Les chiffres qui montrent que l’Europe est devenue le parasite de l’économie mondiale<!-- --> | Atlantico.fr
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Le nouveau président de la Commission européenne
Le nouveau président de la Commission européenne
©Reuters

Vermifuge

Si les chiffres, très positifs, du commerce extérieur européen laissent espérer une amélioration de la conjoncture économique, ils sont surtout une source d’agacement pour nos partenaires. En effet, ceux-ci ne font que révéler la stratégie européenne "du passager clandestin de la croissance mondiale".

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Avec un excédent de 194.8 milliards d’euros, le commerce extérieur de la zone euro se porte bien. Soit une hausse de près de 28% par rapport à 2013. Tout porterait à croire que la crise est finie et que les efforts de compétitivité portent leurs fruits. Pourtant, cette situation révèle une réalité moins enthousiasmante au sujet du continent européen. Sa stratégie ne cherche qu’à profiter de la croissance des autres, tout en refusant d’apporter sa propre contribution à l’économie mondiale. Une sorte de parasitage économique.

Ainsi, Eurostat publiait ce lundi 16 février les détails de l’excédent commercial de la zone euro vis-à-vis du reste du monde. Puisqu’un excédent est le rapport entre le niveau des importations et celui des exportations, il reste à examiner les forces sous-jacentes de ce résultat. D’une part, le niveau des exportations progresse de 1894.7 milliards en 2013 à 1939 milliards en 2014, soit une hausse de 2.33%, ou de 44.3 milliards d’euros.

D’autre part, les importations. Et celles-ci sont stables, passant de 1742.4 à 1744.2 milliards d’euros, une hausse de 1.8 milliards, ou 0.10%. Ainsi, la réalisation de l’excédent commercial se matérialise sur le différentiel existant entre la stagnation forcée de la demande intérieure européenne et la progression de la croissance mondiale.

Et plus spécifiquement sur les croissances américaines et britanniques qui assurent l’essentiel de cette progression. En effet, alors que les exportations vers le Royaume Uni passent de 220.7 à 235.5 milliards, les importations en provenance de ce pays baissent de 151 à 147.7 milliards d’euros. L’excédent commercial s’apprécie alors sensiblement, passant de 69.7 à 87.8 milliards d’euros (de janvier à novembre). Un gain de 18 milliards d’euros.

Même chose pour les Etats Unis. Les exportations progressent de 7%, passant de 205.4 à 219.9 milliards alors que les importations ne progressent que marginalement de 138.1 à 139.8 milliards d’euros. A eux seuls, ces deux pays assurent 70% de l’amélioration de la situation commerciale européenne.

Et pourtant, ce sont précisément ces deux pays qui sont régulièrement accusés de "manipuler leur monnaie" afin d’améliorer leur situation commerciale. Si tel était leur but, leur échec serait cuisant, voir pathétique. Mais en réalité, les stratégies économiques anglo-saxonnes consistent avant tout à soutenir leur demande intérieure. Le consommateur américain consomme, le britannique également, et ce, pour le plus grand bonheur des européens. Et en fait, pour le plus grand bonheur de l’industrie automobile européenne, en majorité allemande, qui réalise un excédent commercial vis-à-vis du monde de 263.3 milliards d’euros.

La Réserve Fédérale américaine et la Banque d’Angleterre soutiennent largement les économies de leur pays, et leur permet d’afficher une santé insolente par rapport à la zone euro. Des taux de croissance proche de 3%, des taux de chômage inférieurs à 6% et en conséquence, une vitalité du consommateur qui permet à la zone euro de présenter une amélioration de ses exportations.

Mais évidemment, cette stratégie a ses limites. Parce que profiter des efforts des autres tout en se drapant du monopole de la vertu économique commence à agacer nos partenaires. En serrant volontairement la vis au consommateur européen, ce qui conduit à la stagnation des importations, le continent n’apporte en effet aucun soutien à la croissance mondiale.

Il n’est alors pas surprenant de voir Jack Lew, secrétaire américain au Trésor déclarer devant le Congrès des Etats Unis :

"Alors que la reprise économique américaine a profité à la croissance mondiale, le reste du monde ne peut pas compter sur les Etats Unis comme étant le seul moteur de la croissance", "nous ne pouvons pas le faire seul".

Plus symbolique encore pour l’Europe, Jack Lew et George Osborne (ministre britannique des finances) ont pu publier une tribune commune dans le Wall Street Journal, sorte de prélude au G20 des 9 et 10 février derniers. Et d’accuser directement l’Europe de son immobilisme :

"Le continent entier doit faire plus pour soutenir la croissance et l’emploi" et ce, notamment à travers "des politiques monétaires énergiques".

La zone euro est actuellement prise en sandwich entre des populations qui souffrent de restrictions salariales et de taux de chômage élevés, et désormais, les conséquences de sa stratégie sur le commerce mondial. C’est à dire l’agacement de nos partenaires face au profil mercantiliste, parasitaire, du modèle économique européen. Un modèle qui a un nom ; la zone euro est actuellement le passager clandestin (free rider) de la croissance mondiale. Et c’est bien ce que prouvent les chiffres publiés par Eurostat.

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