Peter Hartz, la théorie de la formation des jeunes Européens en Allemagne et la réalité : ce qui s'est vraiment passé pour les Espagnols, Grecs et autres Portugais qui ont tenté l'aventure depuis 2008<!-- --> | Atlantico.fr
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L'industriel Peter Hartz veut développer la formation et la mobilité des jeunes dans les Etats membres de l’UE.
L'industriel Peter Hartz veut développer la formation et la mobilité des jeunes dans les Etats membres de l’UE.
©Reuters

STO 2.0

L'industriel Peter Hartz veut développer la formation et la mobilité des jeunes dans les Etats membres de l’UE. Baptisé "Europatriés", ce programme vise à permettre à un jeune chômeur de s’installer temporairement dans un autre Etat afin d’y travailler et d’être formé. Berlin a déjà expérimenté ces dernières années des dispositifs similaires.

Thomas Liebig

Thomas Liebig

Spécialiste des migrations à l'OCDE.

 

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Atlantico : En 2011, l’Allemagne avait déjà voulu attirer les chômeurs européens laissés sur le carreau par la crise financière, principalement ceux de l’Europe du Sud. Quel bilan peut-on tirer de cette expérience trois ans après ?

Thomas Liebig : Le premier constat que l’on peut faire est l’augmentation des migrations des pays de l’Europe du sud vers l’Allemagne. Au début c’était plutôt des Grecs et plus récemment des Italiens et des Espagnols. L’Espagne est d’ailleurs le principal pays ciblé par les programmes européens de l’Allemagne. Les migrations de jeunes venant du sud de l’Europe sont toutefois moins importantes que celles provenant de l’Europe de l’est, de la Pologne, de la Roumanie, de la Hongrie et de la Bulgarie.

On peut dire que cette migration a un peu contribué à soulager le marché du travail et réduire le chômage des jeunes en Europe du Sud, mais l’effet est trop faible pour l’avoir réduit de manière significative. Ces migrants d’Europe du sud sont essentiellement des jeunes hautement qualifiés qui ne sont pas venus en nombre suffisamment grand pour avoir produit un effet considérable sur le marché du travail, ni en Allemagne ni dans leur pays d’origine. Mais les mesures qui ont été prises, surtout en relation avec l’Espagne, ont envoyés un signal positif : que l’Allemagne est prête à investir pour renforcer la mobilité intra-Européenne, pas seulement à son bénéfice, mais aussi à celui des pays en crise.

Plusieurs facteurs expliquent ce bilan mitigé. D’abord la question de l’offre et de la demande. Les jeunes de ces pays préfèrent globalement rester chez eux, même si c’est la crise, car cela ne veut pas dire qu’ils ne vont jamais trouver de travail et qu’il n’y a plus d’embauches, mais simplement que trouver du travail va prendre plus de temps. Les employeurs allemands cherchent des gens qui ont des qualifications techniques dont ne disposent pas forcément ces jeunes, même si les Espagnols et les Italiens sont plutôt qualifiés. Les demandes proviennent surtout des PME de Bavière et du Bade-Wurtemberg, souvent dans les  zones hors des grandes villes alors que les jeunes venant d’Europe du sud cherchent à travailler dans les grandes villes et les entreprises multinationalles. Ce n’est pas forcément là qu’il y a des besoins de main d’œuvre en Allemagne.

Il convient d’ajouter que globalement le taux d'emploi des primo-arrivants en Allemagne est bien plus élevé maintenant qu’avant la crise. Ces jeunes salariés sont donc plus qualifiés que par le passé et mieux intégrés dans le marché du travail depuis 2008-2009 par rapport à la période 2002 – 2007.  La situation évolue : les jeunes qui arrivent en Allemagne restent désormais plus longtemps, ce qui est le signe qu’ils sont mieux intégrés au marché du travail même si cela va prendre un peu de temps.

L’Allemagne a par la suite lancé en 2013 son programme d’aide financière pour attirer des jeunes européens, spécifiquement ceux des pays du sud. Un an et demi après, ce programme baptisé MobiPro a-t-il connu l’effet escompté ?

MobiPro a connu un grand succès car ce programme est généreux, il finance entre autre des cours de langue pour des jeunes au chômage qui ont les compétences recherchés au marché du travail Allemand. Les fonds disponibles cette année ont été utilisés vite en raison de la forte demande. Il touche toutefois une minorité de jeunes Européens venant du sud. Tout le monde n’en profite pas car chaque place coûte assez cher et elles sont limitées. Là encore, les demandes des employeurs allemands concernent les professions moyennement qualifiées où les qualifications techniques sont recherchées.

En quoi peut-on dire que la barrière de la langue est le principal frein, malgré l’organisation de cours d’allemand ?

La langue est en effet le principal frein. À l’OCDE nous avons effectué un sondage auprès des employeurs allemands et nous leur avons demandé quelle est la compétence numéro 1 recherchée lors du recrutement. Ce n’était pas la qualification ou l’expérience mais la maîtrise de la langue allemande, aussi bien pour les petites entreprises que les grandes. Des cours d’allemand sont bien donnés mais l’allemand n’est pas une langue qui s’apprend en quelques heures. Les jeunes venant des pays de l’Europe de l’est ont souvent l’avantage de mieux maîtriser la langue allemande et ont en plus ce profil technique recherché par les employeurs.

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