Contribution sur les hauts revenus : le diable se cache dans les détails<!-- --> | Atlantico.fr
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Sous la pression d’une partie des députés UMP et Nouveau Centre, la contribution sur les hauts revenus a été revue à la hausse.
Sous la pression d’une partie des députés UMP et Nouveau Centre, la contribution sur les hauts revenus a été revue à la hausse.
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Révolution fiscale

Sous la pression d’une partie des députés UMP et Nouveau Centre, la contribution sur les hauts revenus a été revue à la hausse. Au-delà de l’impact financier, c’est une discrète petite révolution fiscale qui s’annonce.

Xavier Petitjean

Xavier Petitjean

Xavier Petitjean est responsable fiscal dans un important groupe mutualiste d'assurance. Auparavant il a été avocat fiscaliste chez Arthur Andersen International puis Ernst & Young.

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Pour résorber le déficit budgétaire de la France, il existe deux moyens : soit on rehausse les recettes, soit on rogne sur les dépenses. Or, en période pré-2012, rogner les dépenses publiques c’est prendre le risque de mécontenter des électeurs potentiels. Tout comme il existe, en matière militaire, le risque de dommages collatéraux, il existe, en matière budgétaire, le risque de dommages électoraux.

Reste l’augmentation des recettes via une inéluctable hausse des impôts. Ici, encore, mêmes précautions : l’augmentation doit s’attaquer à des cibles non susceptibles de susciter la compassion des bonnes consciences citoyennes : les automobiles parce qu’elles polluent, les fumeurs parce que le tabac tue, les alcools, parce qu’il faut boire avec modération, les sodas parce que l’obésité est un fléau, les assureurs parce qu’ils font partie de ces professions mal-aimées, tout comme les banquiers, les garagistes ou les huissiers, sur lesquelles le grand public ne risque pas de s’apitoyer. Dernier profil qui fait l’actualité : taxer les hauts revenus. Les hauts revenus ne manifestent pas, ne font pas la grève et même s’ils la faisaient, qui s’en préoccuperait ? Qui plus est, c’est une clientèle électorale en grande partie déjà acquise à la droite, alors puisqu’une floppée de dirigeants de grosses entreprises vient de réclamer à corps et à cris de payer plus d’impôt, pourquoi se priver d’une ressource budgétaire à la fois offerte et tellement tendance d’un point de vue marketing politique ?

Mais cet article ne serait qu’un billet d’humeur si nous nous arrêtions à ces généralités. Le problème véritable se situe au-delà et le diable se cache souvent dans les détails.

Ce qui est nouveau, c’est l’assiette de cette contribution. Du temps jadis, lorsqu’un gouvernement voulait augmenter les impôts des riches, il rehaussait le taux marginal du barème progressif de l’impôt sur le revenu. C’est d’ailleurs ce que vient de proposer le sénateur Jean Louis Masson qui propose un nouveau barème dont la tranche la plus élevée serait taxée à 50% au lieu de 41% actuellement.

En ce qui concerne la contribution sur les hauts revenus proposée par le gouvernement, c’est la Revenu Fiscal de Référence qui sert de base d’imposition : derrière ces mots barbares, c’est une discrète révolution fiscale qui se dessine.

Jusqu’à lors, le Revenu Fiscal de Référence n’était utile que pour le calcul de certains avantages fiscaux ou sociaux ainsi que pour l’abattement de taxe d’habitation. Relevant d’un calcul particulièrement complexe, il consiste à rajouter au revenu net imposable toute une série d’autres revenus qui bénéficient, soit d’une exonération (certains revenus salariaux, …), soit d’un abattement spécifique (certains dividendes, …), soit d’une imposition à un taux forfaitaire dérogatoire du barème progressif (certaines plus-values, …).

S’esquisse ici le rêve de nombreux réformateurs de l’impôt : élargir considérablement le champ d’application de l’impôt en y incluant tous les revenus, même ceux qui bénéficient pourtant de tel ou tel régime dérogatoire, ce qui ne sera pas sans poser de difficultés quant à la compatibilité de cette contribution avec certaines conventions internationales.

Un tel dispositif constitue aussi et surtout un premier coup de canif dans la notion très française de quotient familial qui permet aux foyers fiscaux avec charges de famille de bénéficier d’un avantage fiscal plafonné. C’est là tout un historique de politique fiscale familiale qui est discrètement remis en cause. Par un gouvernement de droite, ce qui pourra faire tousser certains. Nous nous dirigeons donc droit vers l’individualisation de l’impôt, ce qui ne pourra que plaire au Parti socialiste puisque cela fait partie de leur projet annoncé pour 2012.

Bien sûr, il pourra être répliqué que les seuils restent élevés puisque le texte législatif qui se dessine aujourd’hui tourne autour de 250 000 euros pour un célibataire et 500 000 euros pour un couple. Mais il doit être noté que le montant initialement prévu par le gouvernement était le double. En outre, en matière d’impôts comme en d’autres choses, le plus difficile est de faire le premier pas. Par la suite, une fois que le pied est dans embrasure de la porte, il sera facile d’abaisser les seuils et/ou d’en augmenter les taux d’imposition en fonction des majorités parlementaires en place et des besoins budgétaires toujours plus pressants.

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