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Débat PS : 
l'unité plus forte que les idées
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A trois jours du vote...

Les débats se suivent et ne se ressemblent pas forcément... Le ton monte et les échanges sont plus vigoureux. Que retenir du troisième débat PS à trois jours du vote des primaires ?

Isabelle Veyrat Masson

Isabelle Veyrat Masson

Isabelle Veyrat-Masson publie en 2011 Mes histoires parallèles Entretiens avec Isabelle Veyrat-Masson, Marc Ferro, Carnets Nord, 2011 (Prix Saint-Simon) ; Médias et Elections. La campagne présidentielle de 2007 et sa réception, Ina/ L’Harmattan, 2011. Elle est Directrice du Laboratoire Communication et Politique, associée au Centre d’histoire de Sciences po ; elle a consacré l’essentiel de ses travaux à l’étude des médias et à la communication politique.

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Divergence des points de vue oblige, nous avons interviewé deux spécialistes qui nous livrent leurs impressions sur le troisième débat PS. Parole à Isabelle Veyrat Masson, Directrice du Laboratoire Communication et Politique au CNRS, et Juan Pedro Quinonero, correspondant en France du journal conservateur espagnol ABC.

Que retenez-vous de ce dernier débat télévisé avant le premier tour de la primaire socialiste ?

Isabelle Veyrat Masson : Se sont-ils concertés ? Ont-ils jugés chacun de leur côté que c’était le plus sage ou le plus prudent ? Tous les candidats, tous sans exception, ont joué le jeu de la "convergence", de la bonne entente, de l’amitié. Les journalistes ont pourtant essayé comme ils l’avaient fait dans les débats précédents de mettre l’accent sur les différences et de rappeler les piques lancés par les uns contre les autres. Mais ce fut en vain.

Laurent Joffrin a posé ses questions sur un ton assez agressif, espérant sans doute, au-delà de l’envie de prouver son objectivité, faire réagir les plus nerveux. En vain. Le patron du "Nouvel Obs" a ainsi rappelé à Ségolène Royal qu’elle avait traité François Hollande de "notable" qui susurrait aux Français "Dormez en paix braves gens". Or, non seulement, Ségolène Royal s’est récriée vivement mais elle a pris sur elle - avec la complicité de François Hollande lui-même - la part d’opprobre contenue - surtout à gauche - dans le mot de notable, en s’écriant "Nous sommes tous des notables ! ". Un grand moment de télévision !

Les deux candidats les plus éloignés politiquement se sont congratulés : "Arnaud a raison" dit à plusieurs reprises Manuel Valls dont vraisemblablement, le but dans ce troisième débat était de rappeler qu’il "se sentait profondément de gauche". Sur l’école, "Arnaud" est d’accord avec "François"… Manuel Valls refuse de réitérer l’accusation de "démagogue" lancée à ses deux concurrents ; eux-mêmes repoussent en souriant cette accusation.

Mais dans le désir de rassembler – autour d’elle ? – les brebis égarés dans une étrange compétition, c’est Martine Aubry qui fait le plus fort. Elle refuse d’évoquer la moindre différence entre elle et François Hollande, qu’elle défend contre la Ségolène de la veille (émission de Canal + sur les primaires) , elle ne cesse de mettre l’accent sur les points d’accord : "on est d’accord" répète-t-elle. "Je vous ai défendu" dit-elle à ses camarades-compétiteurs, face aux critiques collectives du journaliste de RMC. Elle parle même en leur nom : "mes amis ont proposé des solutions" lui explique-t- elle, avant de faire des propositions. Le visage grave, presque fermée, Martine Aubry reste la première Secrétaire du PS, qui montre la voie ; à moins que ce ne soit déjà la candidate rassembleuse en vue de l’élection présidentielle.

En quoi ce débat a-t-il été, selon vous, différents des deux précédents ?

Isabelle Veyrat Masson : Ce débat a beaucoup ressemblé aux deux précédents. La mise en scène était très semblable. Jusqu’aux vêtements pour certains. Les journalistes ont joué le même type de rôle, posant des questions assez peu agressives, ne s’autorisant pas à rectifier les affirmations des uns et des autres et obsédés par le problème du temps. Le troisième débat n’a pas pris le moindre risque d’un quelconque dérapage. Il semblait plus rôdé. Dans le premier, les candidats étaient plus tendus et cherchaient leurs mots, dans le deuxième, ils se sont essayés à lancer quelques attaques et à montrer leurs spécificités. Dans le troisième, où les candidats étaient plus assurés, il s’agissait de gommer toutes les aspérités.

Qui a le plus tiré son épingle du jeu lors de ce débat ?

Isabelle Veyrat Masson : Le favori forcément puisqu’il s’est agi, dans ce débat, avec apparemment un beau consensus et pas mal de réussite, de ne pas faire bouger les lignes. C’était très frappant de voir que chacun avait endossé un habit qu’il s’appliquait à remplir. Martine Aubry, le visage impassible mais fermé, Ségolène Royal, ne quittant – presque jamais - ce sourire serein qu’elle garde même quand elle parle ; François Hollande, les sourcils froncés - retrouvant parfois, comme par accident, les yeux pétillants de malice. Manuel Valls et Arnaud Montebourg, s’excusant presque de leur jeunesse et de leur beauté par une densité dramatique de chaque instant.

Qui a le plus perdu du terrain ?

Isabelle Veyrat Masson : Personne. Si les sondages ont un sens, on ne devrait pas voir bouger l’ordre de préférence qu’ils ont indiqué. Les candidats ont tous été au meilleur de leur forme et aucun n’a pris le risque de tenter une sortie qui risquait de lui faire gagner une place ou de le faire perdre … sans espoir de se rattraper par un autre débat…

Quel fut selon vous le moment clé du débat ?

Isabelle Veyrat Masson : La conclusion. Un moment de densité non feinte. Le caractère dramatique de ce moment venait de ce qu’il s’agissait de leur dernière prise de parole avant le vote. Se résumer, convaincre en quelques secondes, l’intensité était totale.

Qu'ont apporté au final ces trois débats télévisés entre candidats socialistes ? N’y a t-il pas eu un débat de trop ? Qu’a apporté ce dernier débat ?

Isabelle Veyrat Masson : Les deux premières rencontres ont permis de connaître les candidats, d’entendre leurs propositions, de les voir réagir et de les observer. On a pu à loisir, chercher derrière leurs mots, leurs gestes et leurs interactions, la vérité de chacun. Si la plupart d’entre nous espéraient un éclat, des différends, un événement, chacun a pu se féliciter de constater que des hommes et des femmes qui appartiennent au même parti, qui travaillent ensemble et qui ont l’ambition de gouverner ensemble sont capables de parler de programmes, de proposer des analyses, bref de débattre, dans les règles de la courtoisie et de la bonne - intelligence. On a parlé d’une leçon de démocratie. Avec raison. Cependant, l’absence de débats réels entre les candidats a rendu parfois criante l’absence de contradictions. Le dispositif médiatique parfait reste encore à trouver.

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