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La parabole de Philae ou comment il suffirait à l’Europe de vraiment vouloir relancer l’activité économique pour y parvenir
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Un bien pour en finir avec un mal

L’Europe, dont Kissinger regrette de ne pouvoir obtenir le numéro de téléphone, vient de méduser le monde en réussissant un exploit incommensurable : envoyer un robot laboratoire sur une comète. Un succès dantesque qui résonne comme un défi, une leçon et une menace pour les dirigeants politiques du vieux continent.

Pierre Haas

Pierre Haas

Pierre Haas, après avoir servi comme officier dans les Forces françaises libres du Général de Gaulle, a fait carrière de 1950 à 1965 comme directeur général de Continental Grain France, puis à partir de 1963 à la Banque Paribas comme directeur des affaires financières internationales, puis président de Paribas International.

Il a été membre de nombreux conseils d’administration parmi lesquels on citera : Schneider S.A., Newmont Gold à Denver, Power Corporation du Canada et Power Financial.

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En parvenant à déposer le module Philae sur une comète, l'Europe a justifié les raisons ayant poussé les Jean Monnet, de Gaulle et Adenauer à vouloir son intégration, qui, à leurs yeux, en supprimant les causes de la récurrence des guerres franco-allemandes, libérerait un potentiel d’énergies qui ferait du continent une grande puissance mondiale.

La validité de ce pari vient d’être, une fois de plus, confirmée d’une façon éclatante. Des milliers de scientifiques dont 150 Français, d’ingénieurs, de logisticiens, de techniciens ont pendant vingt ans accepté d’unir leurs efforts, taire leurs rivalités, ouverts leurs laboratoires, au détriment de leurs vies personnelles, pour imaginer et concevoir un engin ayant la capacité d’atteindre les confins du système solaire avec, comme l’un de ses principaux objectifs, une tentative de percer le mystère de l’origine de la vie sur Terre.

Le module Philae, après un périple de dix ans et sept heures, de plus de 6 milliards et demi de kilomètres a permis à ses manipulateurs, au Centre de Darmstadt, de commander son « acométissage » à 10 mètres près du lieu prévu et à l’heure calculée à l’avance.

L’heure d’Einstein bien sûr, puisque la communication des premières photos et données n’a demandé que 28 minutes.

Constater qu’un effort européen intégré a permis le succès d’un projet dantesque constitue, pour les décideurs politiques européens, un défi, une leçon et une menace.

Le défi et la leçon sont clairs, une Europe plus et mieux intégrée produirait de meilleurs résultats dans la plupart des domaines de son ressort.

La menace émanerait d’une opinion publique, éblouie par ce succès, qui ne comprendrait pas qu’il soit plus facile de franchir l’espace interstellaire que de satisfaire les priorités humaines et sociales en attente d’une réponse rapide.

Le module Philae, en s’accrochant à une comète, a mis fin au temps de la procrastination.

Sortir de sa torpeur l’économie européenne est à la portée du Président Hollande et de Madame Merkel. La Chancelière, pour y parvenir, devra combattre sur ses deux flancs. Il lui faudra d’abord convaincre son Ministre des Finances, M. Schauble, qu’emprunter pour investir dans la modernisation d’infrastructures vétustes sera utile aux usagers et à l’économie.

Ensuite, Madame Merkel devra déployer son talent de diplomate pour persuader Monsieur Weidmann, le Président de la Bundesbank, dont l’indépendance est garantie par la Constitution Fédérale, qu’il accepte l’achat d’obligations souveraines de la zone euro par l’Institution aux destinées de laquelle Monsieur Draghi préside.

L’essoufflement de la croissance allemande représente un atout incontestable, pour la Chancelière, dans cette négociation interne.

Du côté français, les difficultés sont plus sérieuses. La volonté de Monsieur Hollande de ne pas changer de cap va être d’autant plus difficile à vaincre qu’elle a permis à l’extrême gauche de soutenir que les politiques libérales de nos voisins n’empêchaient pas leurs économies de subir des croissances faibles. A l’évidence, ce sophisme prouve que leur horizon est limité aux pays du Nord de l’Europe.

Au Sud, la Grèce et l’Espagne connaissent une reprise de leurs exportations même si leur chômage demeure à des niveaux insupportables.

Si l’on porte son regard hors du continent, on constate que l’Amérique a retrouvé un taux de croissance convenable, que les dirigeants américains croient perdurable, à condition que l’Europe, seconde puissance économique mondiale, malgré les avancées de la Chine, retrouve sa place de pôle de croissance.

Le danger, pour l’Amérique, d’une persistance de la stagnation en Europe est d’autant plus grand que la Chine souffre d’une chute de tension et que la Russie, du fait des sanctions économiques, devient zone interdite.

Dans ce contexte, des politiques de relance en Allemagne et en France, ces deux pays ensemble représentant 40% du PIB de l’eurozone, constituent l’unique moyen de créer un choc de confiance suffisant pour entrainer une reprise de l’investissement privé dans l’Union européenne.

Le succès du module Philae, en sortant momentanément les français de leur morosité, donne l’occasion au Gouvernement de mettre en place une communication sur la Communauté européenne soulignant à quel degré son existence a été positive dans cette réussite.

Ce nouveau climat pourrait faciliter le changement de cap indispensable pour mettre fin à la menace déflationniste, dont la matérialisation risquerait d’engager l’Europe dans le cycle, dont au bout de 20 ans le Japon ne parvient, toujours, pas à s’extraire.

Il reste à espérer que le Président Hollande comprendra que l’arrivée d’un module européen aux confins du système solaire offre, à la France, une de ces grandes occasions qu’elle a su saisir dans le cours de son Histoire.

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