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"Main basse sur la culture " : quand le plus gros succès du cinéma français fait perdre de l'argent à TF1
©Reuters

Bonnes feuilles

Alors que le secteur culturel est en pleine période de mutation, deux journalistes ont voulu savoir qui tirait les ficelles dans le milieu de la culture française? TF1, CSA, actionnaires et droits publicitaires : la guerre fait rage. Extraits de "Main basse sur la culture et l'argent", de Michael Moreau et Raphael Porier, publié aux Editions La découverte, 2014 (1/2).

Raphael Porier

Raphael Porier

Diplômé de l'Ifp, (Institut français de presse), Raphael Porier est journaliste en presse écrite et audiovisuelle. Spécialisé dans les sujets Médias et Culture, il est actuellement reporter pour le journal Le Parisien, après avoir officié à Itélé et à France 2.

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Michaël Moreau

Michaël Moreau

En 2000, Michaël Moreau commence sa carrière de journaliste au quotidien France Soir, puis devient rédacteur en chef adjoint de l’émission On ne peut pas plaire à tout le monde. De 2006 à 2008, il est rédacteur en chef de l’émission T’empêches tout le monde de dormir, puis de 2008 à 2009 de Médias le magazine.  Depuis 2011, il est rédacteur en chef chez iTélé et BlackDynamite Production. Il co-écrit avec Aurore Gorius Les Gourous de la com’, 30 ans de manipulations économiques et politiques en 2011.

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Pour investir 3,2 % de son chiffre d’affaires dans le 7e art, TF1 a ainsi créé sa filiale TF1 Film Productions. Son ambition est de copro- duire « entre quinze et vingt films par an », selon Nonce Paolini. Mais ces films, tout comme les fictions télévisées, ne sont pas rentables, affirme-t-il. Les recettes publicitaires générées ne combleraient pas les investissements. « Soyons clairs, aujourd’hui, des fictions françaises sur notre antenne, même quand elles connaissent un énorme succès, nous font perdre de l’argent : en moyenne un million d’euros par soirée ! », assure Nonce Paolini. La seconde diffusion sur TF1 de Bienvenue chez les Ch’tis, de Dany Boon, en mars 2014 a enregistré le score très élevé de « 11,5 millions de téléspectateurs, mais une perte de 1,6 million d’euros », poursuit-il. Le cinéma et les fictions françaises se révèlent moins attractifs pour les publicitaires : « Les annonceurs qui visent les jeunes ne se précipitent pas comme ils le font sur des séries américaines ou des divertissements. Donc, aujourd’hui, on a un déficit de finance- ment qui devient très lourd à porter pour une entreprise comme TF1. »

En plus de TF1 Film Productions, le groupe a créé une autre filiale : TF1 DA (comme Droits audiovisuels), qui a conclu une alliance capitalistique avec le groupe de cinéma UGC. Objectif : s’acheter un catalogue et gérer les droits de diffusion de nombreux longs-métrages en France et à l’étranger. Par ce biais, TF1 finance également « entre dix et douze films par an », selon Nonce Paolini, « mais qui ne viennent pas forcément sur l’antenne de TF1 ». « Ce fut le cas avec Neuilly sa mère, qui a été un joli succès et a été diffusé sur France Télévisions. » M6 coproduit de son côté une petite dizaine de films par an. Mais, selon son patron, Nicolas de Tavernost, le bilan serait sans appel : « En matière réglementaire, la France a fait un sans-faute dans l’erreur ! », scande-t-il. « Il nous faut être trois fois meilleurs pour arriver aux mêmes résultats que les étrangers. Nous sommes fossilisés ! » Ces diatribes ne datent certes pas d’aujourd’hui. Et les face-à-face entre les patrons de chaîne et les autorités, qu’ils jugent trop rigides, ont toujours été musclés. Le président du directoire de M6 : "Au CSA, je leur dis chaque année ce que je pense. Je répète inlassablement les choses. Je répète en boucle. Ils foncent dans le mur. Tous les articles commencent par “Il faut que”… Mais on n’a pas progressé"!

Patrick Le Lay se souvient lui aussi qu’il devait chaque année aller « faire contrôler son “business” » par le CSA. Lui aurait préféré n’avoir de comptes à rendre qu’à ses actionnaires, à aucune autorité publique. « Je me retrouvais devant une table en U avec les membres du CSA, et derrière moi ceux de l’administration. Je me suis retourné une fois devant tous ces jeunes, formés dans des grandes écoles : “Comment vous pouvez gâcher votre jeunesse dans un organisme abstrait qui ne sert à rien ? Mais foutez le camp, bon Dieu ! Allez développer ce pays au lieu d’empêcher des gens de travailler !” Putain, le scandale que j’ai fait ce jour-là… » Ces propos illustrent à quel point le CSA, l’autorité garante des cahiers des charges, s’est souvent retrouvé méprisé et combattu par les patrons de chaîne.

Extraits de "Main basse sur la culture et l'argent", de Michael Moreau et Raphael Porier, publié aux Editions La découverte, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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