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Pourquoi certaines personnes développent plus de complexes que d'autres
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Bonnes feuilles

L'image de soi, l'apparence physique, est le parent pauvre du développement personnel. L'auteur décode l'image que nous renvoie le miroir tous les jours entre ce que l'on voit et ce que l'on se représente pour s'aimer enfin tel qu'on est. Extrait de "S'aimer même quand on est bourré de complexes", de Aurore Aimelet, publié aux éditions Solar (1/2).

Aurore Aimelet

Aurore Aimelet

Journaliste indépendante, Aurore Aimelet est spécialisée en psychologie et collabore régulièrement à Psychologie Magazine. Elle est l'auteur de plusieurs ouvrages en développement personnel, parmi lesquels "Dis bonjours à la dame" ou "Apprivoiser sa culpabilité", aux éditions Albin Michel.

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Pourquoi le malaise est-il plus grand en présence des autres ? Pourquoi cherchons- nous toujours à nous estimer en fonction du plus grand, de la plus belle ? Si la comparaison a du sens, une fonction, elle est loin d’être opportune.

"Je ne suis pas aussi séduisant que les autres"

Vincent, 38 ans, est cadre commercial. Quand il est seul, il dit qu’il n’a pas de problèmes avec son physique. C’est quand il est « entouré d’autres » que le malaise survient, car la comparaison alimente ses complexes.

★ Franchement, je ne suis pas un Apollon. Mon allure ne m’empêche pas de dormir non plus, je vous rassure. Pourtant, quand je feuillette un magazine ou quand je suis avec des petits jeunes parfaitement habillés, rasés de près, le cheveu lisse et les abdos saillants, je ne me sens pas très bien. Plus les années passent, plus ils sont nombreux, ces redresseurs de torts ! C’est moi qui vieillis, je sais. Peut- être que je le vis mal ? Je les regarde, ces hommes, et ça me renvoie à ma pauvre condition de quadra bedonnant… Je pense que c’est pire pour les femmes, cela dit, qui doivent ressembler à Miss France de 7 à 77 ans, sept jours sur sept. Mais les hommes s’y sont mis. Et je suis une victime de la mode, au sens propre : je me sens victime parce que je ne suis pas comme eux, pas aussi bien qu’eux. Je ne suis pas repoussant, non, mais je ne suis pas attirant non plus. Je le remarque quand je suis avec mes collègues, par exemple, ou certains de mes amis. Le pire ? Le club de tennis… Là, c’est l’enfer. Je songe même à arrêter tellement je suis mal à l’aise. Je me surprends à rentrer mon ventre, par exemple, ou à porter une casquette pour éviter qu’on se moque de mes cheveux clairsemés. Et puis, je vois bien que les femmes ne me regardent pas, qu’elles en préfèrent d’autres, des plus grands, des plus forts, avec plus de muscles et moins de gras ! Ça me fait un peu mal, évidemment, de ne pas faire partie de l’élite.

Mieux comprendre

Se rassurer coûte que coûte

Seul devant son miroir, Vincent va plutôt bien, merci ! Cependant, dès qu’il se trouve en présence des autres, son moral vacille. Qu’est- ce que cetentourage réactive ? Pourquoi ces éléments de comparaison le déséquilibrent- ils à ce point ? Au- delà, comment son histoire, son vécu résonnent- ils en nous ? Éprouvons- nous le même malaise devant la couverture d’un magazine ou devant notre si jolie voisine ? Si nous sommes honnêtes, nous sommes nombreux à répondre par l’affirmative.

Là encore, il convient d’analyser un peu ce qui se passe au niveau psychique. L’individu, nous l’avons dit précédemment, a besoin des autres pour exister et se sentir exister. De ces échanges, de ces liens affectifs, il puise son sentiment de sécurité intérieure, un sentiment qui lui sert de base stable. Ce n’est qu’une fois rassuré sur son sort (–> oui, je suis aimé, reconnu, valorisé par mon entourage, tout va bien…) qu’il pourra construire son identité, asseoir sa singularité (–> … donc je peux être moi- même). Très simplement, c’est parce qu’il aura la certitude de faire partie d’un groupe, d’y avoir une place, un rôle, une fonction, d’être entièrement accepté par ce groupe, qu’il pourra devenir qui il est, pour reprendre la formule de Nietzsche.

Or, lorsque ce sentiment a été peu ou mal construit dans l’enfance, quand les parents n’ont pas suffisamment participé à l’élaboration de ce climat de confiance, l’enfant manque de sécurité. Il en cherche toujours à l’âge adulte. Il doit être conforme, il doit ressembler aux autres, il doit appartenir au groupe, comme les enfants qui veulent les mêmes jouets, comme les ados qui achètent les mêmes vêtements…

La vue d’une plus belle, d’un plus fort, nous déséquilibre inévitablement, et il n’est nul besoin que cette confrontation ait lieu dans la réalité : un simple regard aux couvertures des magazines suffit à nous faire vaciller. Le psychisme imagine, se projette, et nous voilà de nouveau confrontés à notre peur initiale : celle de ne pouvoir faire partie du groupe, et donc de survivre. Vincent d’ailleurs le laisse entendre en utilisant la formule « faire partie de l’élite ».

Si nous nous comparons, finalement, c’est dans l’espoir de nous rassurer. Exactement comme lorsque nous montons, avec angoisse, sur la balance : si elle indique un poids inférieur à celui escompté, c’est le soulagement ; si elle a le malheur de nous dire le contraire, c’est l’effondrement. Il en va de même auprès des autres : si nous sommes pareils, conformes, c’est l’apaisement ; si nous ne pouvons que constater amèrement notre différence, c’est l’inquiétude. Notre sécurité est de nouveau mise à mal, même si, évidemment, tout cela se passe au niveau inconscient. Malheureusement, parvenir à « ressembler à » ne changera pas grand- chose en profondeur.

Cela nous sécurise momentanément, mais la fragilité ne s’estompe pas, exactement de la même façon que le regard, les commentaires positifs et l’amour de l’autre ne peuvent pas, à long terme, être salvateurs.

Extrait de "S'aimer, même quand on est bourré de complexes", de Aurore Aimelet, publié aux éditions Solar, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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