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Serait-il interdit de préférer le village français au village global ?
©Reuters

Le réveil des nations

Suis-je nationaliste ? Non. Suis-je lepeniste ? ("Je préfère ma cousine à ma voisine"). Non. Français, simplement Français.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Pour désigner la patrie, la terre des pères, l'allemand, une langue foisonnante, dispose d'un très beau mot "Heimat". Heimat veut dire patrie mais aussi beaucoup plus : le village où j'ai grandi, la maison où je me sens chez moi. La France donc.

Partout dans le monde - et surtout en Europe- on assiste à la renaissance de la patrie, de la nation, du "heimat". L'Ukraine vole en éclats parce que la minorité russophone ne peut ni ne veut vivre ensemble avec la majorité ukrainophone. La Yougoslavie est morte dans le bruit et la fureur des armes, car les Bosniaques, les Kosovars, les Croates,  les Slovènes, les Monténégrins, les Serbes voulaient une maison à eux, leur "heimat". La Tchécoslovaquie a vécu : les Slovaques voulaient un Etat qui ne soit pas celui des Tchèques. Une grande partie des Ecossais veulent être Ecossais et non pas Britanniques. Les Flamands veulent se séparer des Wallons. Et seule la constitution espagnole empêche la Catalogne de proclamer son indépendance.

Ce réveil des nations est communément qualifié de "national populisme" par des petits esprits qui essaient de nous convaincre que le marché mondialisé et quelques clics sur internet peuvent remplacer l'amour de l'endroit où l'on se sent chez soi. Mais la réalité est plus forte que ces injonctions comminatoires.  Un vieux proverbe juif dit les choses comme il faut les dire. "Si je ne m'aime pas moi-même, qui m'aimera ? Et si je n'aime que moi, qui suis-je ?".

Serait-il scandaleux d'aimer la France ? De rêver dans la forêt de Brocéliande ? D'être pétri d'admiration devant la Vierge Noire de Rocamadour ? Un peu d'amour pour soi, pour ce qu'on est permet d'avoir de l'amour pour les autres… La France, on le sait, est une République "une et indivisible" qui refuse le communautarisme et prône le "vivre ensemble". Assimilation et intégration sont les mamelles de la République. Ses mamelles sont vides ou plutôt nombreux sont ceux qui refusent d'y téter le bon lait républicain. L'assimilation a échoué. L'intégration n'a pas mieux réussi. Et le vivre ensemble est devenu le cache-sexe de haines cuites et recuites. Et alors que fait-on ?

Il existe en Europe plusieurs pays qui ne se sont pas décomposés et où vivent des minorités nationales. La minorité nationale, selon les critères du Conseil de l'Europe, c'est un groupe d'hommes et de femmes qui ont un sentiment d'appartenance ethnique, une langue, une culture, une religion. En Roumanie par exemple, la minorité nationale hongroise, a des écoles où la première langue est le hongrois,  et des journaux dans sa langue. Les Hongrois de Roumanie aiment naturellement la Hongrie mais respectent les lois roumaines. Et ceux que la suprématie roumaine insupporte sont libres, et ne s'en privent pas, de partir pour la Hongrie.

Sur le territoire français réside une population qui correspond aux critères de minorité nationale tels que définis par le Conseil de l'Europe. Son identité est fortement structurée. Elle a des problèmes. Et elle pose aussi des problèmes.

Elle est française tout autant que la minorité hongroise en Roumanie est roumaine. La République "une et indivisible" n'étant plus qu'une abstraction déconnectée du pays réel, pourrait-on envisager pour cette population un statut de minorité nationale ?

Une révolution, un bouleversement à coup sûr. Le buste de Marianne en  tremblerait un peu. Mais tout vaut mieux qu'un statu quo qui ressemble à un face à face. Cette population serait libre d'aimer sa patrie de  cœur, son "heimat" qu'il s'agisse de l'Algérie, du Maroc, ou de la Tunisie. Elle sera libre également, au cas où les lois françaises lui paraîtraient trop contraignantes, d'y partir.

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