“Peut-être n’avions-nous pas voulu voir certaines choses” : quelle est vraiment la prise de conscience générée par le choc Charlie ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Une femme en état de choc après l'attentat au siège de Charlie Hebdo.
Une femme en état de choc après l'attentat au siège de Charlie Hebdo.
©REUTERS/Christian Hartmann

Débriefing

Depuis la fusillade survenue dans les locaux de Charlie Hebdo, de nombreux commentateurs ont employé cette formule dans les médias et sur les chaînes d'info en continu, pour comprendre les raisons qui ont pu nous amener à la situation actuelle.

Gil  Mihaely

Gil Mihaely

Gil Mihaely est historien et journaliste. Il est actuellement éditeur et directeur de Causeur.

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Atlantico : Quelle est l'idée exprimée par cette formule exactement ? 

Gil Mihaely :  Pendant longtemps il y avait un éléphant dans la pièce, et nous avons préféré jusqu'à aujourd'hui de l'ignorer. Cet éléphant a pour nom, l'islamisme radical. 

Avant elle était tout simplement trop sensible et aussi difficile à aborder. Longtemps l’idée dominante réduisait tous les phénomènes déviants à la dimension économique et sociale. La radicalisation était considérée comme un symptôme des problèmes de fond comme la pauvreté, le chômage, la ghettoïsation et la discrimination. La dimension culturelle a été ignorée voire délégitimée comme élément explicatif pertinent.                

Quant à savoir si un débat sérieux et franc s’engagera autour de cette question, on peut l’espérer mais il est encore trop tôt pour savoir. Nous sortons à peine d’un grand moment cathartique et le temps de la réflexion arrive.

Que peut-on dire de cet aveuglement, de quelle nature était-il ?

Le refus de se poser la question de peur de conclusions à tirer des réponses possible, d’abord de l’idéologie que tout est social, tout est économique. Ensuite, cette question est devenue le piège dans lequel la gauche a attiré la droite : puisque les problèmes liés aux communautés d’immigrés d’origine musulmane et leurs enfants et petits enfants ne peuvent être qu’économiques et sociaux, puisque nous portons une responsabilité vis-à-vis d’eux à cause de notre histoire de puissance coloniale, évoquer leur part de responsabilité était considéré comme une forme de racisme.    

En quoi est-ce qu'il peut représenter un défi pour la société d'une part, mais surtout pour les acteurs de la vie publique ? Cette question a-t-elle une chance de se graver durablement dans les débats ?

Le gouvernement doit trouver un juste milieu extrêmement précaire entre l’engagement d’un dialogue franc et direct avec les français musulmans concernant leur part de responsabilité dans la création de poches minoritaires mais non négligeable de radicalisme, sans pour autant les aliéner et encore moins les exclure de la communauté nationale. Longtemps trop nombreux parmi eux toléraient des actes et des paroles – complotisme, antisémitisme, posture victimaire, culture d’honneur incompatible avec les valeurs de la France - qui légitimaient pour certains d’aller très loin et parfois même trop loin.

Un faux pas mettra le feu aux poudres et pourtant nous n’avons pas d’autre choix : il faut emprunter ce pont très étroit entre deux abîmes. Pour conclure sur une note positive, je pense que la majorité des musulmans ne demandent autre chose que ce dialogue dur mais salutaire.

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