Valls : pourquoi les médias (et les sondages mal interprétés) enterrent un peu vite Hollande<!-- --> | Atlantico.fr
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Manuel Valls et François Hollande.
Manuel Valls et François Hollande.
©Reuters

Born to be alive

Selon un sondage Odoxa pour RTL, 71 % des Français font confiance à Manuel Valls pour décider des grandes orientations en matière économique et sociale pour la seconde moitié du quinquennat, contre 22 % pour François Hollande. La réponse à une question étrangement posée... Et qui ne remet pas en cause le leadership de François Hollande par rapport à Manuel Valls.

Virginie Martin

Virginie Martin

Virginie Martin est Docteure en sciences politiques, habilitée à Diriger des Recherches en sciences de gestion, politiste, professeure à KEDGE Business School, co-responsable du comité scientifique de la Revue Politique et Parlementaire.

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Atlantico : Dans le même temps, 49 % des sympathisants de gauche font confiance à François Hollande, contre 45 % pour Manuel Valls. Comment expliquer ce résultat et cet enseignement du sondage passé sous silence ? En quoi peut-on dire que la question du sondage est mal posée et que l’interprétation, à savoir que les Français voudraient que les "rênes du pays soient confiées à Manuel Valls" est trompeuse ?

Virginie Martin : Pour les sympathisants de gauche François Hollande représente mieux le socialisme dans son histoire car il a été Premier secrétaire du parti pendant une dizaine d’années. Ségolène Royal s’est par ailleurs qualifiée pour le second tour en 2007 et c’était son ancienne compagne. Pour ces raisons, Français Hollande devrait être encore plus haut chez les sympathisants de gauche alors que Manuel Valls a au contraire mis un pied dans la fourmilière en voulant changer le nom du PS. Au niveau des Français dans son ensemble, le Premier ministre semble mieux incarner ce qu’ils attendent d’un président de la Ve République : un leadership et une image d’autorité. C’est aussi ce qui explique que François Hollande soit bas même chez les sympathisants de gauche.

La question posée par Odoxa est une non-question car le Président est élu par les Français pour 5 ans, donc Manuel Valls n’a aucune légitimité à part celle donnée par François Hollande qui l’a nommé. On aurait pu demander "Parmi toutes les personnalités du gouvernement à qui faites-vous le plus confiance" ou "qui voyez-vous élu président en cas de démission de François Hollande avec des élections anticipées ?" La façon dont cette question étrange a été posée tend à affaiblir encore plus François Hollande.

Dans quelle mesure peut-on dire que François Hollande conserve encore du soutien auprès des sympathisants de gauche ? Comment peut-on l’expliquer ?

Les sympathisants de gauche veulent un marqueur qui est plus à gauche et François Hollande l’est plus que Manuel Valls. Sinon dans l’absolu il serait sans doute plus bas. La question est clivante et mal posée mais cela veut dire que les sympathisants de gauche tiennent au logiciel plutôt classique et traditionnel. Manuel Valls est par ailleurs un jeune Premier ministre et on peut lui reprocher son manque d’expérience. Même si François Hollande l’était aussi avant d’être Président, il avait tout de même traversé la génération Mitterrand.

En quoi peut-on dire qu’un Manuel Valls président ne ferait qu’appliquer la même politique économique que François Hollande ? Dans quelle mesure cette politique économique pourrait aussi être mise en œuvre par Alain Juppé ?

C’est tout de même le Président qui imprime un choix. Sans l’accord de François Hollande Emmanuel Macron n’est pas ministre de l’économie. En matière de politique économique il me semble qu’il n’y aurait pas beaucoup d’écart entre François Hollande et ce que pourrait faire Manuel Valls. Mais compte tenu de nos contraintes actuelles de marché, des contraintes européennes internationales et des difficultés pour réformer le pays est ce quelqu’un pourrait mener une politique économique très différente ? Une politique économique à la Alain Juppé ou à la François Bayrou ressemblerait à celle de François Hollande ou Manuel Valls.

Aujourd’hui il y a bien plus d’opposition entre la gauche traditionnelle et la gauche de la gauche. Il n’y a par exemple pas beaucoup de lien idéologique entre un Guillaume Balas et un Manuel Valls. On le retrouve aussi à droite. Quelle proximité idéologique entre Laurent Wauquiez et Alain Juppé par exemple ? Entre un Manuel Valls et un Alain Juppé il y a une espèce de mainstream. Ils sont d’accord sur l’Europe, sur l’économie de marché, sur la question sociétale et sur la méthode pour réformer sans trop de remous. Le clivage idéologique est très profond au sein des grandes formations politiques. Aujourd’hui, si je vote pour le PS ou pour l’UMP je vote pour quelle tendance ?

A contrario, dans quelle mesure Manuel Valls appliquerait une méthode de gestion du pouvoir différente de celle de François Hollande s’il était élu président ?

Manuel Valls serait plus en situation de travailler l’autorité et le charisme, toutes ces choses qui collent à la Ve République. Mais ce pays est tellement clivé qu’il n’est pas sûr qu’il pourrait réformer par la force. Aujourd’hui imposer est quelque chose de complexe en France. Lors du Mariage pour tous le gouvernement n’a pas vu arriver les problèmes. Il y a eu un manque de concertation en amont et tout s’est réveillé.

Alors que le Canard Enchaîné a évoqué la semaine dernière les tensions dans le couple exécutif et que François Hollande est au plus bas dans les sondages, la seconde moitié du quinquennat peut-elle être explosive entre un François Hollande qui veut se représenter et un Premier ministre qui souhaite quitter Matignon pour l’Elysée ? Qui pourrait sortir vainqueur de ce duel ?

C’est un peu prématuré car il reste 2 ans et demi avant l’élection. Deux ans et demi avant 2012 c’est Dominique Strauss Kahn qui était le favori de la primaire socialiste. Il est évident que Manuel Valls veut être président, mais il n’est pas évident qu’il soit suffisamment haut pour gagner la prochaine primaire. De toute façon en cas de duel entre Manuel Valls et François Hollande, ils iront droit dans le mur. Les échecs seront tellement forts qu’ils n’ont pas intérêt à s’autodétruire surtout en ce moment.

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