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Éthique : l'arme fatale anti-crise
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EDITORIAL

A l’occasion du colloque Ethicfirst qui se déroule mardi et mercredi à Paris Dauphine, une étude opinionway montre que les Français croient massivement en l’éthique comme accélérateur de sortie de crise.

Alain Renaudin

Alain Renaudin

Alain Renaudin dirige le cabinet "NewCorp Conseil" qu'il a créé, sur la base d'une double expérience en tant que dirigeant d’institut de sondage, l’Ifop, et d’agence de communication au sein de DDB Groupe.

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De l’échantillon national représentatif de 1013 personnes interrogées par Opinionway les 14 et 15 septembre derniers, il ressort très nettement une forte attente d’éthique. Pour 82% des Français, davantage d’éthique dans le contexte économique actuel est une condition indispensable pour sortir de la crise. Ils sont tout autant (79%) à être convaincus que la crise financière aurait été évitée ou amoindrie si l’éthique avait été moins absente. L’éthique apparaît donc clairement comme une arme anti-crise auprès d’une population qui n’exprime pas un consensus mou sur cette idée mais une opinion convaincue avec un tiers des répondants non seulement d’accord mais « tout à fait d’accord ». Et si on y croit, c’est aussi par conviction pour la vertu économique de l’éthique qui est – et c’est un résultat important de l’étude – conciliable avec l’objectif de compétitivité pour 80% des Français. Autrement dit, il y a un intérêt à l’éthique, qui n’est plus perçue comme une contrainte moralisante ou philanthropique, sans doute aussi face à une forte perception du coût de la non-éthique révélé par la crise actuelle.

Si l’éthique est conciliable avec la notion de compétitivité, c’est parce que les Français estiment très majoritairement que les entreprises éthiques bénéficient à leurs yeux de meilleures relations sociales (87% des opinions), sont plus attractives et donnent envie d’y travailler (85%), et sont même davantage performantes (pour 66% des Français). Au-delà de ces bénéfices sociaux et économiques, l’éthique est aussi un critère de jugement pour 82% des personnes interrogées qui expliquent que cela rentre en ligne de compte dans l’opinion qu’elles se font d’une entreprise.

Quand la non-éthique devient autodestructrice

Toutefois, même si l’éthique est perçue comme vertueuse et nécessaire, il apparaît clairement un décalage entre cet intérêt raisonné, sans doute raisonnable, et la réalité de cette thématique à la fois dans l’actualité et dans la dynamique des comportements. Un Français sur deux (46%) estime en effet que l’on parle finalement d’éthique ni plus ni moins qu’avant, et la même proportion (51%) observe qu’il n’y a pas d’évolution des comportements dans ce domaine. Au mieux donc un statu quo.

Pour les autres avis (environ 1 tiers des Français), on parle davantage d’éthique, mais avec une tendance négative à travers davantage qu’avant de comportements moins éthiques. Il est ressort donc pour l’opinion un sentiment à la fois d’incompréhension et de frustration pour ne pas dire de défaitisme : la crise, due en partie à l’absence d’éthique dans le ressenti général, n’aurait donc pas servi de leçon, et les acteurs économiques persisteraient dans des comportements contre-productifs, donc irrationnels.

L’éthique passe par moi

Finalement, si l’éthique peut souvent apparaître comme un sujet de conversation accaparé par les instances dirigeantes, politiques ou économiques, les Français nous renvoient un avis très tranché sur l’idée, pour 82% d’entre eux, que l’éthique est l’affaire de tous et non la responsabilité – exclusive – de certains. Cela n’enlève certainement rien à l’importance de l’exemplarité sur ces questions, mais cela indique aussi très nettement l’idée de responsabilité individuelle. Cette idée finalement que « l’éthique passe par moi ».

D’ailleurs lorsque la question est posée de la confiance envers un certain nombre d’acteurs de la société, les Français font d’abord et avant tout confiance à eux-mêmes en matière d’éthique, devant les ONG ou les PME, et relayant très loin les grandes entreprises, les médias ou les mouvements patronaux. Une réponse que nous observions déjà depuis longtemps dans les enquêtes sur la responsabilité environnementale pour laquelle les citoyens se plaçaient eux-mêmes sur la première marche en matière de confiance. D’ailleurs déjà en 2006, Time Magazine pour son classement de la personnalité de l’année, titrait « YOU » avec une couverture en miroir. L’homme de la situation serait donc nous.

Mais au-delà de la défiance envers ces autres acteurs, nous sommes aussi à travers cette réponse dans le syndrome un peu facile du « je suis éthique et pas toi » qui doit être contre balancé par la démonstration du volontarisme éthique des acteurs politiques et économiques, et faire en sorte, vraiment, et comme le disent les Français, que l’éthique soit bien l’affaire de tous.

Il y a un intérêt à être éthique, beaucoup à perdre à ne pas l’être, probablement un intérêt à croire davantage en la vertu d’autrui plutôt qu’à être d’emblée convaincu de ses vices, et certainement intérêt à prendre sa part de responsabilité sans pour autant surestimer sa propre éthique, toujours perfectible. Mais c’est aussi une révolution culturelle après un modèle de croissance perçu comme un jeu à somme nulle (je gagne sur la perte de l’autre) pour aller vers l’idée que l’on a intérêt au respect et au profit de l’autre, tout un programme !

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