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Je suis Charlie® ? : quand les charognards tentent de tirer profit des attentats en surfant sur le droit des marques
©Reuters

Business morbide

L’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) aurait reçu de nombreux dépôts de marques pour le slogan "Je suis Charlie" depuis les attentats terroristes du 7 janvier dernier.

Etienne  Drouard

Etienne Drouard

Etienne Drouard est avocat spécialisé en droit de l’informatique et des réseaux de communication électronique.

Ancien membre de la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés), ses activités portent sur l’ensemble des débats de régulation des réseaux et contenus numériques menés devant les institutions européennes, françaises et américaines.

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Julien  Dubois

Julien Dubois

Julien Dubois est avocat à la Cour, membre du cabinet K&L Gates.

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Depuis le tragique attentat terroriste de Charlie Hebdo le 7 janvier dernier, l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) aurait reçu de nombreux dépôts de marques pour le slogan "Je suis Charlie". Dans un communiqué laconique daté du 13 janvier, l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) a fait savoir qu’il n’enregistrerait pas ces demandes "car elles ne répondent pas au critère de caractère distinctif" exigé en matière de dépôt de marques. En l’espèce, l’INPI s’est contenté d’indiquer que le slogan "Je suis Charlie" ne pouvait être "capté par un acteur économique du fait de sa large utilisation par la collectivité".

Ces dépôts de marque portant sur "Je suis Charlie" proviennent de personnes espérant pouvoir s’approprier cette formule et en tirer un profit lié au monopole d’exploitation des marques déposées. Ce type de démarche est choquant - et malheureusement récurrent. Il prend, dans les circonstances actuelles, un caractère particulièrement déplacé, honteux et minable… alors que l’auteur réel du slogan et du logo "Je suis Charlie" a clairement renoncé, dès le premier instant, à en revendiquer la moindre propriété.

La posture prise par l’INPI sonne ainsi comme une interdiction morale de tirer un quelconque avantage commercial de ce slogan. On peut, sur ce point moral, la saluer. Des interrogations peuvent néanmoins être formulées sur le fondement juridique retenu par l’INPI, qui considère que ce slogan ne présente aucun caractère distinctif à titre de marque.

La décision de l’INPI française ne lie en aucune façon les autres offices européens de propriété industrielle. Or, des demandes similaires ont été introduites pour le slogan "Je suis Charlie" dans d’autres pays de l’Union européenne, tels que, notamment, les pays du Benelux (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg). Ainsi, un certain Yanick Uytterhaegen n’a guère trouvé mieux que d’effectuer dès le 8 janvier une demande d’enregistrement pour "Je suis Charlie" auprès de l’Office Benelux de la Propriété intellectuelle, dans sept classes (familles) de produits et services. Espérons que ce Monsieur récoltera avec cette demande une notoriété tout aussi nauséabonde que les profits qu’il croit pouvoir en tirer…

Il sera donc intéressant de suivre dans les jours ou semaines à venir si les organismes nationaux et européens concernés choisissent d’accepter ou de refuser l’appropriation d’un slogan qui a fait le tour du monde en quelques jours pour incarner le refus du terrorisme qui vient de frapper la France au cœur.

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