Anthropocène : la Terre est entrée dans une nouvelle ère depuis le 16 juillet 1945<!-- --> | Atlantico.fr
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L'homme a définitivement marqué l'histoire de la planète
L'homme a définitivement marqué l'histoire de la planète
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D-Day

Sans vraiment s'en rendre compte, l'humanité traverse une nouvelle ère géologique. Cette fois, l'homme est directement responsable. Une étude, présentée ce samedi à Davos, date son commencement au lendemain de la seconde guerre mondiale.

Anthropocène, un terme compliqué pour résumer le bouleversement majeur que l'humanité connaît et dont il ne se rendra véritablement compte que dans plusieurs centaines de milliers d'années. Selon une étude du 19 janvier, publiée dans la revue Quaternary international, nous sommes entrés depuis la moitié du 20ème siècle dans une nouvelle ère géologique, celle de l'anthropocène. Elle suit l'ère holocène qui aura duré, tout de même, près de 14 000 ans.

Le terme, proposé dans les années 1980 par le biologiste américain Eugene F. Stoermer et le chimiste néérlandais Paul Crutzen (prix Nobel en 1995), est la contraction du grec "anthropos" (être humain) avec le suffixe "cène" qui termine les noms données aux ères géologiques (miocène, paléocène…). "Il s'agit en fait d'une proposition de nouvelle ère dans laquelle l'homme devient la principale force géologique de la Terre" résume Jean-Baptiste Fressoz, historien des sciences, des techniques et de l'environnement, au CNRS et co-auteur de "L'événement anthropocène : La Terre, l'histoire et nous". En d'autres termes, dans 100 000 ans, les géologues du futur pourront observer les traces de cette nouvelle ère dans les sédiments de notre planète, pour la différencier des autres. Les scientifiques n'ont plus de doutes sur cette réalité, même si elle ne peut pas s'observer au temps présent. "Il y a de très bons arguments et beaucoup d'indices comme par exemple, les engrais dans les sédiments marins ou le plomb dans les glaces du pôle" souligne Jean-Baptiste Fressoz. Evidemment, tout cela est le résultat des activités humaines, notamment industrielles.

Pour les auteurs de l'étude proposée début janvier, menée par Jan Zalasiewicz, de l'université de Leicester, le nucléaire est le meilleur point de départ de cette nouvelle ère. Plus précisément, le 16 juillet 1945. Ce jour, dans le désert du Nouveau-Mexique, les Etats-Unis font exploser la première bombe nucléaire de l'Histoire. Quelques semaines après, ce sera Hiroshima. "C'est le premier évènement global qui impacte la Terre puisque qu'on retrouvera des traces jusque dans les glaces du Groenland" explique Laurent Carpentier, journaliste et co-auteur avec le glaciologue Claude Lorius de "Voyage dans l’anthropocène." Mais selon lui, le début de l'ère débute plutôt vers 1850, lors de la Révolution industrielle où l'homme va commencer à dépasser la nature.


La première explosion nucléaire, date possible du début de l'anthropocène.

"Il y  a des débats intéressants sur la date de départ" reconnaît Jean-Baptiste Fressoz. "C'est vrai que la première explosion atomique n'est pas un marqueur parfait" reconnaît Jan Zalasiewicz au Telegraph. Certains scientifiques, minoritaires, font même remonter la date de départ à -4000 ans, lors de l'invention de l'agriculture et l'apparition massive du méthane. Une chose est sûre, la moitié du 20ème siècle fait bien partie de l'anthropocène et à partir des années 1950, on observe même une "grande accélération," du phénomène. C'est par exemple à ce moment là qu'on agit sur la quantité d'azote dans l'air à travers l'utilisation massive des engrais. "C'est assez spectaculaire" commente Jean-Baptiste Fressoz. "En quelques décennies, l'humanité a agit sur les millions d'années d'évolution de la Terre. Ce n'est pas qu'une crise. C'est une révolution écologique d'origine humaine. "

Si la notion d'anthopocène date des années 1980, c'est parce qu'elle fait suite à la première prise de conscience du monde sur l'impact des activités humaines. Dans les années 1970, le Club de Rome, un groupe international de scientifiques et d'économistes prend conscience des limites de la planète, notamment après le premier choc pétrolier de 1974. "La vraie prise de conscience, c'est le jour où on ne peut plus mettre de l'essence dans sa voiture" souligne Laurent Carpentier. La découverte récente du gaz de schiste a mis un coup d'arrêt aux préoccupations mondiales.

Alors, ce weekend du 24 et 25 janvier, l'étude sur l'anthopocène va être présentée au forum économique de Davos. L'objectif n'est plus seulement de prendre conscience du changement massif lié à l'homme. "Nous ne sommes pas en train d'entrer dans l'anthopocène" insiste Laurent Carpentier. "Nous y sommes déjà !" L'objectif attendu, ce sont actes forts pour tenter d'endiguer l'évolution. "Il n'y aucun signe de ralentissement" souligne Jean-Baptiste Fressoz qui précise que les pays de l'OCDE sont responsables à 80% de la pollution produite jusqu'à présent. "La seule chose qui pourrait fonctionner, ce serait une décroissance rapide de la Chine et des pays riches" indique-t-il. En décembre prochain, Paris accueillera la prochaine conférence pour le climat avec un objectif à moyen ou long terme ambitieux : sortir de l'ère du carbone et peut-être, un jour, sortir de l'ère de l'anthropocène.

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