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Les dirigeants des BRICS : Manmohan Singh (Inde), Dimitry Medvedev (Russie) Hu Jintao (Chine) Dilma Rousseff (Brésil), Jacob Zuma (Afrique du Sud)
Les dirigeants des BRICS : Manmohan Singh (Inde), Dimitry Medvedev (Russie) Hu Jintao (Chine) Dilma Rousseff (Brésil), Jacob Zuma (Afrique du Sud)
©Reuters

Le monde à l'envers

Le groupe des BRICs (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) se réunit ce jeudi à Washington afin d'étudier les modalités d'une aide financière à l'Union européenne. Le rapport de forces serait-il en train de s'inverser ?

Gaspard Koenig

Gaspard Koenig

Gaspard Koenig a fondé en 2013 le think-tank libéral GenerationLibre. Il enseigne la philosophie à Sciences Po Paris. Il a travaillé précédemment au cabinet de Christine Lagarde à Bercy, et à la BERD à Londres. Il est l’auteur de romans et d’essais, et apparaît régulièrement dans les médias, notamment à travers ses chroniques dans Les Echos et l’Opinion. 

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L’Institut de la Finance Internationale, qui représente l’essentiel des institutions bancaires et financières mondiales, a récemment proposé que les BRICs ((Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) confient au FMI quelques dizaines de milliards de dollars. A charge pour celui-ci de les prêter selon ses règles et conditions habituelles à la Grèce et possiblement à d’autres pays européens. 

Le ministre des Finances brésilien, Guido Mantega, a repris cette idée avec enthousiasme, suivi par Christine Lagarde qui se déclara la semaine dernière très intéressée. On murmure même que les neuf milliards du fonds souverain brésilien pourraient être mis à contribution.

Au même moment, les pays du Printemps Arabe commencent à se plaindre que les pays du G8 n’honorent pas leurs récentes promesses de dons en soutien de leur “transition démocratique”. Mais qui pourrait vraiment être surpris que l’Occident, croulant sous les dettes, n’ait plus les moyens de ses idéaux ?

Un système d'aide à l'envers

Ce qui se dessine ces mois-ci, c’est l’inversion progressive du système de l’aide. Mis au point lors de la conférence de Bretton Woods, au lendemain de la seconde guerre mondiale, les différents leviers de l’aide (banques multilatérales, agences de développement nationales, programmes d’aide bilatéraux) devaient permettre aux États occidentaux de maintenir leur influence dans un monde post-colonial.

Influence financière bien sûr, mais aussi politique, dans la mesure où tout don (ou prêt bonifié) faisait l’objet d’une négociation avec le gouvernement récipiendaire, et même morale, puisque les principes du libre échange et de l’État de droit étaient sinon imposés, du moins inlassablement réaffirmés. Les pays “en développement” devaient jurer leur bonne volonté réformatrice avant de tendre la sébile. Lisez Montesquieu et dites merci.

L'heure de la revanche est venue

Il faut croire aujourd’hui que l’élève est en train de surpasser le maître. Les pays que l’on s’entête à appeler “émergents” sont bel et bien émergés. Quant à l’Occident, il a cessé depuis longtemps de s’appliquer à lui-même les principes de bonne santé économique qu’il continuait d’exiger de ses petits protégés d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique latine.

Les flux d’aide traditionnels du “Nord” vers le “Sud” vont prendre le chemin du retour (l’Inde et la Chine ont déjà créé leurs propres agences de développement). Insensiblement, nous allons passer du statut de bienfaiteur intéressé à celui de quémandeur intéressant. Après toutes les leçons que nous leur avons infligées depuis plus d’un demi-siècle, et qu’ils ont dû accepter tête baissée, on ne pourra pas reprocher aux BRICs un léger sentiment revenchard.

Imaginons un instant ce à quoi pourrait ressembler un programme FMI-BRICs en Europe. Par exemple, une interview avec M. Hu Jintao, reconverti comme représentant du FMI à Paris :

- “Les finances publiques?
- Un cas d’école de mauvaise gestion,  il va falloir se serrer la ceinture.
- La réglementation?
- Un enfer bureaucratique, nous allons proposer de réviser les lois grâce à notre initiative de policy dialogue.
- La croissance?
- Elle est bloquée par les lobbies qui se partagent les rentes et les subventions d’État qui faussent le bon fonctionnement du marché.
- Le secteur public?
- Boulimique et inefficace, nous allons mettre fin aux monopoles indus.
- Les libertés individuelles?
- Protégées de droit, inexistantes de fait.
- La gouvernance européenne?
- Pire que le Parti Communiste Chinois, et je sais de quoi je parle. ”

Quant à sa patronne, Christine Lagarde, elle serait trop heureuse de pouvoir imposer en France, comme Directrice Générale du FMI, les (excellentes) mesures qu’on lui a refusées comme ministre des Finances. Allons-nous laisser les BRICs reconstruire l’Europe? Ou aurons-nous le courage de prendre notre avenir en main?

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