Changement de nom du FN, Marine Le Pen ne dément ni ne confirme : pourquoi ce serait en fait le moment ou jamais pour le faire<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Front national pourrait changer de nom.
Le Front national pourrait changer de nom.
©eelv.fr

Atermoiements

Un ballon d'essai a été lancé par des cadres du FN, dont Florian Philippot. Une consultation des militants frontistes pourrait soulever la question d'un changement de nom du parti. Risqué politiquement et peu profitable électoralement, il est incertain que l'appareil cède à cette tentation. Ce qui l'est par contre, c'est que le FN campera sur ses positions de fond : la dédiabolisation, mais pas trop...

Sylvain Crépon

Sylvain Crépon

Sylvain Crépon, docteur en sociologie et chercheur au laboratoire Sophiapol de l'université Paris-Ouest-Nanterre, étudie le Front national depuis le milieu des années 1990.

Auteur de plusieurs travaux de référence sur l'extrême droite, ses recherches portent également sur les minorités religieuses en France et en Europe.

Son dernier livre : Enquête au coeur du nouveau Front national (Nouveau Monde Editions, mars 2012)

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Atlantico : Certains cadres du FN ont laissé entendre que lors de la prochaine consultation des militants, la question d'un possible changement de nom du parti pourrait être soulevée. Jean-Marie Le Pen affaibli politiquement, le moment est-il opportun pour sa fille ?

Sylvain Crépon : C'est ce que Marine Le Pen essaie elle-même de savoir. C'est de la communication, un ballon d'essai, afin d'évaluer les forces en présence au sein de son propre parti. Peut-être que le nom, elle ne le maîtrise en définitive pas aussi bien que cela... Elle va pouvoir sonder les remontées au sein de son parti, procéder à un sondage en interne en quelque sorte.

Les positionnements de chacun vont être révélés au grand jour, notamment de la garde qui gravite encore autour de Jean-Marie Le Pen. L'idée pour Marine Le pen, est de voir s'ils essaient de se structurer, de monter au créneau ou si en réalité ils sont marginalisés. Rien ne l'empêche d'estimer qu'il est trop tôt et de reconduire l'action dans le temps.

C'est de toute façon une meilleure fenêtre de tir qu'en 2011 ou en 2012, c'est certain.

Entre ceux qui s'étaient opposés à Marine Le Pen pour la direction du parti, l'ancienne garde et la nouvelle, le jeu en vaudrait-il la chandelle sur le plan politique ?

Jean-Marie Le Pen est affaibli suite à ses sorties à répétition, notamment suite à l'affaire "Monseigneur Ebola" qui a poussé Marine Le Pen à menancer le blog de son père de fermeture. C'est une anecdote révélatrice de la marginalisation de Jean-Marie Le Pen. Son entourage pèse moins lourd dans l'appareil, et Marine Le Pen peut plus ouvertement s'opposer à lui. Les militants, cadres et politiques se rendent compte qu'il y a plus de dividendes à retirer du soutien à Marine Le Pen plutôt qu'à son père. Nombreux sont ceux qui sont plus proches de Jean-Marie Le Pen mais qui ont soutenu en 2011 Marine Le Pen dans un jeu de calcul électoral.  

Il n'y aura de toute façon pas d'éclatement du FN autour de la question du changement de nom. Si le changement de nom s'accompagne d'un changement de programme, ce serait une nouveauté, un nouveau Front national, avec des risques d'éclatement.

Mais dans le cas contraire, si le changement de nom ne donne pas lieu à un changement programmatique sur les thématiques de préférence nationale, de droit du sol au bénéfice du droit du sang, si ce socle nationaliste perdure, ce ne sera que du marketing ! Et il n'est pas aujourd'hui question d'en finir avec ces fondamentaux.

Autrement dit, le FN peut se dédiaboliser mais pas trop...

Le Front national ne peut pas trop se dédiaboliser, au risque de devenir banal, un parti comme un autre. Or, le capital politique du FN dans le champ politique français, c'est sa radicalité. Mais, de la même manière, s'il se radicalise trop, il se marginalise. Donc le FN est sans cesse en train d'envoyer des signaux contradictoires, et c'est ce qui fait sa force électorale en même temps. La radicalité d'un côté pour satisfaire son électorat classique, et la bonne conduite démocratique de l'autre, de façon à pouvoir empiéter sur un électorat toujours réticent à voter pour lui. 

Suite à des entretiens conduits avec beaucoup de cadres, je peux affirmer qu'ils ne veulent pas trop se banaliser. Ils ne veulent pas être un UMP bis. Reste la question du souverainisme à droite, qui est une place à prendre. Mais dans ce cas de figure, les pertes pourraient être supérieures aux gains.

Et sur le plan purement électoral, n'y a t-il pas d'intérêt à poursuivre cette dédiabolisation de vernis ? Et donc de changer symboliquement de nom ?

Le FN est très associé à la figure de son chef, et si Marine Le Pen reste, c'est elle qui incarnera le mouvement. C'est traditionnel dans les partis d'extrême droite. Pas sûr toutefois qu'un simple changement de nom amène un nouvel électorat, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de nouveau potentiel électoral pour le FN.

Le FN a pour l'instant été assez adroit dans son mouvement de dédiabolisation, avec un excellent relais médiatique, peut-être trop d'ailleurs. Dans tous les cas, cela a contribué dans l'esprit des gens à asseoir l'idée que le FN de Marine n'était pas celui du père. Mais attention, parmi la nouvelle génération de frontistes, nombreux sont ceux qui restent très extrémistes. Et ces derniers progressent au sein de l'appareil politique. Il ne faut pas croire non plus que les oripeaux extrêmistes auraient disparu d'un coup de baguette magique avec Marine Le Pen.

La nouvelle génération symbolisée notamment par Marion Maréchal peut-elle s'en mêler et constituer un obstacle supplémentaire ?

Qui d'elle ou de Philippot arrivera en tête suite au vote des adhérents lors du congrès, c'est un mystère. Marion Maréchal est très populaire, elle a beaucoup de soutiens au sein du parti, mais a un agenda beaucoup plus porté sur le long terme que Marine Le Pen ou Florian Philippot.

Propos recueillis parFranck Michel

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