup. S'il a réussi à dissimuler ces éléments, il était très fort pour donner le change ".

En effet, ce jeudi 25 mars, Carsten Spohr de la Lufthansa a tenu à assurer lors d'une conférence de presse qu'"il y a des tests psychologiques quand nous choisissons et sélectionnons nos pilotes. Nous n'allons pas jusqu'à interroger les connaissances et la famille des candidats".

"Quand nous choisissons nos pilotes, nous regardons les capacités mentales des candidats. Nous suivons les recommandations internationales en matière de recrutement et nous sommes fiers d'être si pointilleux. Alors, ce qui s'est passé, c'était tout simplement inimaginable", a-t-il ajouté, précisant : "Andreas Lubitz a suivi une formation à Brême puis à Phoenix -Arizona- puis sa formation s'est interrompue quelques mois il y a 6 ans avant qu'il ne la reprenne. Nous ne savons pas pourquoi, et si la cause en était médicale, nous n'avons pas plus d'éléments car le secret médical prévaut. Il a fait quelques stages puis est devenu 1er officier d'un A320 à son embauche en septembre 2013 (…) Tous les tests médicaux ou techniques ont montré qu'il était 100% apte". "Une fois devenus pilotes, ils ne subissent plus de tests psychologiques mais seulement des examens destinés à tester leurs aptitudes au commandement, s'ils souhaitent devenir commandant de bord."

"Nous sommes sans voix, ici à la Lufthansa, à la Germanwings, nous ne trouvons pas les mots. Nous sommes consternés, bouleversés. Dans nos pires cauchemars, nous n'aurions pas pu imaginer une telle tragédie", a-t-il enfin déclaré, ajoutant avec amertume: "Si on entraîne 149 personnes dans la mort, ce n'est pas un suicide".

                                                                                                                                                                                           Raphaëlle de Tappie

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