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2008-2015, le match Fed contre BCE : les chiffres pour méditer sur le coût de l’immobilisme européen
©Reuters

L'heure des comptes

Si l'Europe et les Etats-Unis sont entrées dans la crise sur les mêmes bases, le continent américain est enfin parvenu à s'en sortir. Sept années qui mettent en évidence le profond décalage de stratégies entre les deux continents.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Après 7 années de crise, les Etats-Unis et l’Europe affichent des bilans économiques opposés. Entre un continent américain qui est revenu au seuil du plein emploi et un continent européen naviguant dans les eaux troubles du chômage de masse et de la croissance zéro, la faille est béante. Mais la composante géographique n’a que peu à voir avec ce différentiel de résultats, et ce sont bien les stratégies économiques mises en place des deux côtés de l’Atlantique qui sont à l’origine, du succès de l’un, et de l’échec de l’autre.

Du côté gagnant, les Etats Unis. Avec un diagnostic de crise qui repose sur une dimension monétaire, et dont les clés sont entre les mains des responsables de la Réserve fédérale, l’économie américaine dépendait essentiellement des actions conjointes de Ben Bernanke et de Janet Yellen. C’est-à-dire des deux Présidents successifs de l’institution monétaire de Washington. En pratiquant une politique macroéconomique ambitieuse et novatrice, les deux personnalités sont parvenues, au son du canon de 3 plans de relance monétaire massifs, dénommés "Quantitative Easing", à revitaliser la croissance américaine.

Du côté perdant, l’Europe. Avec un diagnostic basé sur le niveau d’endettement et le surplus de déficits budgétaires, la zone euro s’est lancée dans une politique macroéconomique de restriction, basée sur le culte de l’austérité. C’est-à-dire une politique qui repose bien plus sur un fondement moral que sur une quelconque réalité économique. Pour la plupart des cobayes, comme la Grèce ou l’Espagne, le niveau de PIB actuel est encore très largement inférieur à ce qu’il était 7 années auparavant. L’immobilisme forcené de la Banque centrale européenne, accompagné de profondes erreurs commises aussi bien en 2008 qu’en 2011, sous la Présidence de Jean Claude Trichet, aura précipité la zone euro dans les filets de la stagnation.

Du point de vue "croissance", le match des deux continents ne fait pas débat. Les Etats-Unis gagnent haut la main, comme cela est "visiblement" perceptible ci-dessous :

Croissance Trimestrielle cumulée à prix courants Zone euro 18 et Etats Unis. T42006-T4 2014

Alors que les deux économies se sont talonnées jusqu’à la mi 2009, et plus largement jusqu’à la mi 2011, le décalage n’a cessé de se creuser depuis lors, au point de créer un gouffre de 14% de croissance courante au total, à l’avantage des Etats-Unis.

Différentiel de croissance à prix courants. Zone euro 18 et Etats Unis. T42006-T4 2014

Et cette divergence de croissance va avoir un impact très significatif sur les niveaux de chômage des deux continents. Avant crise, les Etats-Unis connaissaient une situation proche du plein emploi qui va exploser sous le coup de la récession. Puis, les actions de la Fed ont progressivement distillé leurs effets. Avec une un coup d’accélérateur notable à la fin 2012, lorsque la Fed a choisi de fixer un objectif de taux de chômage à sa politique monétaire.

Taux de chômage. Etats Unis – Europe. Décembre 2005-janvier 2015

Du point de vue européen, le constat reste le même. Et la spectaculaire accélération de la hausse du niveau de chômage à la fin du premier trimestre 2011, perceptible sur le graphique et à l’opposé de la situation américaine, a une cause : alors que les Etats-Unis soutiennent massivement leur économie à coup de milliers de milliards de dollars, Jean Claude Trichet décide d’agir en sens contraire, en relevant les taux d’intérêts de la zone euro. Une décision qui va entraîner la quasi-rupture de la zone euro, la défiance des investisseurs, et l’explosion du chômage. L’Europe fait alors consciemment le choix du chômage, plutôt que de courir le risque imaginaire de l’inflation.

Alors que les taux de chômage respectifs se sont croisés à la fin 2009, le différentiel n’a fait que s’accentuer depuis lors, pour un résultat très défavorable à la zone euro :

Différentiel de taux de chômage Zone euro- Etats Unis. Novembre 2009 – Janvier 2015. %

5.5% d’écart de taux de chômage entre les deux côtés de l’Atlantique. A l’échelle de l’Europe, ce différentiel représente 9 millions de personnes. 9 millions de chômeurs. Ce qui correspond également à l’impressionnant chiffre délivré par les Etats-Unis : 10 millions d’emplois ont été créés outre-Atlantique depuis la fin 2009.

Malgré l’évidente faillite de la pensée économique européenne, les instances de la zone euro continuent d’envisager sérieusement la poursuite de la stratégie menée jusqu’alors. Une lueur d’espoir est apparue le 22 janvier dernier, lorsque Mario Draghi a décidé de la mise en place d’un plan de relance monétaire européen, sur le modèle américain. Plus de 1000 milliards d’euros seront injectés au cours des prochains 18 mois. 7 années sacrifiées sur l’autel de certitudes macroéconomiques éculées. 

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